jeudi 30 novembre 2023

Extra Life au Maillon: La vraie vie est dans l'ailleurs

 Avec Gisèle Vienne, nous vivons dans des mondes parallèle, entre le rêve et le fantastique. Sur l'immense scène du Maillon, au début d'Extra Life  alors que la lumière se fait très lentement, nous distinguons, à gauche, une voiture tous feux éteints. C'est à partir de là que les choses vont émerger et se transformer. Car il s'agit d'une sorte de long voyage cathartique, salutaire ? La lumière des phares traverse la scène et l'on distingue des signes de vie dans cet habitacle, sorte de boite de Pandore: des mains sortent des deux côté, l'une d'elle, côté conducteur, tient une cigarette. 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Un peu plus tard, le plafonnier s'éclaire, on voit deux jeunes, qui discutent et écoutent la radio. Une émission sur les phénomènes non expliqués et les visites d'extraterrestres oriente leur discussion. On devine que Clara et Felix sont frère et soeur. Ils parlent d'une soirée mémorable passée ensemble puis de leurs souvenirs communs, puis sur ce sujet des Alliens et des phénomènes de sommeil paradoxaux, dont, en particulier la "paralysie du sommeil" qui nous fait vivre des moments dont nous n'appréhendons pas vraiment la réalité. Ce sera le cas pour cette pièce où les choses et les événements vont se dérouler sous nos yeux sans que forcément nous puissions y mettre un sens ou une définition claire.


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Par exemple, dans cette atmosphère, sombre, avec des brumes qui avancent sur le sol, et l'environnement qui reste dans une obscurité profonde, un autre personnage -  double de Clara ? - arrive très lentement sur eux, provoque une déflagration et disparait. Sortis de l'habitacle, les corps bougent dans une lente chorégraphie, se plient et s'agenouillent à terre, signes de souffrance ou de désespoir. Les dialogues, co-écrits avec les protagonistes (Adèle Haennel, très convaincante dans ce rôle de soeur suicidaire qui essaie de s'en sortie et Theo Livesey en frère qui partage un évènement douloureux de leur jeunesse) révèlent les non-dits et les blessures cachées sous des paroles banales et célèbrent ce moment qu'ils viennent de vivre et qu'ils espèrent salvateur, mais, "Le principe d'un piège est qu'il ne se voit pas". Une marionnette, figurant l'enfance et les traumatismes vécus sert aussi de psychopompe et de figure de rite de réactivation (avec la scène du dessin animé dont la fin est occultée). 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


De même que le retour du troisième personnage, après une longue scène de danse encadrée, prisonnière de cadres de lumière laser qui délimitent au couteau l'espace. Ce personnage, tel un ange annonciateur ou le visiteur du film de Pasolini, Théorème, va être d'une certaine manière, révélateur pour la soeur et le frère d'une relation intime, jouée et rejouée (la fille de la fête), réelle ou fantasmée, qui en tout cas va bouleverser définitivement leur vie. 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Et ils vont communier dans la musique qu'ils aiment et qui les enveloppe. Cette musique, en nappes et battements, de Caterina Barbieri qui contribue également à installer cette ambiance de rêve éveillé dans lequel nous a promenés pendant presque deux heures Gisèle Vienne avec son langage artistique très particulier.


La Fleur du Dimanche 

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