samedi 30 septembre 2023

Le Quatuor Arditti prend la machine à remonter le temps et cela dure pour notre plus grand plaisir

 Une fidèle spectatrice de Musica fait la programmation et choisit de faire revivre le programme du mardi 17  septembre 1985 pour partager l'émotion qu'elle avait ressenti à l'époque. 


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Photo: lfdd


Le Festival Musica qui fête cette année ses 40 ans avait lancé un appel à ses spectateurs "historiques" et quelques-uns ont répondu à l'appel, qui programmant des musiciens et danseurs palestiniens (Alain Harster), qui un compositeur méconnu, jamais joué: Olivier Greif (Bernard Pfister), qui un mini récital de violoncelle pour les enfants, une proposition de Françoise et Vincent Barret et de leur petit-fils Mathis ou encore une soirée expérience avec l'ensemble Itinéraire dans le nouveau bâtiment des Compagnons du Devoir à Koenigshoffen (l'architecte Louis Picon).


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Photo: lfdd

Il y avait aussi bien sûr la proposition graphique de Véronique Boyer de nous faire revivre grâce à ses milliers de dessins dans les carnets de sa grand-mère qu'elle a rempli année après année, à chaque concert depuis les débuts du Festival Musica et où elle "croquait" dans le noir de la salle les musiciens pour leur rajouter la couleur du souvenir. Des centaines de dessins magnifiquement reproduits (scannés et nettoyés) ont été exposés dans le "lieu" du Festival, avec les carnets originaux qui iront dans les archives de Musica, pendant toute la durée du Festival dans le bâtiment de l'ancienne Poste place de la Cathédrale. 


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Boulez - Photo: lfdd

Et donc ce concert "17 Septembre 1984" à l'église Sainte Aurélie à Strasbourg qui reprend le programme Boulez, Xenakis et Ligetti d'origine, revoit Irvine Arditti, le fondateur du quatuor en 1974 qui en 1985 était accompagné d' Alexander Balanescu au violon, Garth Knox à l'alto et Rohan de Saram au violoncelle, mais aujourd'hui, ce sont Ashot Sarkissjan au violon, Ralf Ehlers à l'alto et Lucas Fels au violoncelle qui l'entourent. Et bien que la scène ait été installée comme en 1985 à partir de photos d'archives, pour Violaine Bouttier, à l'origine de cette " reconstitution ", tout comme pour ceux - il y en a quelques-uns- qui ont assisté au concert "original" et tous les autres qui sont venus voir cette "commémoration",  ni le concert, ni la disposition (le soleil de midi gênant un moment les musiciens; les forçant à bouger un peu - il est vrai qu'en 1985 le concert s'est tenu le soir) ne sont les mêmes.

 

Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Boulez - Photo: lfdd

Et alors que Violaine se souvient des "crins qui volent" pour le Ligetti, ce seront deux cordes cassées qui interrompront le concert de ce jour. Et vu l'heure (début à 11h00) et la durée du concert (plus de deux heures et demies avec les pauses et les interruptions) certains spectateurs ont suivi leur estomac. Mais celles et ceux qui sont restés ne sont pas pour autant restés sur leur faim, si l'on peut dire. La prestation était magnifique et le programme consistant. A commencer par le long Livre pour quatuor de Boulez avec cinq des six mouvements - ou "feuillets" qui dans des manières différentes expérimentent les rapports entre sons ponctuels et sons sons tenus. C'est une pièce très intériorisée, contenue, dense et légère à la fois.


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Boulez - Photo: lfdd

Le premier mouvement joue plutôt sur les silences et les attaques de sons. Sur l'ensemble, les instruments sont très indépendants tout en se répondant et dialoguant dans une belle intelligence, souvent tout en douceur et délicatesse. Des glissades sonores, une fois avec une fin très surprenante et abrupte, ainsi que nombre de pizzicato ponctuent la pièce. Cette pièce de Boulez datant de 1949, la première où il n'intègre pas de piano est s'inscrit avec succès dans une lignée historique de quatuors dont elle n'a pas à rougir, surtout avec des interprètes remarquables qui ont ressorti cette pièce dans leur répertoire.


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Photo: lfdd

La deuxième pièce est la commande de la fondation Gulbekian à Yannis Xenakis en 1983 Tétras dédiée au Quatuor Arditti. Il explore le glissando qu'il fait varier en hauteur et en rythmique, en attaque également, ainsi qu'en volume. Irvine Arditti introduit le mouvement avant d'être rejoint par l'alto puis ses deux autres partenaires. La pièce alterne des grosses masses sonores et également des pizzicati et se termine en s'éteignant dans un sont tenu qui s'achève dans un souffle discret.


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Xenakis - Photo: lfdd

Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Xenakis - Photo: lfdd

Le concert s'achève avec le Deuxième quatuor à cordes de Ligeti (1968). La pièce est composée d'une même idée de structure musicale qui est traitée de manière différentes dans les cinq mouvements. De longues et lentes glissades musicales tout en finesse alternent avec des moments de presque pizzi et des sons violents. Des moments de silence également et une longue montée en puissance tout en gestes brusques et puis la sérénité. A un moment, de légers pizzicatos, genre tic-tacs qui émergent et s'accélèrent, enflent et prennent corps et volume.  Une opposition continuelle entre silence et éclats.


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Ligeti - Photo: lfdd

Une très belle matinée bien remplie, qui permet de découvrir ou de réentendre ce mythique quatuor avec de très belles pages de musique chambriste de compositeur qui ont marqué le XXème siècle. Un grand moment de bonheur.


Musica - Musica 84 - Quatuor Arditti - Photo: lfdd


La Fleur du Dimanche


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