Sylvain Riéjou est direct: Il dit ce qu'il pense et il danse ce qu'il dit. Il dit beaucoup de lui, jusqu'à se mettre (à) nu (voir son précédent spectacle à Pôle Sud Je rentre dans le droit chemin (qui comme tu le sais n’existe pas et qui par ailleurs n’est pas droit). Etant las de faire le tour de lui-même seul sur scène, il se lance dans une superproduction (avec en tout deux danseurs et deux danseuses) où il va se mettre à se regarder à travers le miroir de l'autre, et même avoir un(e) autre en fantôme réfléchissant (dans les deux sens du terme) en coulisse.
Je badine avec l'amour - Sylvain Riéjou - Photo: Vincent Curutchet |
Pour ce nouveau spectacle qu'il avait montré en maquette à Avignon en 2023 et crée en fin de cette année-là, il met à nu cette fois-ci sa pensée, sa motivation et sa démarche de création. Il fait une présentation distanciée de ses réflexions, ses discussions avec soi-même, avec en coulisse (au départ) Emilie Cornillot) puis son double sur scène - Julien Gallée-Ferré et au final avec toute l'équipe dans une lucidité empreinte de distance et d'humour.
Je badine avec l'amour - Sylvain Riéjou - Photo: Vincent Curutchet |
Dans un déroulé assez chronologie et logique nous assistons ainsi à l'explication du titre de la pièce énoncé par Sophie Marceau citant Musset dans La Boum, puis les questionnements d'adolescence sur les relations entre eux au moment de l'éveil des sens avec les témoignages mémoriels des interprètes, brossant un tableau de différentes situations vécues avec ce regard curieux sur la société des années 80 et ses idoles, dont Patrick Swayze. Et le film Dirty Dancing. Le film fera l'objet de plusieurs séances de répétitions de scènes cultes, vues et revues à l'époque et qui ici dans le spectacle prennent des allures de multiplication (la danse) des petits pains, pour finir dans un summum où Sylvain Riéjou se retrouve face à ses trois "doubles".
Je badine avec l'amour - Sylvain Riéjou - Photo: Vincent Curutchet |
Tout cela bien sûr dans une technique qu'il chérit et maîtrise à merveille, le play-back dansé, mâtiné de son propre langage de signes dansés dans lequel il excelle. Il en place un d'ailleurs en interlude sur la chanson de Gilbert Bécaud, Nathalie, un grand moment d'émotion dont on aurait aimé qu'il y en ait un peu plus. Parce que la danse et le mime ou le mimodrame sont interprétés par lui-même et ses danseur.euse.s dans une gestuelle exceptionnelle.
Je badine avec l'amour - Sylvain Riéjou - Photo: Vincent Curutchet |
Les parcours professionnels de chacun et chacune - Julien Gallée-Ferré avec Roland Petit, puis qui rencontre Clémence Gaillard dans les formations Ex.e.r.ce du Centre Chorégraphique National de Montpellier, sont un délicieux raccourci de l'histoire de la danse, du classique au très contemporain. On sent que ces interprètes, très talentueux auraient pu nous charmer encore davantage par leur corps en mouvement, mais le sujet n'était pas là, il s'agit aussi de danser 'l'intérieur" et cela fonctionne bien.
Je badine avec l'amour - Sylvain Riéjou - Photo: Vincent Curutchet |
Et permet d'une certaine manière de rendre plus proches de nous ces êtres de chair et de sentiment (divers) que sont les danseurs et les chorégraphes.
La Fleur du Dimanche
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