samedi 1 juin 2024

Carte Blanche à Alexander Vantournhout au Maillon: écouter, voir, comprendre, rêver

 Installé dans le Paysage du Maillon pendant dix jours Alexander Vantournhout  nous offre lors d'une soirée Carte Blanche différents points de vue pour nous permettre de comprendre la cuisine de sa création chorégrapho-circassienne en quatre étapes.


Morgana Cappellani - Photo: Tim Coppens


Au travers d'une conférence dansée de Morgana Cappellari, danseuse de l'Opéra Ballet de Flandre, il soulève pour nous à la foi un pan de tutu mais aussi l'histoire particulière d'une danseuse qui n'était pas destinée à cela mais qui a eu un parcours très personnel et il creuse les dessous des pieds d'une danseuse. Ainsi, tout en dansant, s'échauffant, nous expliquant ses exercices à la barre et l'histoire entremêlée du tutu (plateau et long) et de l'éclairage (douche et frontal) et ses effets sur la perception de la danse par le spectateur (le corps coupé en deux et la disparition des jambes pour l'interprète qui par conséquent la rend "aérienne). On apprend à la fois sa trajectoire personnelle (suivant sans enthousiasme à 8 ans les pas de sa soeur dans l'appartement de Curubita au Brésil) et son parcours (alors qu'elle voulait devenir chanteuse, les influences de ses enseignants qui l'ont amené aux Etats-Unis puis à Sao Polo avant une tournée internationale où elle est passée par la Belgique pour finalement devoir se décider d'y emménager très rapidement). Apprendre aussi plus en détail ce qui touche les pieds, à la fois en terme d'équilibre (avec projection des images d'un "podoscope"), de découvertes insolite (un os supplémentaire qu'il faut ôter) et des secrets des chaussons de danse "pointes" - "Point shoe" avec quelques clins d'oeils vers le cirque (au moins pour le partage de cet "outil" et de ses adaptations à la morphologie personnelle. Une très intéressante ballade du particulier à l'histoire et à la science.


Alexander Vantournhout au Maillon - Bolero en cours


Le deuxième temps est consacré à un travail en cours et nous montre que danser n'est pas réservé au corps humain mais que la magie de la danse, sur un Boléro de Ravel peut aussi se produire sur un mini plateau sur lequel toute une panoplie de toupies, plus ou moins élancées, quelques-unes réversibles, qui se relèvent ou même font demi-tour, qui éclatent ou changent de couleur ou qui accélèrent quand on les perturbe se mettent à danser, sous l'impulsion de le main droite du gaucher contrarié qu'est Alexander Vantournhout. Il prend cependant beaucoup de plaisir à diriger cette chorégraphie mécanique à "programme d'action" et qui nous fascine aussi en faisant ressurgir notre âme d'enfant.




En troisième temps nous avons droit à deux extraits de la pièce Every_body,deux duos entre Alexander Vantournhout et Emmi Väisänen qui nous emmènent dans la poésie des interactions de deux corps qui, quelquefois nous font perdre nos repères. Ainsi le premier situé sur un tapis roulant d'appartement nous offre les multiples variations des deux danseurs qui marchent d'abord côte à côte puis se tenant proche, puis écartés, en tension, mais les pieds côte-à-côte (tapis oblige) avec toutes sortes de figures de déplacement combinés de ces quatre pieds (alternatifs, successif, en en parallèle, entremêlés, droits ou de côté) dans une accumulation-variation hypnotique jusqu'à l'ivresse, au point que, quand ils en arrivent à la fin de leur "chorégraphie", nous nous rendons compte que tout au long de cette "marche immobile" ils ont avancé du fond de la scène jusqu'à l'avant sans que nous nous en soyons aperçu, ce qu'Alexander Vantournhout qualifie de magie. Et c'en est vraiment, tout comme on pourrait qualifier de magie les mouvements intrigants et énigmatiques, presqu'inexplicables. Ce qui était aussi le cas dans son spectacle Through the Grapevine et l'est aussi dans le deuxième extrait où les variations se font autour d'une table - sans chaises - qui permet à nos danseurs de tourner autour d'elle et d'eux-mêmes tout comme de jouer sur la gravité et les points de vues qui semblent tourner. Tout en jouant avec les limites des mouvements du corps et des interactions des corps entre eux et avec les objets.


Alexander Vantournhout au Maillon


C'est dans cette direction qu'Alexander Vantournhout avoue travailler dans son domaine de recherche et de création lors de la discussion avec Barbara Engelhart, la directrice du Maillon lors de l'échange qui suit. Il explique son parcours qui va du cirque à la danse comme interprète puis à la chorégraphie, d'abord en solo - on n'est jamais mieux servi que par soi-même, surtout dans un domaine où rares sont les personnes qui connaissent ses domaines de prédilection - puis avec d'autres. Il avoue aussi qu'il travaille plus facilement sur les chorégraphies où il laisse le corps s'exprimer et donner la direction du mouvement plutôt que d'organiser celui-ci au préalable dans l'espace ou en étant tributaire d'une musique sur laquelle poser les positions et les déplacements. Nous avons effectivement constaté dans ses différents spectacles qu'il nous a déjà proposé que ce qui est important pour lui, c'est le corps du danseur, ses attributs - éventuellement des extensions (boule de pétanque ou gants de boxe et chaussures à plateau pour ANECKXANDER, vu à Pôle Sud en 2017) et les relations entre les corps de chaque danseur. Et il n'aime rien tant que d'explorer et d'interroger les limites de certains systèmes et constations - ce mouvement est-il possible ? Et à quoi cela peut-il aboutir ?

Une sujet qu'il n'a pas fini de creuser et dont nous attendons avec impatience la suite.


La Fleur du Dimanche 

2 commentaires:

  1. merci pour ces écrits, en plus c'est un jeune homme qui semble fort sympathique, manamimatoon;

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