vendredi 25 novembre 2022

La neuvième de Mahler à l'OPS: Toute une vie en une heure et demie

Aux neuvièmes symphonies sont attachées un destin funeste si l'on en croit la tradition musicale. Pour de nombreux compositeurs elle est l'ultime si l'on se réfère à  Beethoven puis à Schubert, Dvořák  ou Bruckner. Mahler lui-même déjouera le sort en renommant sa neuvième symphonie Das Lied der Erde (Le Chant de la Terre). Mais sa dixième officielle sera inachevée (en tout cas seul le premier mouvement des cinq a été orchestré. Et la Neuvième symphonie (en ré majeur) présentée au Palais de la Musique et des Congrès de Strasbourg par l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg sous la direction de Vassili Sinaïski est effectivement empreinte d'une atmosphère funèbre. Gustav Mahler n'en verra pas l'exécution par Bruno Walter à qui il l'avait dédié et qui la crée le 26 juin 1912, alors que Mahler est décédé le 18 mai 1911. Cependant, quand il l'a composée, pendant les étés 1909 et 1910 dans le Tyrol, planait sur lui la mort de sa fille aînée Maria, décédée le 5 juillet 1907.

L'effectif de l'orchestre est assez impressionnant et curieusement la pièce commence très doucement avec la harpe et les bassons puis les cordes tendres et nostalgiques pour, soudain monter en puissance. Mais ces mouvements alternent entre force et tendresse, puissance et sensibilité. toujours sur un rythme très lent duquel surgissent des éclats de cuivres et des chants d'oiseau apaisants. A un moment des clochettes (d'un "convoi funèbre" comme le note Mahler) et les vents soufflent en puissance pour s'achever dans une longue plage de calme, et un dernier soupir, tenu au hautbois par Sébastien Giot.

Le deuxième mouvement Im Tempo eines gemächtlichen Ländlers - Etwas täppich und sehr derb) est une valse paysanne franche et presque gaie que vient interrrompre une autre danse, valse rapide et brutale puis retour sur un Ländler plus lente et nostalgique. Mouvements qui mêlent les réminiscences populaires et simples sur lequels se tissent des variations plus sophistiqués.  Le troisième mouvement Rondo-Burleske: Allegro Assai (Sehr trotzig -très décidé) est encore plus rapide, et presque brutal commence avec force. Un jeu nerveux qui laisse la place à une grande variété de recherche harmonique sous des airs de "déjà entendu". Après un passage plus calme, retour vers une sorte de marche funèbre endiablée.qui s'achève en point d'apothéose.

Le dernier mouvement, Adagio - Sehr langsam und noch zurückhaltend, à l'image du premier, lent également et qui encadrent les deux centraux vifs et rapides, se déploie et prend son temps, comme un regard nostalgique jeté en arrière sur toute une vie, avec nostalgie et émotion. Le mouvement alterne des phrases mélodiques tenues avec douceur et nostalgie par les cordes avec différentes variations, moments de suspension, assurées par un ou deux instruments (violoncelle, piccolo, ...) qui se complètent, à la limite de l'audible. On en dresse l'oreille pour se dire "Cela respire encore". Pour finir dans un souffle, un chuchotement, l'apaisement final.


Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Vassili Sinaïski - Mahler - 9ème Symphonie - Photo: lfdd


Pendant les saluts nourris, le chef Vassili Sinaïski félicite les interprètes qui l'ont amplement mérité. Une magnifique et émouvante soirée.


La Fleur du Dimanche  

 

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