dimanche 30 avril 2017

A gauche Nini, à droite Sisi, et le blanc de la fleur n'est pas nul

En ces temps d'élections (et avant le 1er mai et le muguet), la Fleur du Dimanche vous offre une fleur blanche et un peu d'histoire de la politique en TVA, mais aussi de la poésie et des chansons en "Ni, ni" ou en "Si, si" et bien sûr des fleurs, blanches aujourd'hui - qui ne doivent pas être considérées comme une consigne de vote pour demain:


Fleurs blanches - Photo : lfdd

En guise de TVA, une petite histoire des courants politiques en France, où l'on se demande où nous sommes - où sont-ils ?
A vous d'essayer de trouver la réponse... 

Pour commencer, Alain qui disait dans les années 1930:
"Lorsqu'on me demande si la coupure entre partis de droite et partis de gauche, hommes de droite, hommes de gauche, a encore un sens, la première idée qui me vient est que l'homme qui me pose cette question n'est certainement pas un homme de gauche."

En 1955 Dionys Mascolo commentait ainsi dans un texte intitulé "Sur le sens et l'usage du mot "gauche"" cette phrase d'Alain:
"A la réflexion, l'auteur de ce mot qui exprime si bien la sensibilité de gauche n'était-il pas plutôt de droite? Il parait établi qu'il fut toujours réactionnaire."

André Burguière, dans son livre qui vient de paraître et qui curieusement s'intitule: "La gauche va-t-elle disparaître?" nous dit:
"Ma réflexion est celle d'un homme qui considère la gauche comme sa patrie. En m'appliquant à discerner ce qui donne du sens à la gauche, je cherche à comprendre aussi en parti ce qui donne du sens à ma vie."

Il éclaire d'un commentaire d'actualité l'évolution de la gauche:
"On entre dans la marmite souverainiste avec le romantisme populiste d'un Mélenchon, on en sort ficelé dans l'uniforme du Front National."


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Cela peut être ironique, comme la conclusion de Jean Birnbaum dans l'article "La gauche année zéro" qu'il consacre dans le Monde Littéraire au livre d'André Burguière: 
"Tant mieux, répondront ceux qui ont retenu la leçon de Mascolo: s'il est de la nature de la gauche d'être divisée, alors elle n'est jamais aussi forte que lorsqu'elle est divisée."


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Et pour tenir compte du temps de parole de chaque camp, je citerai Maurice Blanchot qui en 1931 à l'époque où il était de droite, écrivait dans la presse d'extrême droite, en parlant d'Hitler:
"Il cherche seulement à susciter par des moyens électoraux, les conditions politiques qui empêcheront la violence d'être stérile."
Et en 1933: 
"Hitler, en organisant pour le premier mai l'apothéose du travail, cherche à convaincre les Allemands qu'il n'abandonnera pas son programme. Après les violences antisémites, l'ivresse du prolétariat triomphant. Après l'appel à l'orgueil de la race; l'appel à une mystique des forces fécondes et du travail. Le peuple allemand est convié à prendre conscience de tout ce qui peut renforcer sa puissance et assurer son destin."

Quelquefois il est intéressant de mettre en perspective et d'avoir un peu de mémoire... surtout en cette "Journée du souvenir des victimes de la déportation", même s'il ne faut pas ne s'en souvenir qu'un seul jour!


Fleurs blanches - Photo : lfdd


Un peu de mémoire également pour les chansons du jour, pour le ni, ni, deux Nini, celle d'Aristide Bruant, celle de la Bastille:



Nini Peau d'chien 

Quand elle était p'tite 
Le soir elle allait 
À Sainte-Marguerite 
Où qu'a s'dessalait 
Maint'nant qu'elle est grande 
Elle marche, le soir, 
Avec ceux d'la bande 
Du Richard-Lenoir 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Elle a la peau douce 
Aux taches de son 
À l'odeur de rousse 
Qui donne un frisson

Et de sa prunelle 
Aux tons vert-de-gris 
L'amour étincelle 
Dans ses yeux d'souris. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Quand le soleil brille 
Dans ses cheveux roux 
L'génie d'la Bastille 
Lui fait les yeux doux 
Et quand a s'promène 
Du bout d'l'Arsenal 
Tout l'quartier s'amène 
Au coin du Canal. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille. 

Mais celui qu'elle aime 
Qu'elle a dans la peau 
C'est Bibi-la-Crème 
Parc' qu'il est costaud 
Parc' que c'est un homme 
Qui n'a pas l'foie blanc 
Aussi faut voir comme 
Nini l'a dans l'sang. 

À la Bastille on aime bien 
Nini Peau d'chien 
Elle est si bonne et si gentille! 
On aime bien 
Nini Peau d'chien 
À la Bastille.


Comme la mémoire est longue, une version plus récente de Patachou:



La deuxième Nini est de Jacques Higelin, une version avec Arthur pour sa première apparition à la télévision, je vous mets le lien à ouvrir ici:
http://www.dailymotion.com/video/x1qwnyk_jacques-higelin-nini_music


Pour "Si Si, je vous en offre également deux versions, la première, une valse de Juliette Gréco, écrite par Henri Sauguet, pour la musique, bien sûr, les paroles, je ne sais plus, "Si"




Et pour la deuxième version, un peu d'optimisme, et plus de ciel , si : Michel Jonasz : Si, si, si, le ciel:  



Si si si le ciel

L'oiseau 

L'écrit avec deux ailes, 
Les musiciens avec des si, 
Si... si le ciel 
N'était pas si loin d'ici, 
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi

Et même en haut de la tour Eiffel,

On se sent loin des galaxies.

Si... si le ciel

N'était pas si loin d'ici,
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi.

J'ai quitté l'artificiel

Et je t'ai trouvée, Poussy.
Si... si le ciel
N'était pas si loin d'ici,
Si... si... si le ciel
Était dans nos coeurs aussi.
Si... si... si le ciel,
Si... si... si le ciel...


Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

samedi 29 avril 2017

Médée-Matériau au TNS: ceci n'est pas du cinéma, c'est une vraie expérience théâtrale

Face à Médée-Matériau, nous nous trouvons confrontés à des questions de traduction, d'interprétation.
Il y a bien sûr le mythe, à l'origine, et ses différentes versions, déjà à l'antiquité, puis les lectures successives par les écrivains, chorégraphes, peintres, cinéastes, musiciens. Et puis il y a cette version, Medeamaterial, un texte de Heiner Müller de 1985 qui, lui aussi a été interprété de nombreuses façons - voir l'Opéra créé par Pascal Dusapin en 1992. Et cette mise en scène d'Anatoli Vassiliev dont la première création - et interprétation par Valérie Dréville - date de 2002 lors de l'Olympiade théâtrale de Moscou et qui a tourné pendant cinq ans (jusqu'à Delphes en 2006). 
Et cette nouvelle version, créé au TNS à Strasbourg le 29 avril 2017, avec la même Valérie Dréville. 
Et il y a le texte, matériau de la pièce, matériau de travail qui est dans ses trois versions: allemande (celui de Heiner Müller), russe (traduction pour Anatoli Vassiliev) et française (traduction de Heiner Müller).
Ce texte, matériau de base de la pièce, le spectateur le reçoit comme un guide-programme qu'il va pouvoir lire au début du spectacle sur un écran de cinéma situé sur scène.
Car le texte, même s'il est court, c'est de cela que nous partons, c'est ce qui et écrit et qui raconte l'histoire. Et quelle histoire ! 


Médée-Materiau - TNS -  Valérie Dréville - Photo: Jean-LouisFernandez

La voici résumée par Valérie Dréville: "Médée a suivi Jason et trahi son peuple pour le sauver. Elle a tué son frère. Cet amour a tenu lieu de patrie jusqu'à la trahison de Jason. Elle est maintenant chassée par lui et par le roi, envoyée en exil. C'est un destin lourd. Comment le surmonter, s'en libérer?
Ce sera tout le travail de la pièce, cette traversée intérieure et symbolique pour faire ce chemin et qui va passer par une sorte de cérémonie chamanique ou rituelle d'exorcisme "d'action émancipatrice" sur elle-même" qu'elle va effectuer. Et que nous allons faire avec elle, comme un voyage. Mais ce n'est pas une croisière. 
Ce voyage auquel elle nous convie, va nous emmener au-delà des mers, seuls, accompagnés quelquefois de quelques mouettes ou de dauphins comme guides, compagnons de voyage, vers le lieu où le soleil se couche et où elle nous enjoindra de la laisser seule, reconstruite et forte. 
Elle y arrive après avoir rituellement "brûlé" la fiancée de Jason, Creüse, son double et offerts, "sacrifiés" ses enfants à leur père, le soleil pour l'immortalité.
Cependant nous n'assistons à un film de voyage en double projection panoramique, parce qu'il y a l'histoire et il y a le texte de Heiner Müller (dont Valérie Dréville dit qu'il est "rempli d'images, de métaphores, d'oppositions. C'est un moteur puissant pour l'acteur"), et effectivement il y a ... l'acteur. 
Donc l'actrice et son travail avec le metteur en scène Anatoli Vassiliev, qui est plus qu'un metteur en scène. C'est un penseur du théâtre qui, dans la suite de l'école de Stanislavski a créé son laboratoire de théâtre expérimenttal - le théâtre École d’art dramatique de Moscou - et dont le travail est basé à la fois sur le geste et sur le matériau son.
Dans Médée-Matériau, le son devient matériau, énergie et traverse le corps et l'espace, la scène, la salle, les spectateurs... 
Sur scène, la comédienne va restituer à la parole ses capacités de révélation. Comme le dit encore Valérie Dréville "S'il faut transmettre quelque chose qui n'est pas matériel, c'est un objet matériel (le son) qui va devenir le conducteur de quelque chose qui n'est pas matériel. .... Il n'est alors plus perçu acoustiquement mais énergétiquement.". 
D'autre part il y a les gestes, les actions du corps, des gestes quelquefois très simples -  mettre de la crème, des compresses sur le visage, le corps,... - qui eux aussi sont profondément inscrits dans la mémoire du corps et que l'acteur va réactiver à chaque représentation pour nous les restituer dans leur dimension cérémoniale, rituelle et guerrière, archaïque. Avec pour objectif, comme le disait Anatoli Vassiliev: "Le but était situé dans l'abstrait: je n'observais plus l'homme pensant les vérités, mais les vérités elles-mêmes... Les acteurs ne se trouvaient plus en lutte mais en jeu.


Médée-Materiau - TNS -  Anatoli Vassiliev - Photo: Jean-LouisFernandez

Un vrai théâtre expérientiel. Qu'il faut avoir vécu... A vous de l'expérimenter.

Bon Spectacle

La Fleur du Dimanche

Médée-Matériau  (MedeaMaterial)

Au TNS à Strasbourg 
du 29 avril au 14 mai 2017

Texte Heiner Müller
Mise en scène Anatoli Vassiliev
Avec Valérie Dréville

Traduction Jean Jourdheuil et Heinz Schwarzinger
Scénographie et lumière Anatoli Vassiliev et Vladimir Kovaltchouk
Vidéo Alexandre Chapochnikov
Costumes, maquillage et accessoires Vadim Andreïev
Composition sonore Andreï Zatchessov
Travail corporel Ilya Kozin
Production Théâtre National de Strasbourg
Nouvelle création le 29 avril 2017 au Théâtre National de Strasbourg
Le décor et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS
Le texte est publié aux Éditions de Minuit

vendredi 28 avril 2017

Seuls et (ses) Soeurs: De la geste familiale d'aujourd'hui au grand show contemporain

Wajdi Mouawad est un créateur et un personnage multiple et plein de ressources. Comme le dit Wikipédia: "homme de théâtre, metteur en scène, auteur, comédien, directeur artistique, plasticien et cinéaste libano-canadien". Cette dernière précision, même s'il est maintenant en France - où il a également passé une partie de sa jeunesse et où il dirige aujourd'hui le Théâtre National de la Colline à Paris (autre "métier" non encore répertorié par l'encyclopédie du net) marque très fortement son oeuvre. Son théâtre, entre autres son cycle "Le sang des Promesses" dont on a vu l'année dernière au TNS "Incendies" est marqué par son destin personnel et l'exil. 
Actuellement au Théâtre du Maillon à Strasbourg, nous pouvons assister à deux pièces, début d'un autre cycle "Domestique" qui va raconter son histoire familiale sous forme de portraits de famille.


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Seuls

Premier opus de la série de cinq à venir (voir Soeurs plus bas), Seuls est un portrait intime, domestique en même temps qu'onirique de la trajectoire d'un exilé qui a perdu ses racines (son jardin dans la montagne au Liban, seul souvenir qu'il a gardé du pays) et balance entre sa famille et son activité professionnelle (une thèse sur un metteur en scène de théâtre - Robert Lepage - qui devrait l'amener à devenir professeur d'université). 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron


Démarrant par des scènes prosaïques d'une grande sobriété (échanges téléphoniques du quotidien avec père, soeur et professeur), la pièce va creuser l'intime et les relations familiales (les habitudes, les situations bloquées, le besoin de reconnaissance et de considération) et interroger également le parcours professionnel (les métiers rêvés ou choisis) et la création artistique sur des terrains qui se répondent mutuellement: le rapport au père et l'amour (le vrai père encore vivant, mais jusqu'à quand?), les pères (pairs) vivants ou morts qui déterminent la carrière à venir et le père symbolique (celui du tableau de Rembrandt "Le retour du fils prodigue" - et de la bible -Luc 15-21). La pièce, qui oscille entre fiction et autobiographie (avec la constatation de l'auteur qui l'écrit que, dans la réalité, pour la vie "Le brouillon, c'est le propre") finit, après une scène digne des meilleures séances de "stand up", dans un silence créatif et explosif. 


Seuls - Madji Mouawad - Le Maillon - © Thibaut Baron

A vous d'aller le voir...




Soeurs

Alors que "Seuls" (au pluriel) parle de la pluralité des facettes du personnage principal (le narrateur, l'auteur, le comédien, le fils !), "Soeurs" construit un dialogue entre deux personnages qui pourraient être les deux soeurs de l'auteur, celle de la vie, l'exilée (Nayla Mouawad), et celle du théâtre, celle qui est dans la puissance du langage et du jeu (Annick Bergeron, l'interprète). 


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Cette puissance montrée à travers ses différentes facettes (chanson, négociation, imagination, quotidien, modernité et dématérialisation) traverse des moments d'émotion, de relation, d'interrogation dans une mise en scène imaginative et contemporaine (comme d'ailleurs "Seuls"). La pièce nous parle du monde dans lequel nous vivons, que ce soit des problèmes de politique internationale ou de la déshumanisation des rapports du quotidien. Il touche aussi les questions d'identité, d'exil - même dans son propre pays - et des relations humaines et familiales (l'amour - ou son absence, la reconnaissance, les mots si simples à dire comme merci et que l'on oublie de transmettre,..).


Soeurs - Madji Mouawad - Le Maillon -© Pascal Gély


Annick Bergeron nous rend tout cela très proche et émouvant. Et la mise en scène et la scénographie nous réservent quelques surprises qui arrivent à nous transporter dans des situations (la guerre) que nous ne pensions pas trouver dans ce spectacle. 
Alors, à la question "Qui pourrait croire que l'hiver finirait un jour?" la pièce répond par le bleu du ciel qui suffit à nous faire notre habit de marin. Et nous embarquons volontiers pour la croisière...


Wajdi Mouawad est un conteur hors pair qui arrive à nous transporter dans le domaine du coeur et de la sensibilité avec ses histoires touchantes et émouvantes, avec de moyens très simples quelquefois mais aussi avec tous les médias et les techniques et technologies d'aujourd'hui: Le trouvère du XXIème siècle.

Bons Spectacles

La Fleur du Dimanche


Seuls

Au Maillon à Strasbourg
du 27 au 29 avril

Texte, mise en scène et jeu : Wajdi Mouawad
Dramaturgie, écriture de thèse : Charlotte Farcet
Conseiller artistique : François Ismert
Assistance à la mise en scène : Irène Afker
Scénographie : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Costumes : Isabelle Larivière
Réalisation sonore : Michel Maurer
Musique originale : Michael Jon Fink
Réalisation vidéo : Dominique Daviet
Construction du décor : François Corbal, Éric Terrien, Yann Malik, Sébastien Grangereau et Benjamin Leroy Sorrin des ateliers du Grand T à Nantes
Générique additif, voix : Nayla Mouawad, Michel Maurer, Isabelle Larivière, Robert Lepage, Abdo Mouawad, Éric Champoux
Musiques additionnelles : Al Gondol de Mohamed Abd-Em-Wahab, Habaytak de Fayrouz, Una furtiva lacrima de Donizetti par Caruso
Texte additionnel : Le Retour du fils prodigue, Luc 15-21, tiré de la traduction de la Bible de Jérusalem
Production : La Colline, Théâtre national / Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie / Grand T théâtre De Loire -Atlantique / Théâtre 71, Scène nationale de Malakoff / Comédie de Clermont-Ferrand, Scène nationale / Théâtre National de Toulouse Midi-Pyrénées / Théâtre d’Aujourd’hui, Montréal / Le Manège, Mons
Remerciements particuliers : Patrick Le Mauff, Robert Lepage, Nayla Mouawad, Abdo Mouawad, Marie-Eve Perron, Alain Roy Remerciements : Lynda Beaulieu, Marie Gignac et le Carrefour International de Théâtre de Québec, Pr. Jean-Pierre Farcet, Dr. Hassan Hosseini neurologue, Georges Banu, Jean-François Dusigne, Marcel Martin, Rose Dibilio ; aux équipes du Théâtre national de Toulouse, du Grand T à Nantes et de l’Espace Malraux, Scène nationale de Chambéry et de la Savoie pour le travail accompli au cours des répétitions

Seuls, chemin, texte et peinture est publié aux : éditions Leméac/ Actes Sud-Papiers

Soeurs

Au Maillon à Strasbourg
du 25 au 29 avril

exte et mise en scène : Wajdi Mouawad
Inspiré par : Annick Bergeron, Nayla Mouawad
Interprétation : Annick Bergeron
Dramaturgie : Charlotte Farcet
Assistance à la mise en scène : Alain Roy
Scénographie et dessins : Emmanuel Clolus
Lumière : Éric Champoux
Assisté de : Éric Le Brec’h
Costumes : Emmanuelle Thomas
Conception et réalisation vidéo : Wajdi Mouawad, Dominique Daviet
Direction musicale : Christelle Franca
Composition : David Drury
Réalisation sonore : Michel Maurer
Maquillages : Angelo Barsetti
Avec le concours de : équipe technique du Grand T
Décor construit aux : Ateliers du Grand T
Avec les voix de : Annick Bergeron, Christelle Franca, Aimée Mouawad, Wajdi Mouawad
Musiques additionnelles : Je ne suis qu’une chanson de Ginette Reno, Saat Saat de Sabah, Étude Op. 76 nr2 de Jean Sibélius
Production : La Colline, Théâtre national
Coproduction : Au Carré de l’Hypoténuse-France & Abé Carré Cé Carré-Québec - compagnies de création / Grand T, théâtre de Loire-Atlantique / Théâtre national de Chaillot, Paris / Théâtre de l’Archipel, Scène nationale de Perpignan / Quartz, Scène nationale de Brest
Résidences de création : Athanor, Ville de Guérande / Grand T, Nantes
Remerciements : Deirdre Bergeron, Léandre Bergeron, Mylène Chabrol, Eveline Desharnais, François Douan, Sylvie Fradet, Abdo Mouawad, Louise Otis, Marie-Eve Perron, Jean- Claude Retailleau, Baptiste Vrignaud

Soeurs est publié aux : Éditions Leméac Actes Sud-Papiers

jeudi 27 avril 2017

Le froid augmente la clarté au TNS: un rêve blanc dans une cave de souvenirs glacés

Claude Duparfait nous annonce la couleur dès le départ: ce sera un rêve blanc...


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernhard - Claude Duparfait - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Et ce blanc va remettre en lumière deux épisodes de la vie de Thomas Bernhard, particulièrement fondateurs: son passage dans un institut national-socialiste à l'âge de treize ans puis dans une cave - magasin d'alimentation dans un faubourg de Salzbourg, "porte de l'enfer". Et curieusement nous passons avec lui d'un univers sombre et étriqué où trône le portrait d'Hitler (une mention à la discrète scénographie et au lumières de Gala Ognibene et de Benjamin Nesme) qui va se retrouver remplacé par un noir crucifix à la blanche et crue clarté de la vérité de la cave. 


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernhard - Florent Pochet - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez

Dans la pièce "Le froid augmente la clarté" qui se base sur deux des romans autobiographiques de Thomas Bernhard - "L'Origine" et "La Cave", Claude Duparfait nous confronte et nous inclut à la vie et aux souvenirs marquants de la jeunesse de l'auteur, interprété ici par quatre figures complémentaires, deux hommes (Claude Duparfait et Florent Pochet) et deux femmes (Pauline Lorillard et Annie Mercier), et la présence rassurante, tendre, miroir et guide du grand-père à qui Thierry Bosc donne toute son étoffe et son ampleur. 


Le froid augmente avec la clarté - Thierry Bosc - Photo: Jean-Louis Fernandez


La narration en devient polyphonique et les paroles et les souvenirs rebondissent de l'un(e) à l'autre. On y touve l'amour de la musique comme des grands auteurs (les citations de Montaigne par le grand-père) et la découverte des horreurs de la guerre et des bombardements, comme la solitude de l'enfance dans la "petite pièce à chaussure" pour arriver au courage d'aller "dans le sens opposé" et de se construire soi-même.


Le froid augmente avec la clarté - Thomas Bernhard - Claude Duparfait - Annie Mercier - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Comme le dit Claude Duparfait: "La parole de Bernhard c'est un flux incroyable, une écriture du souffle. Une forêt de mots, de pensées. C'est aussi une langue extrêmement musicale, et ... Tout comme Bernhard, j'aime la musique comme un fou." ... Et encore "La parole de Bernhard cogne, elle réveille". Et c'est cela qui a poussé Claude Duparfait à mettre en scène cette pièce, après "Des arbres à abattre". La pièce permet "d'aller à la rencontre de mes questionnements sur le monde d'aujourd'hui, qui entre en friction ce qu'a vécu, ressenti, puis écrit Thomas Bernhard." Et cela fait du bien, cette friction entre hier et aujourd'hui, parce qu'il faut aussi se souvenir et lire le monde d'aujourd'hui, qui, comme le dit Thomas Bernhard dans "L'Origine": "La ville est peuplée de deux catégories de gens: les faiseurs d'affaires et leurs victimes."
Reste l'interrogation: que signifie "Aller dans le sens opposé" aujourd'hui ?


Le froid augmente avec la clarté - Claude Duparfait -Pauline Lorillard - TNS - Photo: Jean-Louis Fernandez


Et pour ne pas être toujours en opposition, comme le dit encore Claude Duparfait: "Qu'est-ce qui nous rapproche aujourd'hui? Ce que nous avons en commun, c'est peut-être l'inquiétude. Qu'est-ce qui peut en naître? Et quel est le rôle de l'écriture, de l'art en génral face à cette inquiétude? Quand je pense au spectacle, parfois c'est l'image d'une étreinte qui me vient, dans tout ce qu'elle peut avoir de consolateur ou d'incongru."

Pour nous consoler, allons au théâtre...

Bon spectacle

La Fleur du Dimanche 


Le froid augmente la clarté

Au TNS à Strasbourg 
du 26 avril au 11 mai
Au Théâtre National de la Colline à Paris
du 19 mai au 18 juin

D'après Thomas Bernhard
Librement inspiré de L'Origine et La Cave
Projet de Claude Duparfait
Avec Thierry Bosc, Claude Duparfait, Pauline Lorillard, Annie Mercier, Florent Pochet

Scénographie Gala Ognibene
Lumière Benjamin Nesme
Son et image François Weber
Costumes Mariane Delayre
Assistanat à la mise en scène Kenza Jernite

Coproduction Théâtre National de Strasbourg, La Colline - théâtre national
Avec le soutien du FIJAD, Fonds d'Insertion pour Jeunes Artistes Dramatiques, DRAC et Région Provence-Alpes-Côte d’Azur

Création le 26 avril 2017 au Théâtre National de Strasbourg

Les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS

Les récits L'Origine et La Cave sont publiés aux éditions Gallimard

dimanche 23 avril 2017

Valse hésitation et montalbanaise: Oyez la mélodie et un peu de jasmin comme parfum - Au boulot !

Les indécis, les gens qui doutent, les gens qui ne savent pas, les gens qui décident à contrecoeur, les gens qui choisissent "contre", les gens qui ne choisissent pas. Et ceux qui savent, qui ont choisi... Et ceux qui vont à la pêche aux voix...
Et vous, vous êtes où ?

Moi, je suis dans le jasmin blanc et vous en offre une brassée pour cette belle journée:




Comme c'est un dimanche d'élection - vous ne l'aviez peut-être pas remarqué - je vous offre, non pas des conseils pour voter, mais quelques citations qui n'engagent que leurs auteurs - pluralité des opinions de rigueur.

La première citation est de Simone Weil (1909-1943) et parle des partis politiques:
"Comme si le parti était un animal à engrais, et que l'univers eut été créé pour le faire engraisser."



La deuxième, est d'André Suares (1868-1948). Elle date de novembre 1939 - dans sa Chronique de Caërdal:
"Les peuples vont à la dictature comme au moindre mal. Ils le croient du moins, en quoi ils se trompent: la dictature n'est pas le moindre mal, mais le moindre effort (...) Les peuples sont moins responsables de la dictature que la fausse élite qui la rend nécessaire et les y précipite."

La troisième est d'Octave Mirbeau (1848-1917) dans son livre "La Grève des électeurs" - vous l'avez peut-être déjà lue quelque part:
"Les moutons vont à l'abattoir. Ils ne disent rien, eux, et n'espèrent rien. Mais du moins ils ne votent pas pour le boucher qui les tuera, et le bourgeois qui les mangera. Plus bêtes que les bêtes, plus moutonniers que les moutons, l'électeur nomme son boucher et choisit son bourgeois."

Une quatrième, de H.G. Wells (1866-1946), l'auteur des livres de science-fiction "La machine à remonter le temps" et "La guerre des mondes", dans son livre "Les droits de l'homme ou Pourquoi luttons-nous ?" en 1940 :
"Nous devons nous débarrasser et remplacer tous ces gouvernements par un système mondial.

Lui aussi, comme beaucoup aujourd'hui, voulait "dégager" les politiques en place... il y a du boulot !




En guise de conclusion, je laisse à votre réflexion cette phrase du poète Eric Meunié:

"L'habitude fait le paysage"





Et si vous hésitez, dansez sur une valse de Gus (Gustave-Joseph) Viseur, créée avec Django Reinhard. La voici - Flambée Montalbanaise:




Et la version avec paroles - accrochez-vous - c'est André Minvielle qui les chante - Flambée Montalbanaise - André Minvielle





Oyez la mélodie
Le fond du soir
Un café
Écoutez, c'est le blues
Du coin le Gus y joue
Du biniou
Comme fait Bach
Pour une chanson,
Pucelle aux ailes déployées,
Rame, langue albatros,
Pique et trame au papier
Le cap et la falaise, balèze !
J'écoutais Montalbanaise
Une envolée de braises,
Noyé, je m'eau de vie-gueur
Viseur au coeur, liqueur soeur,
A cloche-pieds, cigarette,
Une bouffée volée yé
Au vent de la postérité.

Allez vas-y va,

Chaloupe ta mélopée
Ma chanson de café,
Charlie passe Parker,
Et l'Gus au biniou
Souffle aussi
Comme Black au sax.
Si le be-bop à valser
Devait sceller vos nuits,
Blues et Polka piquée
Temps,
Tu nous réconcilies
M'entends-tu d'accordéon ?
Monteille c'était tout petit
Le paradis d'été
Sambapathie, dada plouc
On ramait bal d'amour flou
Mais un souffle est dévoilé
Une poussée bleue, d'envie,
M'accroche au coeur
Thank you Viseur.

Et ceux, les "griffe le temps"

Ont mis les doigts de cordes,
Apaches et Django Mississippi
Didi guitare aussi m'a dit
Et Paris loue, Paris prie,
Le tango bord de Marne
Chavire la valsouze
Intemporelle et blues

Goutte à goutte ces divines

My lady valsées,
Filles et femmes tam-tam
Au fil du temps
Funambules et modernité,
Comme on jette à l'eau du calme
Un caillou ricochet,
Par ondes d'ondes là
Passe-passe l'écho
Des papis d'au-delà du top.
Réveillez la mélodie, la chanson des cafés,
Vocalise la bob French,
Scat et valsez one more,
D'oc,
Comme un souffle dévoilé,
Une poussée bleue d'envie,
Accroche au coeur
Thank you Viseur.

Pour vous remettre, une version de Richard Galliano 





Et pour les empêchés et les indécis une chanson d'Anne Sylvestre 6 "J'aime les gens qui doutent": 




J'aime les gens qui doutent

J'aime les gens qui doutent 
Les gens qui trop écoutent 
Leur coeur se balancer 
J'aime les gens qui disent 
Et qui se contredisent 
Et sans se dénoncer 

J'aime les gens qui tremblent 

Que parfois ils nous semblent 
Capables de juger 
J'aime les gens qui passent 
Moitié dans leurs godasses 
Et moitié à côté 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 
J'aime ceux qui paniquent 
Ceux qui sont pas logiques 
Enfin, pas "comme il faut" 

Ceux qui, avec leurs chaînes 

Pour pas que ça nous gêne 
Font un bruit de grelot 

Ceux qui n'auront pas honte 
De n'être au bout du compte 
Que des ratés du coeur 
Pour n'avoir pas su dire : 
"Délivrez-nous du pire 
Et gardez le meilleur" 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 

J'aime les gens qui n'osent 

S'approprier les choses 
Encore moins les gens 
Ceux qui veulent bien n'être 
Qu'une simple fenêtre 
Pour les yeux des enfants 

Ceux qui sans oriflamme 

Et daltoniens de l'âme 
Ignorent les couleurs 
Ceux qui sont assez poires 
Pour que jamais l'histoire 
Leur rende les honneurs 

J'aime leur petite chanson 

Même s'ils passent pour des cons 

J'aime les gens qui doutent 

Mais voudraient qu'on leur foute 
La paix de temps en temps 
Et qu'on ne les malmène 
Jamais quand ils promènent 
Leurs automnes au printemps 

Qu'on leur dise que l'âme 

Fait de plus belles flammes 
Que tous ces tristes culs 
Et qu'on les remercie 
Qu'on leur dise, on leur crie : 
"Merci d'avoir vécu 
Merci pour la tendresse 
Et tant pis pour vos fesses 
Qui ont fait ce qu'elles ont pu"

En voici une autre version:





Et une version de Loulou, très sensible et émouvante:





Et une dernière de Vincent Delerm:






Bon Dimanche d'élection

La Fleur du Dimanche