dimanche 21 mars 2021

Traduttore Traditore ou l'engagement dégagement...

 Quand on lit quelque chose, ne trahit-on pas déjà le sens?

Et si on s'engage, n'est-ce pas déjà pour s'opposer?

Deux épisodes récents qui me semblent poser question font que je vais les lier. Ai-je raison ou tort? A vous de me le dire...

Mais tout d'abord, fêtons le printemps, les fleurs, les arbres, la forêt (c'est la journée mondiale de la forêt) et la poésie (c'est son Jour également). Donc, place à la primevère, fleur du Printemps (c'était hier):

Primevères sauvages - Photo: lfdd


A propos de traduction ou plutôt d'étymologie, vous saviez sûrement que le nom de la primevère vient de primula, et signifie "la première (fleur)" et que le mot lui-même vient des mots "prima" et "vera" où vera signifie en latin "printemps".... Je sens qu'on tourne en rond, là....

Allez encore une primevère sauvage de nos forêts!

Primevères sauvages - Photo: lfdd


Et en route pour un TVA conséquent! 

Je vais essayer d'alléger et de vous renvoyer vers les sources pour vote propre opinion.

Je vais vous rappeler la chronologie (raccourcie):

20 janvier 2021: Investiture de Joe Biden.

Si vous avez suivi un peu, vous avez vu la robe de Lady Gaga, entendu Jenifer Lopez chanter et entendu Amamda Gorman lire son poème - j'ai failli vous en proposer un extrait mais j'ai fait une "pause". Mais vous en avez peut-être entendu parler, c'est devenu un "sujet", plus encore avec l'épisode de la "traduction":

25 février 2021: Janett Deul se pique d'un article d'opinion dans un journal néerlandais: 

Opinie: Een witte vertaler voor poëzie van Amanda Gorman: onbegrijpelijk

Elle se demande si une jeune blanche (même Booker Prize 2020, même choisie par Annette Gorman) peut se permettre de traduire ce texte.... pour de multiples raison, mais en particulier parce qu'elle est "Elle est blanche, non binaire, n’a aucune expérience dans ce domaine...". 

Résultat: L'éditeur se récuse et s'excuse. Un épisode similaire arrivera en Catalogne avec Víctor Obiols le traducteur d'Annette Gorman.

S'ensuit bien sûr une large polémique autour de ce qu'on peut traduire, qui peut traduire, et qui peut décider de quoi ou interdire à qui... Les polémiques comme on les aime... Cela fait de "l'engagement"....

Je vous mets le lien vers quelques "réactions" ou réflexions" que ce sujet a soulevé, en dernier l'article dans "Le Point du Jour" du 20 mars 2021 de Serge Michel du quotidien indépendant suisse "Heidi News" qui dit:

Je me souviens du 20 janvier dernier, un mercredi. J’avais commencé la vaisselle du dîner quand mon collègue Fabrice Delaye a appelé. C’était son heure. Il appelle souvent le soir pour parler d’une technologie qu’il faut garder à l’œil ou d’une Exploration à lancer toutes affaires cessantes sur Heidi.news.

Là, il était très ému. Il venait de suivre l’investiture de Joe Biden. Le poème d’Amanda Gorman l’avait bouleversé. Il avait commencé à le traduire en français et voulait le publier tout de suite. J’ai relu le texte, j’ai rédigé une introduction et un titre. A 22h48, l’article était en ligne et depuis, vous avez été près de 30’000 lectrices et lecteurs pour ces premiers mots de réconciliation après le départ de Donald Trump de la Maison Blanche.

Mais ce soir-là, ni Fabrice ni moi, hommes blancs, la cinquantaine, ne pouvions imaginer que des traductions plus soignées de ce texte allaient provoquer de tels scandales!

Aux Pays-Bas, Amanda Gorman avait choisi pour la traduire la jeune prodige Marieke Lucas Rijneveld, 29 ans, qui a remporté le Booker Prize en 2020 avec son premier roman, «Qui sème le vent» (Buchet-Chastel). Cela n’a pas convaincu Janice Deul, styliste et activiste hollandaise originaire du Surinam. «Elle est blanche, non binaire, n’a aucune expérience dans ce domaine mais [selon l’éditeur] c’est elle la traductrice de rêve?», a-t-elle écrit dans le quotidien de Volkskrant le 25 février.

Je vous mets le lien vers l'article mais vous offre quand même sa conclusion - où il ouvre la question de la légitimité d'écrire du journaliste:

"Bien sûr, il y a eu tant d’abus, de reporters racistes ou cyniques qui ont bâclé le travail de terrain pour ne pas rater le coucher de soleil au bar de l’hôtel cinq étoiles, gin tonic et gilet multipoches. Bien sûr, les rédactions en Europe sont encore trop souvent des bastions de personnes blanches issues de milieux privilégiés, en décalage complet avec les sociétés bigarrées qui les entourent. Et les tentatives pour changer cela, comme le Bondy Blog que j’ai lancé en 2005, restent minuscules. Mais faut-il nous réduire à notre origine, à la couleur de notre peau?

Ai-je perdu ma compétence universelle parce que les hommes blancs depuis des siècles ont causé trop de souffrances aux humains et trop de dégâts à l’environnement, et que les autres redressent heureusement la tête?

Personne n’a encore interdit aux journalistes blancs de se déplacer. Mais c’est déjà en partie le cas pour les photographes. Aux Etats-Unis, le National Geographic a ainsi pris prétexte du coronavirus pour que les photos en Afrique soient prises par des Africains, et celles en Asie par des Asiatiques. Tout le monde le sait, cela va perdurer après la crise sanitaire. En France, les journalistes qui travaillent sur les banlieues sont bien souvent issus de l’immigration. Et les débats se crispent. On entend désormais qu’il faut être femme pour écrire sur les femmes, être trans pour comprendre les trans.

Gardons la tête froide et les yeux ouverts, nous allons au devant d’années passionnantes! 

https://newsletters.heidi.news/le-point-du-jour/le-journalisme-peut-il-encore-raconter-le-monde

Comme c'est la journée de la poésie et que Marieke Lucas Rijnewald, à défaut de traduire Annette Gorman a écrit "son" poème le 6 mars 2021, je vous l'offre: 

Tout habitable

Jamais perdu la pugnacité, l’originel tumulte pour le meilleur et le pire

ni cédé aux prêches, au Verbe qui dit ce qui est bien ce qui est mal

jamais été feignasse au point de ne pas te lever, de ne pas affronter

toutes les brutes épaisses, de ne pas combattre poings dressés l’esprit

d’étiquetage, les émeutes que la méconnaissance déclenche dans ta tête,

*

tempérant l’impuissance avec le rouge taureau dans tes yeux, ou

proclamant toujours ce que tu fais à ta guise avec une fierté

à toute épreuve, observant quelqu’un qu’on réduit en bouillie

tout en voyant suinter la dernière gouttelette de dignité, tu t’opposes

à la craniométrie, à la servitude, à tout ce qui emmure l’homme.

*

Jamais perdu la pugnacité, le germe du brutal arrachement,

tes origines portent un habit de deuil, tes origines ont heureusement

trouvé une bande d’arrêt d’urgence, non que tu puisses par expérience

parler de tout, non que tu voies en permanence combien l’herbe

de l’autre côté est parfois sèche et moins verte – il s’agit de la capacité

*

de se glisser sous d’autres peaux, de voir la mer de tristesse derrière

les yeux des autres, la pullulante rage des rages, tu veux dire que

tu ne comprends peut-être pas tout, que bien sûr tu ne touches

jamais tout à fait la corde sensible, mais que tu ne sens pas

moins les choses, oui, tu les sens, même s’il existe un écart infime.

*

Jamais perdu la pugnacité, et reconnaître malgré tout le moment

où tu n’es pas à ta place, où il te faut t’agenouiller devant un poème

parce qu’un autre le rend plus habitable, non par mauvaise volonté,

non par abattement, mais parce que tu sais qu’il y a tant et tellement

d’inégalités, qu’il y a encore des laissés-pour-compte, tu n’aspires

*

qu’à la fraternisation, tu veux un seul poing, peut-être ta main

n’est-elle pas encore assez forte, peut-être te faudrait-il d’abord prendre

celle de l’autre en guise de réconciliation, réellement ressentir l’espoir

que tu fais quelque chose qui rendra le monde meilleur, sans pour autant

oublier ceci : se relever après s’être agenouillés et ensemble redresser le dos.

Poème traduit du néerlandais par Daniel Cunin


Remontons au 12 mars avec une réaction de Claro qui s'interroge:

Suis-je le gardien de ma traduction? 

Des remous causés par la traduction d’un poème ? Hum. Des remous sans rapport aucun avec la qualité de ladite traduction ? Double hum. L’affaire est pour le moins étrange, et depuis quelques jours certaines voix se sont élevées pour débattre du sujet. André Markowicz dans Le Monde, Frédéric Boyer dans La Croix, entre autres. Ils ont dit des choses très pertinentes, auxquelles je serais bien en peine d’ajouter mon caillou – en outre, le poème d'Amanda Gorman ne m'a pas impressionné plus que ça. En revanche, la question soulevée – a-t-on le droit de traduire qui on veut, et que recouvrirait ce terme de « droit » – n’est évidemment pas sans intérêt, et c’est même peut-être, n’en déplaise à Janice Deul (la journaliste qui s’est offusquée du choix de l’éditeur néerlandais), une des premières questions que se pose celui ou celle qui va traduire. Sauf que ce mot de «droit», il ou elle l’entend différemment. Pour lui, ou elle, ce droit est lié à un savoir. Si je ne sais pas traduire tel texte, alors je n’ai pas le droit de le faire : c’est aussi simple. Quoique.

....

Quand j’accepte une traduction, c’est toujours après m’être posé ces deux questions. Est-ce que je sais traduire ça ? Puis : Si je ne sais pas, est-ce que j’ai envie d’apprendre (ou : est-ce que je pense être en mesure d’apprendre ?)

...

Il conclut:

La question de l’appropriation culturelle est une excellente question. Je me la pose systématiquement, mais à ma manière. Car j'ai envie de m’approprier la culture d’autrui, non pour en dépouiller l'autre, mais pour qu’elle me bouscule, me déloge, me décentre. Je veux, à travers l’acte de traduire, devenir autre, non tant l’auteur.e que je traduis, mais surtout son texte, les remous de sa langue, que j’espère n’être pas la seule expression de sa personne, mais avant tout une construction originale, unique, riche en ligne de fuites, car je pense aussi, j'espère, que l’écrivain.e que je traduis a essayé, en écrivant, d’échapper à sa condition, à son conditionnement, qu’il ou elle a cherché à s’approprier d’autres cultures, pour s’enrichir à son tour, sans dépouiller qui que ce soit, et connaître le plaisir d’une dissolution, même temporaire, dans l’autre."


Je vous rajoute le lien vers la Tribune d'André Markowicz dans le Monde des livres que je voulais déjà citer, sur l’« affaire Amanda Gorman » : « Personne n’a le droit de me dire ce que j’ai le droit de traduire ou pas ». En résumé - et pour le citer, il dit:


"L’argument de Janice Deul m’a rappelé les propos de ce critique russe orthodoxe qui m’avait dit que mes traductions de Dostoïevski étaient douteuses parce que je n’étais pas orthodoxe – or seul un orthodoxe peut comprendre un orthodoxe. Il ne le disait pas ouvertement mais c’était clair, le fond de la question était qu’un juif, même russe, ne peut pas rendre compte de « l’âme russe ».

Cette idéologie de l’atomisation de l’humanité selon la couleur de la peau, la race, l’ethnie, que sais­-je, est le contraire absolu de la traduction, qui est, d’abord et avant tout, partage et empathie, accueil de l’autre, de ce qui n’est pas soi: ce que j’appelle « reconnaissance ». Personne n’a le droit de me dire ce que j’ai le droit de traduire ou pas. Chacun, en revanche, a le droit de juger si je suis capable de le faire. C’est-­à­-dire si, par mon travail, je suis capable de faire entendre, par  ma voix, par la matérialité de mes mots, la voix d’un ou d’une autre – sans la réduire à celle qui est censée être la mienne."

 

Et pour clore l'histoire, la chronique d'Antony Bellanger sur France Inter le 3 mars 2021 qui conclut (en ouvrant):

Marieke Lucas Rijneveld renonce avec grâce

Le choix de Marieke Lucas Rijneveld ravissait l’américaine Amanda Gordon qui admirait l’œuvre de sa traductrice néerlandaise. 

Elle a finalement décliné l’offre en publiant ceci : « je suis choqué par la polémique autour de ma participation à la diffusion du message d’Amanda Gorman. Mais je comprends que certains puissent être blessé que l’éditeur Meulenhoff m’ait choisi ».

« Je me serais dévouée à transcrire la force, le ton et le style d’Amanda. Mais je réalise que si je peux penser et ressentir de cette façon, beaucoup ne le peuvent pas. Je souhaite que ses idéaux touchent le plus de lecteurs et ouvre tous les coeurs ».

Pour ma part je voudrais que nos auditeurs comprennent qu’il s’agit, de la part de Marieke Lucas Rijneveld, d’une renonciation douloureuse mais généreuse et très néerlandaise et certainement pas d’une défaite : au fond, elle renonce pour laisser au « pilier » noir néerlandais une chance de s’exprimer et donc de s’intégrer plus vite."

Antony Bellanger a bien sûr "historicisé" et expliqué la question des "piliers" très spécifiques dans ce pays...


Petite devinette: 

Voici deux violettes, une blanche et une violette. 

A votre avis laquelle dit vrai?


Violette blanche - Photo: lfdd


Violette violette - Photo: lfdd

Et pour en revenir au titre "Traduttore Traditore" qui en italien signifie bien "Traducteur Traitre", rappeler que ce n'est pas Du Bellay, qui est à l'origine de l'expression quand il a dit en 1549:

« Mais que diray-je d'aucuns, vrayement mieux dignes d'estre appelez traditeurs, que traducteurs? veu qu'ils trahissent ceux qu'ils entreprennent exposer, les frustrans de leur gloire, et par mesme moyen seduisent les lecteurs ignorans, leur monstrant le blanc pour le noir. »

Mais rappeler que l'expression originale est bien italienne, parue en 1539 sous la plume de Niccolò Franco dans les Pistole Vulgari. « Ser Traditori miei, se non sapete far'altro che tradire i libri, voi ve ne anderete bel bello a cacare senza candela ». 

Traduit « Chers messieurs les Traîtres (ou Traditeurs), si vous ne savez rien faire d'autre que de trahir les livres, allez donc tranquillement chier sans chandelle ! » F


Et je vous rajoute en exercice de style, le résumé d'un article de Sabine Mehnert paru dans Trajectoires une revue de recherche franco-allemande et intitulé: 

Mensonge et manipulation

« Traduire, c’est trahir » ? Pour une mise en question des notions de vérité, de fidélité et d’identité à partir de la traduction"

En français:

La perception de la traduction dans la culture occidentale repose sur un rapport ambigu à la « vérité » et à l’exigence de « fidélité ». La traduction touche ainsi à des questions philosophiques majeures : elle met en branle les conceptions traditionnelles de la vérité et de la fidélité, mais aussi de l’identité. Nous souhaitons non seulement démontrer que ces trois concepts doivent être repensés lorsqu’on les applique au champ de la traduction, mais également que la réflexion autour de la traduction permet de les définir de manière novatrice. Nous questionnerons ces notions en nous fondant sur les réflexions qu’Antoine Berman et Paul Ricœur consacrent au texte et à la traduction. Ces deux auteurs abordent la question selon deux angles différents, à savoir la théorie de la traduction au sens strict chez Berman et l’herméneutique philosophique chez Ricoeur.

Et en Allemand

Die kulturelle Wahrnehmung der Übersetzung im westlichen Kulturraum beruht auf ihrem vieldeutigen Verhältnis zur „Wahrheit“ sowie auf dem Anspruch der „Treue“, der an sie gestellt wird. Darin, dass diese Konzepte theoretisch schwer zu fassen sind, liegt auch das explizit philosophische Interesse der Übersetzung: Sie stellt traditionelle Auffassungen von Wahrheit, Treue und Identität in Frage. Dies bedeutet, dass diese Konzepte einerseits in Bezug auf ihre Anwendbarkeit auf die Übersetzung überdacht werden müssen und dass andererseits ein Potential besteht, sie ausgehend von ihrer Bedeutung für die Übersetzung philosophisch neu zu denken und zu nuancieren. Diese Infragestellung soll hier anhand der übersetzungs- und texttheoretischen Ansätze Antoine Bermans und Paul Ricœurs vorgenommen werden, die das Problem der Übersetzung jeweils aus übersetzungstheoretischer und aus hermeneutisch-philosophischer Perspektive betrachten.


L'Engagement - Dégage !


Pour ce qui est de la deuxième partie de mon billet, il s'appuie sur une constatation et un billet que j'ai reçu dimanche dernier d'un "ami" Benoit Raphaël (j'ai déjà parlé de lui) qui "élève des robots" pour affiner et trier l'information et la rendre de qualité. C'est son 54ème billet (un peu plus d'un an de billets du dimanche - moi j'en suis à 1135 depuis 10 ans...).

La constatation, c'est dans le groupe Facebook que j'ai créé: 1001 Fleurs - 1001 Amis et où la plupart des membres (et moi) postons des photos de fleurs (moi celles qui ont rythmé ce blog depuis le début), les gens réagissent (on appelle cela l'engagement) soit en "likant" - on clique sur un "j'aime" ou un autre émoji pour "exprimer" sa "réaction" vis-à-vis de la publication - soit en mettant un commentaire (c'est plus rare et le plus souvent sommaire), soit aussi en "partageant" la publication - et là, pareil, cela ne coûte pas trop d'effort, mais c'est encore plus rare.

Je parle de cela justement, parce que le sujet du billet de Benoît explique le fonctionnement - et tout ce que sous-tend ce que Facebook appelle "l'engagement" de l'utilisateur et qui est le "moteur" principal du fonctionnement de ce réseau social (et surtout commercial). En résumé: pas d'engagement = pas de réaction, donc pas de mouvement et tout s'arrête sur le réseau, donc pas de pub, pas de recettes. Donc obligation pour le réseau d'animer, c'est-à-dire de provoquer le "client".

En général, dans le groupe 1001 Fleurs - 1001 Amis, les gens "aiment" un peu les fleurs, mais ne "s'engagent" pas pour elles. L'épisode dont je veux parler et qui illustre bien ce dont parle Benoit Raphaël à propos de Facebook est la publication (le partage) d'une information concernant le sort de la glycine centenaire de Montmartre devant le bistrot "Chez Plumeau". Ce sujet - elle a été coupée par les services de la Ville de Paris - est sujet à polémique et il a entraîné plein de commentaires de toutes sortes et a été partagé de nombreuses fois....

Un peu comme la question de la traduction (et je ne parle pas de Covid et d'Hydroxychloroquine, rappelez-vous...).

Donc, en résumé pour ce qui concerne "l'engagement" pour Facebook, l'explication de Benoit Raphaël (et en particuliers, l'histoire de Joaquin Quiñonero, un ingénieur américain, qui a débarqué chez Facebook dans les années 2010 pour déployer le « machine learning » dans le ciblage publicitaire.) se trouve ici:

Quand les robots auront des dents – Flint Dimanche 54

 

Et en résumé:

"L’engagement, chez Facebook, c’est la capacité qu’a une info de générer des actions comme le pouce levé (le « like »), le partage à ses amis ou les commentaires à la con. Pour Facebook, l’engagement ne veut pas dire que l’info est de qualité, juste que tu vas t’y intéresser de façon compulsive. Un peu comme un Big Mac de l’info si tu veux. Le système marche tellement bien, que les ingénieurs ont décidé de créer une sorte de plateforme qui permet aux gens de chez Facebook de créer des modèles super facilement pour voir celui qui crée le plus d’engagement. C’est assez jouissif. C’est un peu comme si tu tenais des milliards de fils et que tu pouvais voir lequel fait bouger le bras d’un type au bout du fil ou non. En l’occurrence il s’agit plutôt du doigt : celui de l’humain qui va cliquer sur j’aime ou sur partager."

...

Bon, le problème, c’est que l’on s’est rendu compte que plus l’info suscitait la controverse, plus elle était extrémiste et même… plus elle était fausse, eh bien plus elle faisait bouger les doigts. Du coup les algorithmes ont naturellement décidé de distribuer plus d’infos négatives pour faire bouger plus de doigts. Résultat : Facebook s’est mis à héberger de plus en plus de groupes extrémistes sur son réseau. Et résultat du résultat : les algorithmes ont trouvé tout à fait naturel de suggérer aux utilisateurs non extrémistes de rejoindre ces groupes puisque lorsqu’ils les rejoignaient ils activaient encore plus leur doigts. Du coup on pouvait leur proposer plus de pubs encore plus efficaces.

...

Tout ça aurait pu continuer à se dérouler dans l’euphorie technologique la plus totale (Facebook continuait de grossir, dépassant le milliard d’utilisateurs actifs de plus en plus engagés sur des pubs de plus en plus ciblées) jusqu’à ce que Trump arrive au pouvoir et que la minorité musulmane de Rohingas devienne la victime d’une folle opération de meurtres ciblés en Birmanie. Si l’impact réel de la désinformation ou de l’info extrémiste sur le résultat des élections reste difficile à déterminer (j’avais longuement travaillé sur le sujet ici), pour les Rohingas, une enquête du Conseil pour les Droits de l’Homme des Nations Unies sur le terrain a pu déterminer le lien entre l’activité décomplexée des algorithmes et le meurtre ou le viol d’êtres humains.
...

Et alors... ?

"Du coup Mark Zuckerberg a eu une autre idée. Conscient de l’effet néfaste de la mécanique d’engagement, il a découvert que plus un contenu partagé se rapprochait de ce qui est interdit par les règles de Facebook (comme les appels au meurtre par exemple), plus il créait de l’engagement."

Et cela finit comment? Devinez !   

Je vous laisse découvrir le résultat dnas le prochain épisode du feuilleton "Mark Zucckerberg joue avec la vie de ses clients". Merci Benoit Raphaël et ses robots Flint (au passage qi vous voulez les nourrir, ou noourrir ses collaborateurs, c'est possible aussi via le lien ci-dessus).
 


Et pour finir en chansons - et en traductions, je vous offre:


1. Adèle qui nous aide à comprendre l'Anglais

 


2. Olivia Rodrigo l'espagnol avec Drivers License (Letra en Español)



3. Marshmello & Anne-Marie encore l'anglais (moderne)- FRIENDS 



4. La Javanaise de Serge Gainsbourg en Italien:



5. L'eau à La Bouche en français et en anglais par Serge Gainsbourg:



6. Je t'aime moi non plus en italien: Ti amo... io di più par Ombretta Colli Comelli




7. Et pour finir, une chanteuse douée pour les langues, France Gall avec une chanson de Gainsbourg toujours: Poupée de cire, poupée de son en italien:




8. et en Allemand 




9. Et pour prouver son talent, la même France avec la chanson Ich liebe dich wie du bist:





Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

dimanche 14 mars 2021

Ouvrir, accompagner, le souffle, le paysage, le texte, la poésie, le théâtre, Nicolas Bouchaud, pour vous, encore...

 En janvier, dans le billet "Le temps, encore, suspendu, pour le conjurer et sauver le moment où: Ils ont aimé !" je vous annonçais le livre de Nicolas Bouchaud "Sauver le moment" et je vous parlais de l'origine du titre. Si vous voulez avoir une idée de ce que c'est d'être comédien - un vrai - de théâtre... du spectacle vivant, comprendre son parcours, sa vocation, et voir à travers différentes expérience remémorées, heureuses, malheureuses, instructives et des moments où... il  comprit ou vécut le partage avec le public et le texte, je vous conseille ce livre dans lequel, en quinze épisodes choisis, il nous livre ce qui le meut, le révèle, le fait avancer ou le bloque.

Mais place à la suite de pommes vues dans le billet précédemment cité:

Pommes - 14 mars 2021 - Photo: lfdd


Je vous offre les mêmes pommes sous un ciel bleu dimanche dernier:

Pommes - 7 mars 2021 - Photo: lfdd



Les quelques chapitres intitulés "Ouvre!", "Le dur désir de durer", "Le geste de Galilée", "Pour ne pas finir", "Un métier idéal", entre autres, nous replongent dans ses souvenirs qu'il partage avec nous:

"Je me suis demandé si on pouvait écrire de façon satisfaisante sur sa propre pratique.

J'ai essayé.

J'ai essayé d'observer le travail de l'acteur.

Cherchant à voir quels en seraient les mouvements internes, les agencements secrets.

J'ai essayé de ne pas les ériger en règle ou en dogme mais simplement de les laisser vous faire signe.

Et de vous les adresser.

..."

Plus loin:

"Je pense à la transmission. Je pense à la disparition. Je pense au théâtre comme le lieu vivant d'un deuil sans cesse recommencé.

...

Nous faisons l'expérience de ce moment unique, de ce présent fugace qui contient dès son apparition sa propre disparition."

Arbre - Photo: lfdd



Plus loin, il cite Shakespeare (Le roi Lear) comme prescription pour un spectateur dans le spectacle "Un métier idéal":

"Tout compte fait, il est préférable d'être ouvertement méprisé

que de l'être sous couvert de la flatterie. Au pire, l'être le plus bas, le plus abandonné de la fortune garde toujours l'espérance et vit hors de la crainte.

Le changement n'est lamentable qu'à partir du bonheur,

le pire ne peut se retourner qu'en rire. Alors bienvenue air impalpable que j'embrasse.


Et il dit à ce spectateur (et à nous):

"Merci beaucoup, voilà, c'est très beau comme ça... c'était bien le léger suspens après: "Alors bienvenue...""

J'imagine toujours que Shakespeare a aussi écrit ça pour les acteurs, comme une indication de jeu, légère, prononcée en passant, comme s'il nous disait: n'oubliez pas de respirer, c'est dans votre façon de respirer qu'on vous voit apparaître...."


Je vous mets encore une photo de magnolias qui essaient vainement de fleurir depuis dimanche dernier:

Magnolias - 7 mars 2021 - Photo: lfdd



Il cite Celan (pour le spectacle Méridien - cf. le billet du 13 octobre 2015):

"On devrait enfin apprendre quand on lit un poème à lire aussi ce souffle, cette unité de souffle. Le poème, le poème vient encore, vient toujours par des chemins de souffle."

Et cela le mène à creuser son socle, sa base, sa philosophie du jeu:

"Il faut se déprendre.

Se déprendre des mots comme: imiter, incarner, représenter.

Aller vers d'autres mots comme: porter, ouvrir, adresser.

L'adresse du poème passe tout entière par le souffle.

Pas de discours, ni de belles envolées.

Pour l'adresse du poème, il y a un simple signe fait à l'autre, à celui qui l'écoute.

Signe de quoi?

Signe de complicité... pour rien."


Primevères - Photo: lfdd


Rien à ajouter, comme le dit Jean Birnbaum à propos du poète Damien Murith dans l'article "Etreindre la Douleur" dans le Monde Littérature du 12 mars 2021 à propos de son livre "Le Deuxième Pas"

"Il faudrait cesser de parler des poètes. Ne faire rien d’autre que les citer. Quand une écriture se tient sur la crête des mots, déplace leur sens pour élever la langue, s’abandonne à eux pour s’en remettre à plus haut que soi, on l’abaisse toujours un peu en plaquant sur elle quelque commentaire. Alors ouvrons grands les guillemets et donnons à entendre:


Et pour conclure sur um "mur de fleurs", cet arbre qui fleurissait en ville:

Arbre en fleurs - 11 mars 2021 - Photo: lfdd



Pour finir en chanson avec les poètes, j'invite Léo Ferré, Jean Ferrat, Alain Barrière et Juliette Gréco à leur rendre hommage:







Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche 

jeudi 11 mars 2021

Les expositions de mars à Strasbourg et alentour

 En ces temps bouleversés, cela fait une bon moment que je ne vous ai parlé d'expositions.... Depuis "A bout de Souffle" à la Maison de la Région à Strasbourg et des Ateliers ouverts en  octobre 2020. A part la sortie du livre d'artiste "Fleurs Fabuleuses*" qui avait été présenté à la Galerie La Pierre Large en décembre.


Galerie La Pierre Large

A tout seigneur, tout honneur, la galerie, après avoir reporté plusieurs fois la magnifique exposition de photographies - et de son livre "Coordonnées 72/18" - d'Alain Willaume, l'a présentée pendant deux mois et enchaîne avec la nouvelle exposition de Benjamin Kiffel "Et vînt la lumière". Benjamin Kiffel dont on connait le travail sur les lumières - surtout dans les villes, les intérieurs, les néons et un rapport très géométrique à l'architecture nous offre ici une "échappée" si l'on peut dire dans la nature, conséquence d'un confinement forcé l'année dernière et surtout d'un besoin de nature et de lumière. Il nous offre une lumière éblouissante, aveuglante - avec le soutien de deux installations de néons-nids de lumière - dans une forêt des Vosges curieusement en horizontal et en verticales, comme des barreaux qui nous emprisonnent dans cette nature aveuglante, presque comme dans une volière. Et l'on se retrouve dans cette grande cage à oiseaux en se disant que la ville finalement ce n'est pas si mal...

Je vous en montre une "interprétation" (surtout de mon appareil photo) lumineuse et "colorée" qui ne rend aucunement compte de la qualité photographique de l'exposition:

Galerie la Pierre Large - Benjamin Kiffel - Et vînt la lumière - Photo: lfdd

Galerie la Pierre Large - Benjamin Kiffel - Et vînt la lumière - Photo: lfdd

Galerie la Pierre Large - Benjamin Kiffel - Et vînt la lumière - Photo: lfdd

Galerie la Pierre Large - Benjamin Kiffel - Et vînt la lumière - Photo: lfdd

Galerie AIDA

Pour ne pas quitter la photographie, rendez-vous à la galerie AIDA Grand rue pour les photos de Marie-Pierre Arpin (ses triptyques avec esquifs et barques en couleurs), de Michel Hirsch (des plages et paysages presque abstraits) d'Alain Tigoulet (ses plages immenses et se vues du Périgord) et de Jean Valéra (ses vues en noir et blanc de "paysages, dont ses châteaux d'Alsace). S'y ajoute le travail en volume autour d'appareils photo "vintage" et détournés de Jean-Pierre Allera:

AIDA - Declics - Jean-Pierre Allera - Coucou - Photo: lfdd


Chantal Bamberger

Autre exposition à voir jusqu'au 13 mars, chez Chantal Bamberger, le magnifique travail de couleur, de formes et de dessin d'Ann Loubert:


Galerie Chantal Bamberger - Ann Loubert



Art Course


Une exposition qui vient de commencer, à la Galerie Art Course, c'est "Art Doudou" jusqu'au 3 avril - pour la suivante, je vous réserve une surprise... Vous y verrez des oeuvres de Karim Allaoui, Françoise Amet, Annett Andersch, Myrtille Béal, Geneviève Charras, Mélanie Richet, Hervé Rioux, Simone et Renée Trovarelli. A noter pour le finissage, le 3 avril à 16h00 une performance de Geneviève Charras "Panpan sur le Tutu" auprès de son installation de doudous-danseurs.euses ... 

Quelques images:

Art Course - Art Doudou - Geneviève Charras - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Geneviève Charras - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Geneviève Charras - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Geneviève Charras - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Hervé Rioux - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Renée Trovarelli - Simone - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Myrtille Béal - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Myrtille Béal - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Mélanie Richet - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Mélanie Richet - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Annet Anderch - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Annet Anderch - Photo: lfdd

Art Course - Art Doudou - Annet Anderch - Photo: lfdd



Art Course - Art Doudou - Francoise Amet - Photo: lfdd



APOLLONIA


Une exposition qui a duré presqu'un an, c'est celle de François Duconseille en regard de Tomi Ungerer à Apollonia à la Roberstau: "Ca vaut le détour". Allez-y vite, ça vaut le voyage et elle ferme le 18 mars (finissage de 14h30 à 18h00). Vous y verrez en dialogue les sculptures  pleines d'humour de Tomy Ungerer et les constructions surprenantes en carton applati de formes multiples de François Duconseille qui nous fait regarder différemment nos habitudes consuméristes.


CEAAC - Centre Européen d'Action Artistiques Contemporaines

Pour finir, une expositions qui, nous l'espérons ouvrira au public - pour le moment elle est visible uniquement sur rendez-vous, c'est au CEAAC l'exposition "Herbes Folles" avec Elise Alloin, Stefan Auf der Maur, Marie-Paule Bilger, Thomas Georg Blank & Işik Kaya, Mariann Blaser, Camille Brès, François Génot, Mathilde Caylou, Emmanuel Henninger, Anne Immelé et Melody Seiwert et, au CEAAC International, le travail de résidence de Clara Denidet "Raebouter" et d'Oana Paula Vainer "Smiling in slow motion".

Quelques images en attendant plus:

CEAAC - Les Herbes Folles - François Génot - Photo: lfdd

CEAAC - Les Herbes Folles - François Génot - Photo: lfdd

CEAAC - Les Herbes Folles - François Génot - Photo: lfdd

CEAAC - Les Herbes Folles - Marie-Paule Bilger - Photo: lfdd

CEAAC - Les Herbes Folles - Camille Brès - Photo: lfdd

CEAAC - Les Herbes Folles - Mathilde Caylou - Photo: lfdd


A suivre... ici


Bonnes expositions

La Fleur du Dimanche


* A propos de ce livre "Fleurs Fabuleuses", je vais bientôt vous en reparler, une exposition se prépare pour avril - bientôt plus d'informations...