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vendredi 4 avril 2025

Coup Fatal de Fabrizio Cassol, Alain Platel et Rodriguez Vangama: La fusion des genres musicaux

 Le spectacle Coup Fatal de Fabrizio Cassol, Alain Platel et Rodriguez Vangama programmé au Théâtre du Rond-Point est une histoire de rencontres et d'ouverture, un généreux acte de brassage de cultures. Au départ, il y a plus de dix ans, c'est le contre-ténor congolais Serge Kakudji qui crée un concert où les airs baroques rencontrent les racines musicales africaines, augmentées de la guitare à double manche de Rodriguez Vangama et de percussions. C'est aussi la fusion par Fabrizio Cassol de la musique classique et de l'instrumentation traditionnelles africaine sous sa direction musicale avec les compositions qui en découlent au plus près du jeu des interprètes. C'est aussi un va-et-vient entre chant et danse, musique et mouvement, sous l'oeil curieux et aiguisé d'Alain Platel dont on connait aussi le mélange des genres. Ce spectacle connait un énorme succès international après sa création aux Weiner Festwochen. Grâce à la Comédie de Genève, la pièce a été reprise fin 2024 et a tourné en France, en Italie et en Belgique. 


Coup fatal - Alain Platel - Fabrizio Cassol - Rodriguez Vangama - Photo: Chris Van der Burght


C'est sur la grande scène Renaud-Barrault que vont arriver au fur et à mesure les douze musiciens et la danseuse Jolie Ngembi et le contre-ténor Coco Diaz, avec pour commencer les trois joueur de likembé (ou kalimba), ce piano à doigt, très ancien instrument d'Afrique dont le son doux et charmeur est propice au repos et à la méditation suivi des percussionnistes qui ramènent leurs chaises en plastique bleue. La musique se fait lancinante et tournante quand soudain surgit l'air d'Eurydice de Gluck, qu'interprète Coco Diaz avec le désespoir qui lui convient. On s'interroge sur quelle perte on se lamente, mais pas trop longtemps, les guitares et les percussions, dont un xylophone dont la résonnance passe par des verres nous entrainent dans des rythmes plus joyeux et un air espagnol apporte une belle énergie sur scène.


Coup fatal - Alain Platel - Fabrizio Cassol - Rodriguez Vangama - Photo: Chris Van der Burght


Celle-ci est délimitée au fond et sur les côtés par des rideaux faits de douilles de cartouches, conçu par l'artiste congolais Freddy Tsimba, et qui rappellent les conflits en République démocratique du Congo. Ces rideaux créent un autre univers, un peu à part où le contre-ténor ou la danseuse ou encore un chanteur percussionniste se retrouvent comme sur une deuxième scène, avant de rejoindre le plateau pour chanter et danser. La danse peut aussi devenir un mouvement collectif, tout comme les airs traditionnels qui diffusent et sont repris par tous, avec plus spécialement deux ou trois chanteurs ainsi que les joueurs de likembé. Entre les percussions, les chants et les guitares, dont l'inépuisable Rodriguez Vangana qui endosse aussi le rôle de chef d'orchestre de cette joyeuse troupe mais qui se lance aussi dans des solos et variations avec sa guitare et basse qui enchaine groove et gimmick, rythmes et variations, classique revisité et airs traditionnels la fusion est parfaite. 


Coup fatal - Alain Platel - Fabrizio Cassol - Rodriguez Vangama - Photo: Chris Van der Burght

L'on se surprend à entendre du Monteverdi et du Bach qui, sans hiatus alterne avec des rumbas et autres musiques à danser dans un ensemencement mutuel. Après presque deux heures de musique, les membres de la petite troupe, après avoir quitté leur veste et quelquefois leur maillot, quittent aussi la scène pour reparaître dans des costumes multicolores et éblouissants pour un défilé de S.A.P.E. , la "Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes", ce mouvement culturel et vestimentaire né à Brazzaville (République du Congo) mais aussi très populaire aussi à Kinshasa (RDC).  Et c'est reparti pour un tour très coloré où l'on chante et l'on danse, et l'on passe de Lascia ch'io pianga de Haendel à un émouvant To be young, drifted and black en passant par une séquence participative où le public est invité également à danser et tout cela s'achève par des respirations - en rythme bien sûr - qui s'éteignent dans le noir. 


Coup fatal - Alain Platel - Fabrizio Cassol - Rodriguez Vangama - Photo: Chris Van der Burght


On sort de là avec une très belle énergie et le souvenir d'avoir à la fois passé un très bon moment mais aussi la sensation de réconciliation rare et que l'on cherche à cultiver. Et on remercie l'ouverture de cette belle équipe qui se rit des frontières artistiques, danse, musique savante et musique populaire, ces sorciers du son et du mouvement que sont Alain Platel, Fabrizio Cazol et Rodriguez Vangama qui nous ont concocté ce beau programme et Paul Kerstens d'avoir eu l'initiative de les réunir. Souhaitons-leur bon vent et encore bon groove.


La Fleur du Dimanche


P.S. Pour voir le spectacle Coup fatal il faut maintenant aller en Belgique au 

Théâtre de Namur du 05 juin au 07 juin 2025



d’Alain Platel
direction musicale Fabrizio Cassol
direction artistique et mise en scène Alain Platel
chef d’orchestre Rodriguez Vangama
compositions Fabrizio Cassol , Rodriguez Vangama d’après Händel, Vivaldi, Bach, Monteverdi, Gluck
avec la collaboration de Coup Fatal
scénograhe Freddy Tsimba
lumière Carlo Bourguignon
son Guillaume Desmet
costumes Dorine Demuynck
photographie Chris Van der Burght
assistanat à la direction artistique Romain Guion

Contre-ténor : Coco Diaz
Vocal : Russell Kadima, Boule Mpanya , Fredy Massamba
Balafon : Deb’s Bukaka
Danseuse : Jolie Ngemi
Percussions : Cédrick Buya
Likembe : Bouton Kalanda , Silva Makengo , Erick Ngoya
Guitare : Brensley Manzodulua
Percussions et calebasse : Evry Madiamba
Guitare électrique, balafon : Rodriguez Vangama

Production (reprise 2024) Comédie de Genève
diffusion 0TT0 productions

Comédie de Genève
Du 17 décembre au 21 décembre 2024
Le Quai – Centre dramatique national Angers Pays de la Loire
16 et 17 janvier 2025
La Commune – Centre dramatique national Aubervilliers
Du 23 janvier au 25 janvier 2025
Teatro Stabile di Torino – Teatro Nazionale (Italie)
Du 13 mars au 16 mars 2025
MAC – Créteil (FR)
Du 20 mars au 22 mars 2025
Théâtre Romain Rolland – Scène conventionnée Villejuif
Mardi 25 mars
Théâtre du Rond-Point – Paris
Du 28 mars au 05 avril 2025

Théâtre de Namur
Du 05 juin au 07 juin 2025


jeudi 6 mars 2025

Marie Cheyenne - Enfermés dehors: Guitare voix, et quelle voix ! Textes et humour, à revendre!

 Marie Cheyenne, si elle s'appelle comme cela, c'est qu'elle est une guerrière, une guerrière avec une crinière, mais une guerrière qui chante. Vous l'avez peut-être déjà entendue, elle écume les scènes en Alsace (Strasbourg, Schirmeck, Oberhausbergen, Sélestat, Illkirch, Vendenheim, Illkirch, Wintzenheim,...) , même si ces derniers temps elle tourne plutôt dans le reste de la France. Alors, l'attraper à Drusenheim au Pôle Culturel, il faut le faire, il faut être un peu cow-boy et garder l'esprit joueur. Et l'esprit joueur elle l'a aussi. Mais pas seulement, parce qu'en plus de l'humour, elle a un sacré esprit critique. Mais surtout, elle est superbement servie par sa voix. 


Marie Cheyenne - Pôle Culturel Drusenheim - Photo: Robert Becker


Non seulement elle arrive à chanter en montant très haut dans les octaves, on pense des fois à Barbara, mais elle arrive aussi à faire des vocalises, à susurrer ou à chanter très vite, si vite qu'on n'a plus le temps de comprendre les paroles. Mais rassurez-vous, pour elle, les paroles sont importantes et, sauf pour ce numéro virtuose, elles sont toujours compréhensibles. Oui, les paroles sont importantes, parce que souvent les chansons sont bourrées d'humour, au premier ou au deuxième degré, quelquefois elles sont aussi engagées, mais pas chiantes pour autant, et elle sait même chanter des chansons à double sens, comme celle du tiramusi, (Plaisir coupable) une description suggestive de plaisirs solitaires. Et c'est un challenge réussi de sa part de la chanter juste après une chanson qu'elle a écrite avec une classe de CE1 de l'école Jacques Gachot de Drusenheim avec le formidable engagement de l'enseignante, Géraldine Wackenheim. Elles ont fait fort parce que pendant ces deux mois de travail avec les élèves, Marie Cheyenne a même réussi à en créer deux avec la classe. Deux chansons qu'ils ont donc aussi interprétées sur scène.


Marie Cheyenne - Pôle Culturel Drusenheim - Photo: Robert Becker


Même que les élèves sont revenus la chanson des Cowboys et des Indiens, une chanson pas facile mais qu'il ont chantée sans difficulté (certain(e)s l'ont même chantée intérieurement - ils ne devaient chanter que le refrain. La première chanson qu'ils ont écrite est très touchante, elle parle de leur désir d'avoir un jardin secret, la deuxième est plus rigolote et parle de leurs peurs d'enfant et leur permet de les mettre à distance. Les enfants sont vraiment formidables, et l'on imagine que certains ou certaines se sont trouvé une vocation à les voir sur scène chanter et bouger.

Marie Cheyenne, c'est sûr, elle, a cette vocation chevillée au corps et elle se bat pour la cultiver, se moquant des obstacles, comme lorsqu'elle a sorti son premier disque en pleine pandémie en 2020. Et l'on imagine que le deuxième disque Enfermés dehors sorti il y a un an et qui a donne son titre au spectacle est une sorte de révolte par rapport au confinement, une sorte d'appel à sortir en brisant les barrières que chacun(e)s pourrait trouver sur son chemin.


Marie Cheyenne - Pôle Culturel Drusenheim - Photo: Robert Becker


Pour ce qui est du reste du tour de chant, celui-ci est vraiment très varié en style, puisque cela commence par de la musique dansante qui parle du Bal perdu, et suivent d'autre rythmes de danse, que ce soit la valse ou le tango et une, mélange de swing et de rock-an-roll. Les chansons sont souvent bien rythmées et la mélodie, accrocheuse sert aussi le message, engagé, mais pas triste, quelquefois avec de l'autodérision, comme Une Chanson formidable (agréable, irréprochable, interminable,...) ou cette chanson (Quand on vous aime comme ça) sur le prince charmant et la vie qui va avec, qui raconte sous couvert de conte de fée, une histoire malheureusement beaucoup plus déceptive, si ce n'est franchement tragique. L'histoire est racontée, avec verve, humour pince-sans-rire et entrain. Une chanson tout à fait de circonstance la veille du 8 mars, mais qui est d'actualité tous les jours de l'année. Elle fait aussi un hommage aux Beatles avec Demain où elle prouve qu'elle peut autant chanter en anglais que la nostalgie et la joie. Après avoir fait revenir sur scène les enfants pour C'est quand qu'on mange, elle tente d'embaucher les adultes avec une chanson d'Aristide Bruant Les Canuts, une chanson de combat. Elle est tout autant à l'aise avec sa flûte en interprétant un air de Brassens, un de ses inspirateur, que pour construire des boucles avec percus des doigts, guitare, voix pour mieux impliquer le public et faire les présentations de son équipe grâce à laquelle elle réussit à nous enchanter - et réfléchir - avec son spectacle. 


Marie Cheyenne - Pôle Culturel Drusenheim - Photo: Robert Becker


La soirée s'achève par un bis où, seule avec un tambourin, elle interprète a cappella et avec coeur une très belle et poignante version du Déserteur de Boris Vian pour couronner cette soirée pleine d'émotions de toute sortes.


La Fleur du Dimanche


Pour connaître ses tournées, c'est ici:

https://marie-cheyenne.com/#dates

Un peu partout en France, le 17 mai à Ernoslheim-sur-Bruche et le 25 mai aux Ateliers Ouverts, quelque part dans le Port du Rhin à Strasbourg

P.S. Marie Cheyenne propose aussi des concerts "Bal Perdu", le prochain se passe dans le Nord de l'Alsace à Beinheim le 22 mars puis à Reims le 18 mai dans le cadre du Festival Jazzus

mardi 4 février 2025

Emily Loizeau au PréO pour son nouvel album La souterraine - Une voix haut debout et engagée

 Dix-huit ans après son premier album L'Autre Bout du Monde, son premier disque qui l'a fait connaitre, Emily Loizeau sort un nouvel album La Souterraine qui confirme son virage vers une musique plus électrique, avec un trio guitare, basse et batterie. Et c'est avec cette formation qu'elle donne un concert très généreux au PréO à Oberhausbergen. 


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Sur la gauche de la scène, un grand piano sur une caisse à roulette, drôle d'engin que l'on croirait encore en fabrication, à part la structure et la partie musicale, il n'y a pas d'habillage, mais au final quand elle en joue, la musique qui en sort est magnifique. Pour commencer, ses musiciens arrivent avec des lampes de poche et se positionnent sur la scène - Tomas Poli à la guitare et quelques synthétiseurs, côté gauche, Boris Boublil  à la basse et aux claviers au fond à droite et du côté droit à la batterie, Sacha Toorop - et mettent une ambiance pour annoncer l'arrivée de l'oiseau blanc, Emily, en robe blanche brodée et un haut doré qui se positionne derrière un clavier au milieu sur l'avant de la scène.


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Elle démarre avec la première chanson Eclaire-moi qui nous éclaircit sur la mise en scène à laquelle nous venons d'assister. Cela commence cool comme la chanson suivante, toujours sur un rythme lent Je vois dans tes yeux, qu'elle interprète sur son "grand" piano. La troisième, presqu'un tube déjà, La route de Vénus la voit siffler la mélodie et nous permet de retrouver les belles caractéristiques de sa voix particulière qui peut aller autant dans les aigus bien soutenus et des sonorités qui vont chercher dans les graves qu'elle porte au fond de sa voix. La mélodie nous berce et les ritournelles s'immiscent insidieusement dans notre cerveau alors que nous nous laissons bercer par l'étoile du Berger.


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Changement de rythme et de style avec Strong Enough, une chanson en anglais où elle est bien à l'aise, étant bilingue et binationale et où le groupe se laisse aller à des riffs de guitare et quelques éclats. Elle continue avec un mégaphone dans lequel elle chante des slogans en précisant s'adressant à la salle qu'il faut rester vigilant et sauvegarder la culture qui nous élève et nous relie.


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Sur ce elle dresse elle-même deux tentes couvertes d'ombres de fleurs, et après un morceau instrumental, elle nous offre la chanson qui a donné son titre au disque La souterraine et qu'elle nous chante au piano, une très belle chanson qui parle de fête et de feu, sombre et lumineuse à la fois, qui nous entraine dans son élan.

"il semble que rien en nous arrête 
il semble que rien ne puisse  troubler la fête"

Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Tout change avec I want to turn the volume down, chanson pour laquelle elle va se mettre à danser avec force et frénésie sur la scène, dans une chorégraphie habitée et sous des éclat de lumière stroboscopiques. La suite est également bien martelée, elle-même battant tambour, bien soutenue par Sacha Toorop et la guitare et la basse se faisant très électrique pour Stuck inside où elle martèle qu'elle entend des voix à l'intérieur d'elle.... 


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Le chanson suivante, plus calme, toujours en anglais est en hommage à Elaha, une jeune réfugiée afghane de 14 ans pleine d'énergie, assez pour soutenir tout l'espoir de toute la famille qui migre et essaie de venir en Europe. C'est une chanson qu'elle a composé pour le film La vie devant elle que sa soeur Manon Loizeau a réalisé sur Elaha, avec des images que la jeune fille a également tournées et qui respirent le bonheur et l'espoir dans le malheur et les difficultés de leur vie.


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Le tour de chant s'achève, comme le disque, avec la nostalgique chanson, cependant pleine d'espoir et de résilience, Ici commence la mer:

Laissons nos larmes
Irriguer les champs
Et nos yeux sécher dans le vent

Laissons nos rages
Tonner dans la nuit
De nos mains recueillons la pluie

Ici commence la mer
Le paradis sur terre
Nous avons la vie pour le faire

Laissons nos cœurs
Serrés et distants
Nos corps abîmés, chancelants

Laissons nos peaux
Comme le font les serpents
De nos yeux regardons devant

Ici commence la mer
Ici finit l'enfer
Nos peines seront passagères

Ici commence la mer
Le paradis sur terre
Nous avons la vie
Pour le faire.

Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Emily Loizeau descend de scène et vient s'immerger dans le public, comme pour prendre un bain de mer, cette mer qui est une ligne d'horizon de ses chansons, tout comme le bout du monde, les frontières, les autres, le vent, la nuit, les orages et les vagues. Les nuages, les rivières et les bouts du Monde... Elle est très consciente - et engagée - dans les actions pour sauvegarder la nature, les arbres, le climat, les animaux, les autres. 


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Elle a d'ailleurs invité des associations à tenir un stand, dont SOS Méditerranée, et pour le rappel, après une belle interprétation de Sur la route; elle chante s'accompagnant seule au piano une chanson pour les Sioux, Danser sur un volcan où elle dit: "La vie tient du miracle, Il en faudrait si peu pour l'abattre". Elle nous offre bien sûr en très beau cadeau - et sûrement beaucoup sont venus pour communier avec cette chanson - "L'autre bout du monde" avec sa voix inimitable qui nous emporte loin, très loin. 


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker

Et pour revenir sur terre et nous rappeler que celle-ci est à défendre et que nous aussi nous devons nous lever, elle nous y invite avec son orchestre et Rise, la musique qu'elle a fait pour le film La fabrique des pandémies qui pose un regard positif sur ce genre d'engagement. 


Emily Loizeau - Le PréO - Photo: Robert Becker


Ainsi s'achève un très beau concert plein d'énergie, de sentiments et d'émotions, plein de découvertes aussi, avec une chanteuse qui fait son chemin depuis plus de quinze ans sans perdre sa foi et en se renouvelant, et dont l'énergie d'aujourd'hui s'exprime avec force et électricité.


La Fleur du Dimanche


Chant, piano : Emily Loizeau 
Basse, claviers : Boris Boublil 
Guitare : Thomas Poli 
Batterie : Sacha Toorop 
Régie générale : Nicolas Legendre 
Régie son/façade/retours : Sébastien Bureau 
Régie lumières : Laura Sueur / Lucas Delachaux 
Mise en scène : Julie-Anne Roth 
Scénographie : Salma Bordes Chorégraphie : Juliette Roudet 
Création lumières : Samaële Steiner

lundi 3 février 2025

Los dias afuera au TNS: Paroles et musique pour casser les murs

 Ielles sont six sur scène, des femmes, des femmes transgenres et un homme transgenre qui toustes ont passé un certain temps en prison au Brésil, pour des raisons diverses. Et le spectacle Los dias afuera (les jours dehors) de Lola Arias les fait raconter et chanter leurs vies sous la forme d'un spectacle musical bien construit que vient rythmer de temps en temps une séquence musicale où Ines Corpertino joue de la guitare, du synthétiseur ou de la batterie et quelques autres instruments, tandis que certaines prennent aussi en main un instrument et chantent des épisodes de leurs vies sur des airs de cumbia, de samba ou de rock. Deux des interprètes, Nacho et Estafania avaient d'ailleurs créé un groupe de rock dans la prison et ils nous jouent un rock bien hard vers la fin de la pièce. 


Los dias afuera - Lola Arias - Photo: Eugenia Kais

Lola Arias, partant d'entretiens avec chacun.e.s a conçu un texte qui présente de manière variée les différents parcours de vie, relations avec la famille, enfants ou non, les multiples épisodes, problèmes et malheurs auxquels ielles ont été confrontés: drogue, violence, rejet, harcèlement, surveillance et répression policière, vie en prison. Lola Arias avait auparavant réalisé avec elles et d'autres détenues un film musical REAS qui décrivait leur vie en prison. Pour la pièce elle s'est un peu plus penchées sur les personnalités et les vies de chacune et leur parcours, inscrivant cela dans les problématiques plus spécifiques au pays sur la répression liée au genre et sur des problématiques plus universelles comme l'intégration et les freins sociaux liés à la conjugaison de leur séjour en prison et de leurs profils personnels. 


Los dias afuera - Lola Arias - Photo: Eugenia Kais

Tout cela est mené rondement, comme par exemple la présentation de leur parcours de vie, menée comme un jeu télévisé où les unes répondent aux autres par ricochet, les entretiens d'embauche filmés avec une même chute qui pourrait être comique si elle n'était désespérante ou des épisodes de vie commune rejouées sur scène ou un plateau mobile. La voiture prenant aussi l'air du temps, montrant à la fois la vie de l'un d'entre eux, mais aussi espace d'échange plus intime ou, quelquefois, source de danger. Accessoire aussi des séquences chorégraphiques, tout comme le plateau - scène de music hall avec son podium, ses escaliers et sa barre de pôle danse qui est aussi barre de descente accélérée. 


Los dias afuera - Lola Arias - Photo: Eugenia Kais

Les rideaux modulables sont aussi un outil dynamique, espace de projection ouvrant vers le monde extérieur, de même que le podium mobile, apportant sur scène des "coins de vie" transitoires. C'est toute la qualité de cette scénographie et mise en scène, conjuguées aux séquences chantées et chorégraphiées qui nous emportent dans un monde que l'on découvre. Que l'on découvre surtout par la qualité de jeu de ces six comédien.nes que l'on aurait tendance à qualifié d'amateur mais dont le jeu, la qualité d'interprétation sont exceptionnelles. 


Los dias afuera - Lola Arias - Photo: Eugenia Kais

Parce que Yoseli, Nacho, Estefania, Noelia, Carla, Paula, dont nous arrivons bien à comprendre qui elles sont comme personnes, sont aussi de magnifiques actrices, jouant, disant les textes de leur témoignage et leurs récits avec un professionnalisme impeccable. Ce vécu qui ne les empêche pas d'y insuffler une chaleur, une vérité et une émotion rare, et quand elles se laissent submerger par leur émotion propre, cela n'a que d'autant plus de justesse et de force. Et nous leur souhaitons d'en sortir par le haut, même si "on ne choisit pas son destin". Pour le moment, celui-ci semble aller dans le bon sens. Encore ! 


La Fleur du Dimanche 


Los dias afuera


Au TNS à Strasbourg -  du 3 au 7 février 2025


[Conception, texte, mise en scène]
Lola Arias
[Avec]
Yoseli Arias, Paulita Asturayme, Carla Canteros, Estefania Hardcastle, Noelia Perez, Ignacio Rodriguez
[Et la musicienne] Inés Copertino
[Dramaturgie] Bibiana Mendes
[Composition musicale] Ulises Conti, Inés Copertino
[Chorégraphie] Andrea Servera
[Assistanat à la mise en scène] Pablo García
[Collaboration artistique] Alan Pauls
[Scénographie] Mariana Tirantte
[Lumière] David Seldes
[Costumes] Andy Piffer
[Vidéo] Martin Borini
[Son] Ernesto Fara
[Direction technique] David Seldes, Facundo David, Matías Pagliocca 
[Régie plateau] Roberto Baldinelli, Andrés Pérez Dwyer, Manuel Ordenavia
Direction de tournée Lucila Piffer
Montage de la production et des tournées Emmanuelle Ossena & Lison Bellanger | EPOC productions
Production, administration en Argentine Luz Algranti & Sofia Medici
Production, administration de la compagnie Lola Arias Mara Martinez
Production technique Ezequiel Paredes
Assistanat à la production Juan Zuluaga, Marcia Rivas 
Assistanat à la scénographie Lara Stilstein
Casting Tálata Rodriguez (GEMA Films)
Conseil juridique Felix Helou
Travail social Soledad Ballesteros
Construction du décor Théâtre National Wallonie Bruxelles

Production Compagnie Lola Arias 
Producteur associé Gema Films
Coproduction Complejo Teatral de Buenos Aires, Festival d'Avignon (France), Festival d'Automne à Paris, Théâtre de la Ville Paris (France), Comédie de Genève(Switzerland), Théâtre National Wallonie-Bruxelles (Belgium), Festival Tangente St Pölten, Festival für Gegenwartskultur (Austria),Theaterfestival Basel, Kaserne Basel (Switzerland), Maxim Gorki Theater Berlin (Germany), Nationaltheatret Oslo (Norway), Scène nationale du Sud-Aquitain (Bayonne, France), Le Parvis Scène nationale Tarbes-Pyrénées (France), La Rose des vents Scène nationale Lille Métropole Villeneuve-d'Ascq (France), NEXT Festival (France), Théâtre National de Strasbourg (France), International Sommerfestival Kampnagel (Germany), Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine (France), Zürcher Theater Spektakel (Switzerland), Künstler*innenhaus Mousonturm (Germany), The Brighton Festival (England), CDN Orléans / Centre-Val de Loire (France), Fonds TransFabrik - deutsch-französischer Fonds für darstellende Künste.


dimanche 19 janvier 2025

Foin de Trois, on y arrive, à démarrer l'année: Un, Deux, Trois...

 Les choix sont quelquefois difficiles, Même pour les voeux. Cependant les réitérer permet de d'avancer dans l'année et conforter les liens.

Je vous offre donc aujourd'hui une dernière version de voeux en espérant qu'elle emporte votre adhésion.

Mais pour commencer, la fleur, celle vue pour finir l'année, juste au dessus de ce paysage de rêve, rose comme un rêve de bébé:


Rose de Noël - Photo: Robert Becker


Et voici la Bonne Année:


Bonne Année - Photo: Robert Becker


Et pour reprendre renouer d'une certaine manière avec les TVA (Textes à Valeur ajoutée, je vous fais aussi une version en trois points.


Point 1: Un rêve d'avenir où le temps est compressé:


Google  vient de révéler qu'il a réussi à créer une puce, Willow, qui corrige les erreurs de calcul des qubits (ou bits quantiques) - par opposition aux "bits" qui actuellement n'ont que deux états 0 ou 1 -  qui peuvent exister dans plusieurs états simultanément grâce à deux propriétés fondamentales de la physique quantique : la superposition et l’intrication. Ainsi ils réalisent des calculs massivement parallèles pour résoudre des problèmes complexes.

Cette puce réalise en à peine 5 minutes ce qu’un superordinateur classique mettrait… 10 septillions (10 puissance 25)  ans, soit un 10.000.000.000.000.000.000.000.000 années à accomplir. 

Le futur est à notre porte dont le seuil est un gouffre.


Point 2: Citations dérivées sur le mode de "jamais deux sans trois" où je cède la parole à une philosophe et un poète:


Toute vérité franchit trois étapes. D'abord elle est ridiculisée. Ensuite, elle subit une forte opposition. Puis, elle est considérée comme ayant toujours été une évidence.+

Arthur Schopenhauer

Ce qui se dit en trois mots n'est jamais si bien dit en quatre ; et un bon livre n'est pas celui qui dit tout, mais qui fait beaucoup penser.

André Chénier


Point 3: Trois chansons de chanteur.euse.s ou de groupes vu(e)s l'an passé.


En un, bien sûr "O solitude" de Birds on a wire (voir ici):


La deuxième , c'est Clara Ysé vue au PréO à Oberhausbergen là, avec Le Monde s'est dédoublé:


Et la troisième, c'est One, Two, Three de Rodolphe Burger vu à Bischheim à la salle du Cercle



Encore Bonne Année

La Fleur du Dimanche


P.S. Si vous n'avez pas reçu les Voeux N° 1 ni N°2, je vous invite à vous inscrire via le formulaire ici - et bien vérifier le mail de confirmation à renvoyer (Opt'in du RGPD).

Si cela ne marche pas je vous invite à le faire via un mail que vous m 'adressez en direct (adresse en haut à droite de la page). 

dimanche 5 janvier 2025

Catherine Ringer à la MAC à Bischwiller: La Volupté de la Vie

 Quatorze ans après la fin des Rita Mitsouko, revoila Catherine Ringer en concert à Bischwiller à la MAC, ou plutôt en spectacle dans L'érotisme de vivre. Il ne faut pas s'attendre au groupe mythique qu'elle avait créé en 1979 avec son compagnon Fred Chichin et les 11 disques et nombreuses chansons dont certaines sont devenues des tubes des année 80 et après, dont Andy ou Le Petit Train. Non, pour cette fois, Catherine Ringer fait dans la sobriété.


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker


C'est un piano à queue noir qui nous accueille sur la scène, à gauche, avec Grégoire Hetzel, qui l'accompagne et qui a composé la musique. Il introduit le spectacle, doucement, avec d'agréables mélodies modernes et calmes. Puis Catherine apparaît dans une belle et longue robe rouge feu et n ous interprète, quelquefois en les lisant, quelquefois en les introduisant par de courtes mélodies presque ritournelles, des poèmes ou des pages du journal de la poétesse Alice Mendelsohn. 


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Celle-ci était professeur de français et n'avait rien publié avant ses 90 ans. Son père est mort en déportation pendant la guerre. Elle et sa mère s'en sont sorties. Elle a écrit dès après la guerre et Catherine Ringer nous lit des extraits de ces feuilles secrètes qu'elle publie à 95 ans en 2022. Rythmées par les dates, ou ponctuées de "sans date" que le public accueille avec des rires, passent les moments de vie, des observations dans la rue, des réflexions sur les observations au fil du temps, la célébration de l'amour, le vrai, le physique, le corps, le sien, celui des autres, découverts, aimés, loués, célébrés dans la joie et le plaisir. Le plaisir de répondre, même à des âges avancés à ses envies de vivre et de partager la douceur et la puissance de la relation. Les mots sont simples, tendres, choisis. On y sent l'amour de l'autre, l'acception de soi. 


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Le désir pointe, déjà dans la mémoire du salon de coiffure paternel à Paris, où elle, "la fille qui bouillonne" est fascinée par la peau, les sens. La beauté est louée -  "belle, pour toi je suis belle" - les échanges se font par le regard - "à te voir entrer, mes yeux te font l'amour" - mais a distance est vite bannie - "dans nos main dans nos yeux, un seul corps pour nous deux" et le corps de l'homme passe au "tamis de la langue".


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Il y a beaucoup de tendresse qui passe dans les mots dit et aussi dans ce que l'on peut imaginer, la tendresse et le plaisir sont célébrés, avec joie. La liberté aussi, on sent que les plaisirs sont multiples, les hommes et les relations aussi. Et au fur et à mesure que le temps passe dans les textes, des années cinquante, puis soixante,  même après quatre-vingt, même en maison de convalescence et même dans les années deux mille cette énergie vitale reste forte. Au point de dire "à quatre-vingt-treize ans, il fait avoir la vice de la joie


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Catherine Ringer assure totalement cette image de femme qui incarne le désir et les sens en joie, elle qui a eu également un vie sans barrières. Sur scène, elle personnifie ce désir dans sa robe rouge, sa natte de côté, complice avec la public, en dialogue avec le pianiste, l'accompagnant un moment sur une mélodie au synthé, le laissant poser des respirations, dansant sur un air de java ou au rythme de la mélodie. Et également en laissant également vivre et se déployer ces morceaux choisis, ces morceaux de vie qui débordent de tendresse et de force et qui posent la femme maitresse de sa destinée et de ses choix. 


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Les spectatrices, nombreuses dans la salle en prennent de la graine. Ce portrait de femme qui s'assume jusque dans ses vieux jours, posé par petites touches, se construit sur une petite heure pour dire "le temps trop court" dans la joie, la tendresse et le désir. Par la voix unique de Catherine Ringer la joie de vivre et la volonté de " ne jamais bâcler de vivre" se transmet au public qui ne peut qu'y adhérer. Et y trouver y trouver un réel plaisir. 


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Plaisir qui se double sous une autre forme, tout aussi agréable quand, en guise de bis la chanteuse offre à la salle trois chansons qui prouvent qu'elle est aussi un grande chanteuse et interprète autant de Mouloudji  "Marcel"  quand il célèbre la rencontre dans "Un  jour tu verras" de circonstance. 


Catherine Ringer - L'érotisme de Vivre - Photo: Robert Becker

Egalement dans l'esprit du spectacle, la chanson de Georges Brassens "Je me suis fait tout petit" et bien sûr, tout honneur au groupe Les Rita Mitsouko, la chanson fort à propos "Triton".

On ne peut pas dire que cela se termine pas par une "queue de poisson"....

Alors je vous offre en prime le clip original:




La Fleur du Dimanche


P.S. Une pensée à Alice Mendelsohn qui a célébré la vie, l'amour et la joie et qui s'est éteinte la veille du concert à presque cent ans - elle était née en 1925. Les conjonctions....

mercredi 20 novembre 2024

Voie, Voix, Vois et Closing Party à Pôle Sud: Une soirée doublement cabaret et danse

 Pôle Sud nous propose au cours d'une double soirée originale et inclusive de découvrir le premier spectacle d'une troupe originale belge et le spectacle d'adieu (de faux adieu) d'une troupe hybride et polymorphe Wooshing Machine, à la fois belge et italienne. 

Pôle Sud - Voie Voix Vois - Photo: B. Buchmann-Cotterot


Avec Voie, Voix, Vois, nous avons trois mousquetaires du plateau qui collaborent dans un spectacle original, espiègle et drôle qui casse les codes. C'est sur un projet de cabaret, le Cabaret Cosmos que se rencontrent Saaber chanteur hip-hop et peintre, Gaël circassien et metteur en scène et Antoine, musicien et céramiste pour créer ensemble ce spectacle autogéré, autoproduit en conception "analogique" qui est à la fois une expérience sensorielle, un concert et une échange de savoir. Saaber Bachir en Monsieur Loyal et animateur de show sans queue de pie nous introduit à la fois dans le spectacle et dans ses coulisses. 


Pôle Sud - Voie Voix Vois - Photo: B. Buchmann-Cotterot


C'est à la faveur d'une fausse séance de ventriloquie que Saaber nous présente le trio et nous permet de comprendre le contexte et l'histoire du montage de ce projet, mais aussi son parcours et ses créations artistiques. Les voix s'échangent, se transforment, les chemins se croisent et nous avons le plaisir aussi de voir autant ses créations plastiques - son magnifique tapis orange avec une jument mustang noire et son drapeau rempli également de chevaux, animal fétiche - d'entendre ses poèmes et ses récits, et d'apprécier les machines musicales d'Antoine Leroy: des objets sonores qui deviennent longues vues ou mégaphone et des haut-parleurs de sound système qui nous font voir le parcours du son dans ces constructions artisanales en bois qui nous regardent de leurs gueules ouvertes et se promènent sur scène, faisant varier le son (en parallèle des petites boites de mixage, bidouillage de son qui traficotent en direct les paroles de chacun). 


Pôle Sud - Voie Voix Vois - Photo: B. Buchmann-Cotterot


Le spectacle est intéressant à la fois par ce qui se passe sur scène et  par la manière dont ce trio a travaillé en toute équité, laissant aussi à Saaber, artiste et personne à perception alternative, la pleine maitrise du processus. D'ailleurs au lieu d'un classique "bord de plateau" où l'on poserait des questions, nous avons droit à un vrai échange sur le plateau où nous discutons vraiment avec lui après qu'il nous ait serré la main en guise de salutation. Et si vos questions ou remarques ne sont pas à la hauteur de son attente, il ne se gène pas de vous le faire remarquer.


Closing Party (Arrivederci e grazie) : Chansons, cinéma et nostalgie

Avec Closing Party (Arrivederci e grazie) d’Alessandro Bernardeschi et Mauro Paccagnella, c’est une page qui se tourne, mais pas la dernière. Parce que cette pièce, la troisième de la Trilogie de la mémoire a déjà sa petite sœur Ma l’amor mio non muore / Épilogue avec Carlotta Sagna que l’on a hâte de voir ici.


Closing Party (Arrivederci e grazie) - Wooshing Machine - Photo:Broc


Baigné dans une ambiance intimiste, porté par des chansons douces des années 70 et 80 comme The Sound of Silence de Simon et Garfunkel, nostalgique à souhait ou le rock rauque de Marianne Faithfull Broken English ou encore le sensible blues de Nina Simone ou la vibrante version chantée en russe de l’Internationale, la musique et le cinéma construisent un voyage dans la mémoire de ces deux quinquagénaires qui ont traversé le paysage de la danse entre Italie, Belgique et France. Leur gestuelle simple, tendre et expressive est ici ressuscitée dans une chorégraphie festive où les confettis et serpentins font l’ambiance, et un verre en équilibre le défi.

 

Closing Party (Arrivederci e grazie) - Wooshing Machine - Photo:Broc


Tout habillés de noir, coiffés d’une perruque fournie de la même couleur, les deux comparses sont complices, proches et tendres après des années de scène commune et de mouvements partagés. Partagés aussi avec le public et les deux poissons rouges dans le bocal, témoin de leurs danses, de leurs acrobaties, de leurs histoires et de leurs jeux. Car tout passe, du coq à l’âne, les rêves, les souvenirs de cinéma, les discours sur la profession en ces temps incertains, les blagues inachevées parce qu’ils les connaissent par coeur à force de se les raconter, les souvenirs douloureux des années noires en Italie, les devinettes mimées sur les films vus et aimés, le jeu Pierre, Feuille, Ciseau, front contre front. 


Closing Party (Arrivederci e grazie) - Wooshing Machine - Photo:Broc


Et les moment de danse dans la même position, où ils fusionnent presque par leur pensées. Fusionnés dans la danse, que ce soit avec un tango ou des plus classiques ballets de Peer Gynt ou du Boléro de Ravel. Une brusque apparition du danseur virtuose Ares d’Angelo fait un pied de nez au temps qui passe. 


Closing Party (Arrivederci e grazie) - Wooshing Machine - Photo:Broc


Le décor et les accessoires, minimalistes, apportent eux aussi leur part de nostalgie et de dérisoire. Un paravent, source de magie devient fond de scène en proximité avec le public ou présentoir des tournées et festivals de la troupe via une sélection de tote bags. Un écran télé rejoue des scène de films de Pasolini, repère pour la mémoire, des plantes en pot dérisoires, des tutus ou ces multiples perruques semées sur scène qui vont tracer le temps qui passe et la mémoire, comme dans la chanson d’Alain Souchon « Pour voir si les couleurs d’origine peuvent revenir ».


Closing Party (Arrivederci e grazie) - Wooshing Machine - Photo:Broc


Et l’on se rend compte que la mémoire est multiple, que la danse - et le corps - se souvient de tout cela et que l’on peut - encore – le partager avec le public dans une cérémonie joyeuse et drôle. Et l’on communie avec eux dans ce spectacle qui oscille entre cabaret surréaliste et danse minimaliste mais bourré d’émotion qui nous parle au fond du cœur et de la mémoire.


La Fleur du Dimanche