vendredi 30 septembre 2016

Danse et Musica : Drôle de rencontre au Point d’Eau

Nous connaissons l’esprit d’ouverture de Musica, sa volonté de chercher à la marge, de creuser de nouvelles pistes et de mixer les autres modes d’expression (cinéma, concert de Kat Onoma, ..). Trouver un spectacle de danse dans le programme de Musica n’est qu’une demi-surprise, même si le spectacle s’intitule "My Rock". 

Mais à y regarder de plus près, les liens se tissent. Jean-Claude Gallotta se réfère, dans son travail – et pour cette pièce - à Merce Cunningham dont on connait la proximité avec John Cage. Et sa méthode de travail, telle qu’il a pu l’exposer au public resté à la rencontre après le spectacle au Point d’Eau à Ostwald, suit la même ligne: Il crée ses chorégraphies dans le silence et ensuite il les fait "habiter" par les danseurs – non définis au départ - sur l’espace du plateau et affinant la chorégraphie. 
"Si le plateau l’accepte", c’est bon, cela sera dans le spectacle. Il en est de même pour les douze morceaux de rock qu’il a finalement gardés sur la masse de tous ceux qu’il avait envie de montrer. Il faut que l’ensemble fonctionne !

Nous avons donc droit à une panoplie de chanteurs et de groupes et quelques découvertes – et même une surprise: Le morceau des Beatles, que chacun va se chanter dans sa tête pendant que le couple de danseurs sur scène danse un rock endiablé dans le silence. Cela démarre par Elvis Presley, "The King", celui par qui cette musique pleine "d’amour" - dans tous les sens – et nous l’avons bien senti sur la scène – a bouleversé la vie et la culture. Au même moment où, justement à New-York Cunningham a bouleversé la danse contemporaine en intégrant lui aussi la musique contemporaine et les artistes plasticiens de l’époque dans ses spectacles. 

Jean-Claude Gallotta qui, tel Hitchkock, passe en fond de scène avec son chapeau (héritage de, et hommage à son père) lors du premier tableau, derrière ses danseurs - tous différents, chacun et chacune avec ses caractéristique et son originalité. Allez, citons-les:
Agnès Canova, Ximena Figueroa, Paul Gouëllo, Ibrahim Guétissi, Georgia Ives, Bernardita Moya Alcade, Fuxi Li, Lilou Niang, Jérémy Sylvetti, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger et Béatrice Warrand...

Lui-même, le grand Jean-Claude, va esquisser de temps en temps quelques pas de danse, prémisses d’un autre spectacle rêvé, mais surtout nous raconter, pour chaque morceau qu’il a gardé "son" rapport à cette musique  qui l’a construit.

Des Rolling Stones aux Who, de Bob Dylan à Léonard Cohen, de Nirvana au Velvet Underground, de Nick Drake (mort trop jeune et dont une des dernière lettre disait; "Je ne trouve plus mes mots") à Nirvana et Kurt Kobain, qui lui a dit "Il vaut mieux brûler que de se faner", ses histoires et sa lecture des morceaux choisis ont appelé dans les mémoires (en tout cas celle des moins jeunes) quelques souvenirs et nostalgies ou réminiscences heureuses.  
Le tout se concluant par un magnifique "Gloria" de Patti Smith avec une montée en puissance également sur la scène où l’ensemble des danseurs à l’unisson partaient dans une ronde endiablée avant de trouver l’unisson avec Wilson Picket et la scène partagée par les spectateurs dont les jambes démangeaient depuis trop longtemps...

Musica 2016 - Gallotta  - My Rock - Photo: lfdd

Jean-Claude Gallotta a promis de refaire une version "féminine" de My Rock, nous l’attendons avec impatience…  Et nous nous disons que la "musique contemporaine" c’est cela aussi.


Musica 2016 - Gallotta  - My Rock - Photo: lfdd

Bon Musica

La Fleur du Dimanche

Le site de Jean-Claude Gallotta est là: 
http://www.gallotta-danse.com/spip.php



L’Accroche-Note à Musica : Variété et variations

L’ensemble de musique contemporaine à dimension variable l’Accroche-Note est bien connu à Strasbourg – ailleurs également. Le concert qu’ils ont donné à la salle de la Bourse a encore montré l’étendue de leur talent et la variété de leur répertoire. 
Bien que très cohérent dans son ensemble, le concert a rassemblé un solo de clarinette d’Alberto Posadas, un poème chanté d’Ahmed Essyad, une pièce avec piano très forte du compositeur strasbourgeois Christophe Bertrand et une miniature très fantaisiste de Martin Matalon.

Pour la première Pièce, Armand Angster, pendant les douze minutes sans répit  que dure "Sinolon" d’Alberto Posadas, "habitait" la musique avec ses variations de timbres, ses micro-intervales, ses multiphoniques, ses glissandis, ses trémolos de gammes bi-chromatiques, et toutes ses variations avec une concentration et une virtuosité parfaite en réalisant "l’unité de la diversité". Un grand moment.

La deuxième pièce, d’Ahmed Essyad donne la part belle à la voix, et celle, magnifique de Françoise Kubler va nous conter l’histoire du diable, qui va écrire sa "Lettre d’amour" à Dieu. Elle est harmonieusement soutenue et accompagnée par l’orchestration mêlant des sonorités arabo-andalouses à la composition contemporaine. Et l’on se surprend à essayer de savoir si, quand le diable est franc quand il dit : 
"Dis-toi que, si je suis dans le blasphème, ou si je suis dans la foi, tout est tissé par toi, tout est à toi. Je n’ai agi que par amour."

Musica 2016 - Accroche-Note - Christophe Bertrand - Photo: lfdd


Pour la troisième pièce, "La chute du rouge", de Christophe Bertrand, très sobre et forte en même temps, intense et qui s’achève en de calmes accords, nous nous prenons à regretter que le jeune compositeur ne puisse plus nous présenter de nouvelles œuvres.

Le concert s’achève avec une pièce de Martin Matalon, "la carta", petite miniature pleine d’humour de dix-sept minutes, composée de neuf mouvements qui s’enchaînent et où les trois instrumentistes se passent le relais à tisser une oeuvre délicate et hétéroclite en soutenant la "chanteuse" qui va explorer la totalité du registre de ce qui peut sortir de la bouche comme sons:
mots, borborygmes, onomatopées, souffles, vocalises, claquements de bouche ou de langue, plops, incantations, soupirs, rires, râles, sifflements, crachotement, sons tenus, rires chantés,  expirations, sifflements, lamentations,  mélopées,…  tout cela en sons réels et retravaillés avec des effets, roulements, échos, et de l’électronique qui donnent à la pièce une atmosphère surréaliste et presque comique.

Musica 2016 - Accroche-Note  - Martin Matalon - Photo: lfdd

Bon Musica

La Fleur du Dimanche

La géométrie variable de l'Accroche Note ce soir-là fut composé de:
Armand Angster (Clarinette), Françoise Kubler (Soprano), Emmanuel Séjourné (Direction pour Lettre d'amour et Percussion), Hélène Breschand (Harpe), Marie-Andrée Jeorger (Accordéon), Fabio Codoi (Piano), Christophe Beau (Violoncelle), Jean-Daniel Hégé (Contrebasse)

jeudi 29 septembre 2016

Musica 2016 et le "Temps présent": Pierre Henry sculpte le son, Thierry Balasse l'éclaire

Nous avons pu voir Thierry Balasse à l'ouvre la semaine dernière à la console pour le concert de Pierre Henry avec sa création "Chroniques Terriennes" et une version de son "Dracula".

Mais la surprise du "Concert pour le temps présent" autour de l'oeuvre de Pierre Henry et Michel Colombier datant de 1967 fut plus qu'agréable, jubilatoire !

C'est par la création de la pièce "Fanfare et arc-en-ciel", spécialement créée par Pierre Henri pour cette soirée exceptionnelle qu'a démarré le programme dans cette salle de la Cité de la Musique et de la Danse. Une véritable "expérience acousmatique" comme l'a annoncé Thierry Balasse aux spectateurs qui remplissaient la salle.
Effectivement, comme pour les concerts du samedi 24 septembre (voir le billet ici). 
En effet, pas d'orchestre, mais des hauts-parleurs disposés sur scène, accrochés aux cintres et éparpillés autour de la salle. Le petit plus, ce fut l'éclairage artistiquement réalise de ces objets hétéroclites et de leur mise en lumière selon qu'ils étaient ou non sollicités, selon les sons qu'ils devaient produire. En quelque sorte, Pierre Henry était le sculpteur des sons et Thierry Balasse le metteur en espace. Et l'on pouvait très concrètement se rendre compte dans un épisode vers la fin de la pièce, quand le son, mélange d'électronique et de percussion voyageait d'un haut-parleur ou d'un groupe de hauts-parleurs vers les autres de la qualité de son qui changeait, on pouvait donc voir-entendre son caractère, sa couleur, changer et former un vrai arc-en ciel comme annoncé dans le titre. Pour ce qui est de la "Fanfare", celle qui a ouvert les festivités, Pierre Henry s'est servi d'un extrait de "La Péri ou La Fleur d'Immortalité", un poème dansé de Paul Dukas.

Musica 2016 - Thierry Balasse - Inouïe - Fusion A.A.N. - Photo: lfdd


La deuxième pièce "Fusion A.A.N." a permis à l'ensemble de la compagnie Inouïe de Thierry Balasse à la fois d'improviser dans un cadre donné mais également de marier les sons analogiques et les sons électroniques dans une gestuelle directe et (presque) sans ordinateur: le piano préparé avec Cécile Maisonhaute, les percussions et le hang avec Eric Groleau, le "spatialisateur" et les synthétiseurs avec Benoît Meurant, la guitare électrique avec Eric Löhrer, la basse avec Elise Blanchard, les bagues larsen et le cadre de piano avec Thierry Balasse.

Musica 2016 - Thierry Balasse - Inouïe - Messe pour le Temps Présent - live - Pierre Henry - Photo: lfdd


Le clou de la soirée fut bien sûr la "reconstitution" avec (si possible) les instruments d'origine de "La Messe pour le temps présent" créée par Pierre Henry et Michel Colombier (qui avait fait les enregistrement de tous les sons rock, jerk, slow, etc. par un orchestre et ses instruments en studio toute une journée, avant que  Pierre Henry prenne ses ciseaux (et ses synthétiseurs).
La version ainsi exhumée telle une pièce d'archéologie et reconstituée par de vrais musiciens en "direct live", mélange d'ailleurs de deux versions différentes - celle qui existe sur disque et celle qui servit de musique pour le Ballet de Béjart resurgit ainsi nos seulement à nos oreilles, mais également sous nos yeux, avec à la fois l'orchestre Rock, mais également les synthé, les Moog, la table de mixage -hsitorique de Pierre Henry, des synthétiseurs de l'époque - le synthi VCS3 ou le Synhty AKS - et un thérémine (qui remplaçait un modulateur).

Alors pour vous faire regretter de ne pas y avoir été - ou pour vous permettre de comparer les versions live et le disque, voici le "tube": "Psyché Rock"






La reconstitution et le mise en espace et en gestes fut un moment de nostalgie émouvante, et l'on s'est cru à rêver à la reconstitution du groupe Spooky Tooth qui aurait pris la suite.
Bon, allez, je vous l'offre:

Pierre Henry & Spooky Tooth - 1969 - Ceremony... par meir-rivkin



Bon concerts, et bon Musica

La Fleur du Dimanche

Ce soir, à la Salle de la Bourse à 16h30 : L'Accroche Note et de la Musique de Chambre

Et à 20h30 au Point d'Eau à Ostwald, cela danse avec Jean-Claude Gallota: My Rock 


      



mardi 27 septembre 2016

Un Art 8 1/2 à Musica : Cinéma muet et Musique improvisée par Jean-François Zygel

Grande (et longue, au point d'être découpée en deux) soirée que nous propose Musica dans son esprit d'ouverture aux autres Arts:

Un projection d'un film "muet", beau pari !

Et pari complètement réussi: la plus grande salle du cinéma UGC de Strasbourg pleine à craquer pour deux longues soirées de projection de plus de 3 heures avec le film - le monument devrait-on dire - "Les Misérables" dans la version réalisée par Henri Frescourt en 1925, et non pas "accompagnée", mais dynamisée, sinon "dynamitée" par Jean-François Zygel, compositeur et improvisateur, Victoire de la Musique 2006 et animateur de l'émission de radio "La preuve par Z" sur France Inter.

Son talent d'animateur est évident.  Lors des présentations de ces deux soirées, il nous raconte avec énergie la naissance du cinéma et de la musique d'accompagnement, musique qui aujourd'hui n'a plus la même raison d'être et pourrait accéder au rang d'Art majeur - je propose le 8 1/2 !

Cela devient une évidence devant le talent d'improvisation et d'invention de Jean-François Zygel, collant aux images, suspendant quelques notes pour faire planer un silence intrigant ou inquiétant, nous rappelant des airs que nous devons découvrir entre les notes qu'il joue, que ce soient des chansons populaires, des airs romantiques, des chants guerriers et révolutionnaires ou tout simplement de ses compositions qui vont soutenir et éclairer l'action de ce film magnifique et, comme le dit Jean-François Zygel "qui incarne l'invisible mouvement de leur âme et des passions qui les animent".

Musica 2016 - Les Misérables - UGC - Jean-François Zygel- Photo: lfdd

L'histoire des Misérables, qui ne la connait? Qui ne connait Jean Valjean, ancien bagnard qui par la grâce de Monseigneur Myriel auquel il a dérobé de l'or, décide de changer de vie, de faire le bien et  va s'occuper en particulier de Fantine et de sa fille Cosette.
Qui ne se souvient de Javert qui va se trouver régulièrement en travers de son chemin, des Thénardier et de Marius, tiraillé entre son père et son grand-père.
Qui ne se souvient de la fresque historique - que ce soit dans le livre de Victor Hugo et au cinéma - sur presque un siècle imbrique la vie des héros dans le cours des événéments (de la bataille de Waterloo à la commune de Paris).
Le film, restauré avec les "couleurs" de l'époque est magnifique, les acteurs impeccables, leur jeu - en particulier celui de Gabriel Gabro en Jean Valjean - non surjoué, et la mise en scène et la réalisation d'Henri Frescourt impeccable. Les décors qu'il a trouvé - même en extérieur - tous magnifiques. Il faut juste encore rappeler que Henri Frescourt était un grand "Feuilletoniste" du cinéma muet, une époque (d'avant la télé) où l'on faisait aussi des "séries", le film étant projeté par épisodes successifs  - chaque semaine un nouveau - ce qui explique les 4 parties des Misérables auxquelles nous avons eu droit en deux soirées magnifiques.

Merci Monsieur Frescour, merci Monsieur Zygel et merci à Musica et à l'UGC pour le spectacle.



Musica à l'UGC avec Jean-François Zigel: les Misérables - Photo: lfdd



La Fleur du Dimanche  




Musica 2016: un trio dans l'espace, un opéra en chambre et... soirée ciné

Après un samedi extra-ordinaire, un dimanche "ordinaire" à Musica, c'est au moins trois concerts....
Celui du matin nous fait prendre le chemin excentré de l'auditorium de France 3 Alsace - et non de l'habituelle salle de la Bourse, et la raison, on l'imagine, n'est pas dans le programme, ni la distribution, mais dans la mise en scène.
Le cyclo de l'auditorium a donné toutes ses capacités au talent des musiciens et à la mise en espace de la musique voulue par Kurtag et Stroppa.


Aimard - Simpson - Tamesit

Il faut dire que le trio virtuose de musiciens - Pierre-Laurent Aimard au piano, Mark Simpson à la clarinette et Antoine Tamestit à l'alto, ont brillé avec brio dans ce trio entrelacé de compositeur qui se rendent des hommages rebondissants (avec un Béla Bartok qui s'immisce en silence dans le lot).


Musica 2016 - Pierre-Laurent Aimard - Antoine Tamesit - Györki Kurtag - Photo: lfdd

Musica 2016 - Pierre-Laurent Aimard - Antoine Tamesit - Györki Kurtag - Photo: lfdd

Le concert, enroulé et centré autour de Robert Schumann (c'est à lui que l'hommage au final est rendu) présente quelques pages colorées du compositeur: des extraits de "Bunte Blätter, opus 99" qui sont de petits bijoux de concentration (on retrouve l'esprit du concert du samedi matin), concentration et densité, aller jusqu'à la substantifique moelle, tel pourrait être le leitmotiv du concert: 
Autant dans l'hommage aux "Märchenerzählungen" de Schumann dans "Hommage à R. Sch. opus 15d" de György Kurtag que dans ses "jeux" - "Jelek, Jatékok es üzenetek" et "Jatékokt" que dans l'hommage de Marco Stroppa à un maître dont il estime les leçons de musique "inoubliables", les pièces sont ciselées comme des haïkus, petits bijousx sonores, magnifiques dialogues entre les deux - ou trois dans les trios - instruments avec une véritable écoute et symbiose entre les musiciens.


Musica 2016 - Pierre-Laurent Aimard - Mark Simpson - Antoine Tamesit -  Marco Stroppa - Photo: lfdd

Musica 2016 - Pierre-Laurent Aimard - Mark Simpson - Antoine Tamesit -  Marco Stroppa - Photo: lfdd

Musica 2016 - Pierre-Laurent Aimard - Mark Simpson - Antoine Tamesit -  Marco Stroppa - Photo: lfdd

Concernant la pièce de Marco Stroppa "Hommage à Guy K.", il faut noter la conception spatiale de l'interprétation et de par certaines techniques de jeu (par exemple le fait de faire jouer l'alto et la clarinette "dans" le piano) amène des sonorités étonnantes et inouïes.
Le concert fut un beau voyage dans le rêve et le fantastique.

Mririda

L'après-midi fut consacré à un opéra de chambre, à la Cité de la musique et de la danse. L'Ensemble Orchestral du Conservatoire et de l'Académie de Musique de Strasbourg y ont interprété en création mondiale une commande de l'Opéra national du Rhin, "Mririda" d'Ahmed Essyad sur un livret de Claudine Galéa dans une mise en scène et des décors d'Olivier Achard. L'ensemble orchestral a préparé la représentation sous la responsabilité d'Armand Angster et c'est Léo Warynski qui a dirigé la représentation, Sandrine Abello, elle, dirigeant les choeurs de l'Opéra national du Rhin.




La pièce est inspirée de la vie d'une poétesse qui a vécu en femme libre dans le Haut-Atlas. Ahmed Essyad en fait une histoire universelle qui interroge la violence, la guerre, la place de la femme et sa quête de liberté à travers un village qui risque d'être détruit par les soldats. Une histoire qui trouve un écho de triste actualité encore de nos jours.


Les Misérables

La soirée cinéma démarre après la pause... et la présentation de Jean-François Zygel (la suite ici):


Musica à l'UGC avec Jean-François Zigel: les Misérables - Photo: lfdd

Bon Musica

La Fleur du Dimanche

Rappel: le début de Musica est là:
MUSICA 2016 - Début de l'Odyssée à l'UGC et à la Bourse, au PMC et au Point d'Eau à Ostwald

dimanche 25 septembre 2016

Les fleurs d'été: Fleurs de glace en Islande - Feuilleton d'été, épisode 8 - Claudine B.

Suite de notre Feuilleton de l'été du voyage des fleurs.

Le huitième épisode nous vient de Claudine B., une amie, et une amie des fleurs.
Il y a quelques années, un soir vers dix heures, elle téléphone pour nous proposer de partir 15 jours en Mongolie.
Nous y avons passés 15 jours inoubliables, à pied et à cheval, à fouler des tapis d'edelweiss. Incroyable ! 
Nous dormions sous la tente, et étions invité à boire du lait de jument fermenté dans les yourtes par les Mongols, en plein désert.

Elle a eu envie de voyager en des terres plus septentrionales et m'a envoyé sa collection de fleurs, que je partage avec vous.

Pour commencer, ces images toutes fraîches (aux deux sens du terme) qui nous viennent de cet été en Islande:


Fleurs glacées d'Islande - Photo: Claudine B.

Elles n'ont pas encore fondu depuis le mois d'août et nous font chaud au coeur:


Fleurs glacées d'Islande - Photo: Claudine B.

Mais où sont ces fleurs, que Claudine a trouvées ? 
Ici ?

Fleurs ???  d'Islande - Photo: Claudine B.

Ah, non, apparemment pas....
Alors là ??



Fleurs et oiseaux d'Islande - Photo: Claudine B.

Non, ce sont des oiseaux !
Et là ?

Fleurs et champignon d'Islande - Photo: Claudine B.

Non, c'est un champignon, bon il y a de la bruyère, presque des fleurs, mais les fleurs ?
Là?

Fleurs d'Islande - Photo: Claudine B


Eh oui! Les voilà ! merci Claudine !

Mais n'allez pas croire que l'Islande est déserte, elle a dû voir passer cet été plus de touristes que d'habitants (c'est la saison à la mode). Il faut dire que le nombre d'habitants du pays (330.000) ne dépasse pas la population de Nice.
Mais sachez aussi que plus d'un habitant sur dix dans l’île a écrit et/ou est en train d'écrire un livre !!! 
Imaginez cela en France... 
Le pourcentage de Français qui n'a pas lu plus d'un livre l'année dernière doit dépasser les 40%. 
Maintenant que des chercheurs ont découvert* que lire - un livre -  trente minutes par jour augmente notre capital cognitif et l'espérance de vie de 23% en douze ans, il serait temps que les Français s'y mettent.
Alors en guise de TVA, je vous donne envie de lire un livre et vous livre le texte littéraire choisi par Claudine B.

Commencements du cercle


L'énergie d'une racine
       Que
La vie pousse à sa fin
De fleurs et de fruits
Par les deux pôles
De son trait

Extrait d'un livre de Claude Louis Combet pour le texte avec des dessins de Takesada Matsutani - Galerie Zéro, l'infini

Comme il s'agit d'Islande, je vous propose en guise d'univers sonore quelques balades musicales dans le pays.

Vous connaissez sûrement Sigur Ros.
Voici son "Olsen Olsen"



Un peu moins connu, Sykur, avec "Reykjavík"



A Reykjavík, la capitale, il y a aussi des filles qui ont fondé un groupe, les "Filles de Reykjavík" dont voici deux   

Les filles de Reykjavik - Reykjavíkurdætur - HÆPIÐ




Reykjavíkurdætur - FANBOIS




Et nous ne pouvons oublier la plus célèbre des filles de Reykjavik: Björk Guðmundsdóttir plus connue sous le nom de Björk. 
Je vous en présente sa dernière production, un clip à voir en 3D et 360° sur votre portable:


 


A dimanche prochain 

La Fleur du Dimanche

* Etude de l'Université de Yale - article du N.Y.Times du 3 août 2016

Un samedi ordinaire (extra) à Musica: des jeunes talents, de vieux routiers du GRM, la relève et le "sacré" concert à la cathédrale

Ce devait être une journée ordinaire du Festival Musica: pas moins de quatre concerts dans la journée. Pour une Odyssée c'est une Odyssée: Marathon d'une salle (celle du Bouclier) à un autre (La Bourse où la vie est dans les hauts-parleurs) pour finir dans un monument de l'art gothique dans lequel nous assistons à trois pages de musique (Duruflé, Sciarinno et Dusapin), interprétés par le Münchener Kammerorchester et le RIAS Kammerchor sous la direction musicale de Alexander Liebreich.


Jeunes Talents - Quatuor Adasta

Mais commençons par le début: Dans la Salle de l'église du Bouclier, habituée aux concerts de Musique contemporaine (voir les concerts d'été de l'Accroche-Note), le jeune Quatuor Adasta nous a présenté un programme d'une belle densité. Totalement en accord avec Anton Webern qui dans la première dédicace de ses "Six Bagatelles opus 9 disait "non multa, sed multum" - peu en quantité, mais beaucoup en intensité - le programme dense le fut aussi dans la concentré des pièces. 


Musica 2016 - Jeunes Talents - Quatuor Adasta - Photo: lfdd


Au coeur du concert, justement, se fondant sur ces Six bagatelles (1911-1913) comme référence, des rebonds vers deux pièces de Kurtag en lecture antichronologique.
D'abord donc la pièce de Webern, ces six mouvements de moins d'une minute chacun, mais quelle qualité, quelle force ! Webern le disait aussi: "Imaginez quelle sobriété il faut pour être bref." et il constate: "Et j'ai eu le sentiment qu'une fois les douze sons étaient apparus, , le morceau était fini. C'est beaucoup plus tard que j'ai compris que c'était un moment d'une évolution nécessaire." N'en disons pas plus!
Cette brièveté - et densité - Györky Kurtag l'a fait sienne ne rendant hommage à Webern dans son Quatuor à cordes opus 1 de 1959 en six mouvements puissants et expressifs et plus encore dans son Hommage à Andràs Mihàly opus 13 de 1977: douze microludes pleines de douceur, de finesse, de délicatesse de moins d'une minute.
Encadrant ces trois pièces, en ouverture d'une part, la pièce [Ro]ob[ta]ject[tion] de la singapourienne (passée par Bufffalo, Paris et Ivry) Diana Soh qui nous propose une musique intrigante, composée de micro-sons, envolées, frappées en forme de collage dada sur la "musique au sujet de la musique, au sujet de la musique". 
Et pour clore, Pascal Dusapin avec son Quatuor à cordes N° 3 (1993) qui nous montre tut son talent de compositeur qui va aussi à l'essentiel tout en variations et en envolées et en déséquilibre.


Groupe de Recherches Musicales - GRM - Oeuvres historiques

Musica continue son exploration de la musique acousmatique avec Daniel Terrugi, directeur de l'INA-GRM qui nous présente l'"Acousmonium", un disposition créé par François Bayle en 1974, avec une trentaine de hauts-parleurs, chacun par ses caractéristiques - timbre, puissance, spectre, localisation, forme (il y a même 4 arbres/douches au milieu du public) - participant à la mise en place des univers sonores créées par chaque compositeur.


Musica - Salle de la Bourse - GRM - Acousmonium - Daniel Terrugi - Photo: lfdd

Il faut noter que le mixage en direct est en quelque sorte comme une direction d'orchestre, les instruments étant ici des hauts-parleurs. Nous pouvons donc citer les quatre "mixeurs" qui jouaient en direct la partition sur la table de mixage: François Bonnet, Philippe Dao, Daniel Terrugi - qui "joue" aussi son oeuvre dans la seconde partie du programme, ainsi qu eRikm qui mixe la sienne. 
La première partie de l'après-midi, après un film sur les 50 ans du CRMM (que je vous présente ci-dessous) est consacrée aux oeuvres historiques. 




Tout d'abord trois fragments, sur les 14 qui composent l'oeuvre "L'Expérience Acoustique" de François Bayle (inventeur du dispositif d'écoute) montrent l'écriture de ces pièces, mélanges de sons réels capturés et:ou tritures, de sons de synthèse ou de voix et d'instruments de musique mixés - dans lequels on arrive à se faire des images (réelles ou imaginaires) et retrouver des voix connues - ici en l’occurrence, on peut noter un penchant certain pour 
Franck Zapp ou le groupe Soft Machine et ses musiciens Kevin Ayers ou  David Allen dont on entend bien le "We did it again" que je vous offre en prime:






Deux pièces de Pierre Schaeffer de 1958 , qui a fondé le Groupe de Recherche Musicales cette année-là, "Etude aux allures", variations (d'allure) à partir de sons de cloches chinoises et "Etude aux sons animés", un travail s'appuyant sur des sons de synthèse et d'autres réels "triturés" nous présentent l'aspect historique de cette création. "L'oeil écoute" de Bernard Parmegiani complète le tableau, le film pourrait-on dire parce qu'il nous emmène dans un voyage qui commence par le son de roues de train nous invitant à partir avec lui et à imaginer le paysage sonore qu'il nous propose par ses différents climats. Il nous guide et nous perd à la fois, pour finir dans une danse endiablée et tournoyante. Parce que comme le dit: "Peut-être qu'à trop regarder, l'homme finit par ne plus écouter. Et l'oeil, devenu le "promeneur solitaire" n'a d'oreille que pour ce qui l'agresse".
La pièce "J'ai été coupé" de Luc Ferrari (à qui Pierre Henry a rendu hommage la veille) montre encore l'école de création sonore d'avant les synthétiseurs et l'inventivité déployée (avec une grosse dose de bricolage) pour composer ces oeuvres.
Gilles Racot qui clôturait la première partie du programme avec "Anamorphées" est lui le témoin de l'arrivée des ordinateurs qui calculaient les effets sonores et nous propose des boucles de sons qui ondulent et se superposent dans l'espace de la salle pour vriller, se répéter et s'enrouler pour remplir tout l'espace.

Musica - GRM - eRilm - Photo: lfdd

Groupe de Recherches Musicales - GRM - Oeuvres d'aujourd'hui

La séquence "aujourd'hui" du GRM présente des oeuvres de 2016 à 2015.
Vincent-Raphaël Carinola dans sa pièce "Cielo Vivo", inspirée des vers de Federico Garcia Lorca:
"là-bas toutes les formes gardent entrelacées
une unique expression frénétique d'avance"
Les sons, percussifs et pulsés, ainsi que les voix, retravaillées et variant en timbre et en déphasage, et répétées nous installent dans un univers mouvant.

eRikm, avec la pièce "Draumaligur, membre fantôme" nous emmène en voyage dans les espaces et les cultures d'Islande, à travers les paroles d'un conte "Ma mère dans le parc, parc" (Móðir mín í kví, kví), l'histoire d'une servante pauvre qui perd son enfant et sa raison parce qu'elle n'avait pas de robe pour la fête et de poèmes, ainsi que de sons de percussions et d'éléments naturels. Par un drôle de hasard, La Fleur du Dimanche 25 septembre est consacrée à l'Islande, encore un effet magique ? - en tout cas si vous voulez écuter un autre versant de la musique islandaise, faites un tour sur la page du dimanche)

Guiseppe Ieladi avec "untitled, January 2014" nous présente toute la poésie du son "pauvre" (comme l'Arte Povera) comme source de composition: Les bruits crées par un magnétophone à bande Uher ausculté au plus près.

Pour finir, Daniel Terrugi, avec "Springtime" (2013) nous propose un voyage circulaire, enfermé dans sa tête "in my dreams", la voix essaie dans différents registres (babil, rires, chantée, rapide ou tombante) de s'exprimer, encerclée de sons réalistes et synthétiques.


Musica - GRM - Daniel Terrugi - Photo: lfdd 


Münchener Kammerorchester et  RIAS Kammerchor

Le summum de la journée fut le concert à la cathédrale avec le Münchener Kammerorchester et le RIAS Kammerchor sous la direction musicale de Alexander Liebreich.
D'abord, et venant du bord nord de la cathédrale, le "Responsorio delle Tenebre (2001) de Salvatore Sciarinno, confrontation entre chant grégorien et chant moderne qui nous "décalent" dans cette magnifique cathédrale.
La pièce de Pascal Dusapin, créée il y a un an à Munich par l'orchestre et le choeur qui l'a magnifiquement réinterprétée cette composition basée sur un texte d'Alcuin, théologien anglais du VIIIème siècle qui y présente sous la forme d'un dialogue maître-élève, plein d'énigmes pour amener les auditeurs à creuser la réflexion.
La soirée se termine par le Requiem de Maurice Duruflé, un Réquiem tendre et humain, basé sur les thèmes grégoriens de la Messe des morts. Un moment très émouvant 


Musica -  Pascal Dusapin  - Münchener Kammerorchester - RIA Kammerchor - Photo: lfdd


La suite bientôt...

Bon Musica

La Fleur du Dimanche

samedi 24 septembre 2016

Pierre Henry au Point d'Eau: promenade entre campagne et château hanté

Musica consacre cette année une large programmation* à la musique électronique et en particulier à Pierre Henry**, un des fondateurs et maître de cette direction sonore.

Le concert du vendredi 23 septembre était entièrement consacré au maître, avec deux pièces de 52 minutes, une création mondiale dédiée au Festival Musica "Chroniques Terriennes" et une reprise "Dracula".

La première pièce, dont Pierre Henry ne voulait rien révéler est une surprise qui nous emmène en territoire bucolique, entre réveil de cigales, chant de tourterelles et promenades à la campagne, tout à fait adapté au "Point d'Eau, dont nous devinons, derrière les murs de la nouvelle et belle salle, un environnement semblable, même si l'élément aquatique remplacerait les cigales.
Le concert, mettant le focus sur le son (plus d'une soixantaine de hauts-parleurs divers animés d'un éclairage minimaliste - font une enceinte autour du public). Ce son des plus purs, résultat de la chasse récente (ces deux dernières années) de Pierre Henry qui s'est remis à enregistrer pour cette pièce nous font touchez du doigt (de l'oreille) une réalité quelquefois masquée et que l'on visualise totalement dans la semi-obscurité. Et l'histoire se continue entre fracas métalliques, bruits de ville (quand même ! - On croit y déceler une ambulance parisienne) et bruits de chute en écho et répétition avant l'arrivée d'un orage au lointain et la pluie qui naît (petite madeleine de Proust d'un enfance campagnarde), avant une fin apaisante.


Pierre Henry

Avec "Dracula", nous assistons à une autre facette du talent de "colleur" de son du maître, qui nous monte en boucles et séries des bouts de phrases d'orchestre qui pourraient être du Wagner et nous fait tout un film de mystère, avec des pas sur le carrelage du château, des vols de chauves- souris et des portes et gonds qui soupirent et crient ainsi que des éclairs métalliques, ainsi que des voix venues de nulle part et d'ailleurs et plus ou moins grinçantes

Il faut saluer le travail à la console de Thierry Balasse, en l'absence - excusée pour raison de santé - de Pierre Henry.

Nous pourrons encore apprécier ce "duo" le 28 septembre à la Cité de  la Musique et de la Danse de Strasbourg, avec la recréation sur scène par Thierry Balasse et un ensemble de musicien rock et électroniques en "spectacle" de la "Messe pour le temps présent" de Pierre Henry et Michel Colombier. Une création spécialement crée pour ce projet par Pierre Henry "Fanfare et arc-en-ciel" démarrera la soirée, suivie d'une pièce de Thierry Balasse "Fusion A.A.N."    


Bon Musica

La Fleur du Dimanche

P.S. Ce samedi de nombreux concerts à voir, dont le grand concert à la Cathédrale de Strasbourg avec le Münchener Kammerorchester et le 
RIAS Kammerchor: voir ici


* Quelques concerts "acousmatiques":

Groupe de Recherches Musicales – GRM (1) - oeuvres historiques
concert acousmatique
Samedi 24 septembre - 15h00 - Salle de la Bourse

Groupe de Recherches Musicales – GRM (1) - oeuvres d'aujourd'hui
concert acousmatique
Samedi 24 septembre - 18h00 - Salle de la Bourse

eRikm –  ElectroA - concert electroacoustique
Vendredi 30 septembre - 22h30 - Salle de la Bourse

Jeunes talents, percussion et électroacoustique
atelier-concert
Samedi 1er octobre - 15h00 - Auditorium France 3 Alsace


Carte blanche Exhibitronic
concert acousmatique
Lundi 3 octobre - 20h30 - Salle de la Bourse

Drum-Machine - eRikm et les Percussions de Strasbourg
Percussion et électronique
Jeudi 7 octobre - à partir de 19h45 et concert à 20h30 - Cité de  la Musique et de la Danse

**Pour mémoire, le concert de Pierre Henry lors du Festival Musica en 2013 - et un reportage de la télévision en 1970 à voir sur mon billet du 26 septembre 2013