Pour le spectacle Donnez-moi une raison de vous croire créé (à tous les postes) et joué par les élèves du groupe 43 de l'école du TNS dont c'est le spectacle de sortie, les spectateurs sont également enrôlés dans la pièce dès leur arrivée. Il s'agit du recrutement de comédiens pour le Grand Théâtre d'Oklahoma et dès la descente des marches de la salle Gignoux, nous sommes accueillis - et triés "à droite,... à gauche" et archivés "attention la photo!" - par l'hôtesse à la voix suave et aimable (Pauline Vallé).
Musica - TNS - Donnez-moi une raison de vous croire - Mathieu Bauer - Marion Stenton - Photo: Jean-Louis Martinez |
La pièce se déroule dans l'univers kafkaïen de ce théâtre-cirque hors du temps. Marion Stenton qui en a écrit le texte à la demande de Mathieu Bauer s'est beaucoup inspirée de l'univers de Kafka et de son roman inachevé L'Amérique dans lequel le héros (ou plutôt l'antihéros) embarque vers cette aventure avec d'autres comédiens. C'est l'occasion de dénoncer à la fois l'absurdité du fonctionnement des entreprises (même un théâtre) et le peu de cas que l'on peut faire des individus (qui se confondent les uns les autres dans leur existence niée et leur demande non entendue).
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La pièce nous présente dans une folle chorégraphie les multiples péripéties oscillant entre comique et tragique de ces personnes, véritables pions interchangeables - tous s'appellent Karl - qui essaient de trouver un sens ou une reconnaissance dans la vie à travers ce travail qu'on leur promet: "Chacun a sa place". Sauf que les places ne sont pas définies ni stables, à part peut-être le "portier" (Kadir Ersoy). Mais même lui se fait reprocher de ne pas jouer son rôle de recruteur par "celui qui savait tout jouer", l'acteur suicidaire (Gulliver Hecq). L'absurde se niche dans les différentes situations rencontrées par les individus aux caractéristiques surprenantes tout comme dans la scénographie où l'on devine des couloirs labyrinthiques où l'on peut se perdre - et perdre son dossier - et les escaliers qui empêchent d'arriver aux archives au sous-sol et aux bureaux de la direction dans des étages inaccessible.
Musica - TNS - Donnez-moi une raison de vous croire - Mathieu Bauer - Marion Stenton - Photo: Jean-Louis Martinez |
Ces escaliers qui mènent aussi au bureau de la cheffe de personnel (Emilie Lehureau) et à l'administration (une machine à écrire crépite, au milieu de l'orchestre. Parce que dans ce monde kafkaïen, c'est un orchestre qui mène aussi le bal, donnant le rythme et l'ambiance, ambiance qui est quelquefois au blues (avec de très belles reprises dont Nobody Knows You When You’re Down and Out qui nous permet de confirmer que Pauline Vallé a une très belle voix), et quelquefois dans un univers plus électrique. Le metteur en scène Matthieu Bauer mène le rythme à la batterie et son complice Sylvain Cartigny qui a composé la musique est à la guitare et aux claviers, soulignant quelquefois très discrètement le texte des comédien.ne.s et c'est Jean-Philippe Gross qui s'est chargé de faire le reste des sons d'ambiance. Il faut aussi saluer Aurore Lévi qui pousse sa chansonnette de la "soupe silencieuse" et Kadir Ersoy qui slamme The Last Poets. et l'ensemble de la troupe qui reprend la chanson finale: "Les choses ont changé...non En attendant rêvons."
Musica - TNS - Donnez-moi une raison de vous croire - Mathieu Bauer - Marion Stenton - Photo: Jean-Louis Martinez |
L'idée de départ de Mathieu Bauer d'adapter le film documentaire de Fred Wiseman Welfare, tourné dans un bureau d'aide sociale, finalement abandonné se retrouve très bien assumée dans l'esprit. Et le côté fictionnel, les différents situations inventées par Marion Stenton et que les jeunes comédiens en devenir incarnent totalement tout en apportant une charge symbolique et forte, atteint son objectif à la fois de marquer les esprits et de de faire prendre conscience des travers de l'organisation et de l'inhumanité du système. Et cela fait un spectacle bien enlevé et sans temps morts avec de beaux moments de poésie. Et une touche de plus à la palette du Festival Musica.
La Fleur du Dimanche
Mise en scène Mathieu Bauer, Sylvain Cartigny
Avec l'ensemble des artistes issu·e·s du Groupe 46 de l'École du TNS
En Jeu
Carla Audebaud
Yann Del Puppo
Quentin Ehret
Kadir Ersoy
Gulliver Hecq
Simon Jacquard
Émilie Lehuraux
Aurore Levy
Pauline Vallé
Cindy Vincent
Sefa Yeboah
et les musiciens
Mathieu Bauer
Sylvain Cartigny
Orchestre Sylvain Cartigny (guitare, claviers), Mathieu Bauer (batterie et trompette), Jessica Maneveau (euphonium), Antoine Hespel (claviers), Ninon Le Chevalier (saxophone alto), Thomas Cany (trombone), Foucault de Malet (basse)
Collaboration artistique et composition Sylvain Cartigny
Lumière Zoë Robert
Création sonore Jean-Philippe Gross
Regard chorégraphique Thierry Thieû Niang
Assistanat à la mise en scène Antoine Hespel
Scénographie, costumes Clara Hubert, Ninon Le Chevalier, Dimitri Lenin
Son Foucault de Malet
Régie lumière Thomas Cany
Régie plateau Clara Hubert
Régie son Margault Willkomm
Régie générale Jessica Maneveau
Joséphine Linel-Delmas (Jeu) et Antoine Push (Régie-Création) ont également participé à la création du spectacle.
Production Théâtre National de Strasboug
Production exécutive en tournée Compagnie Tendres Bourreaux - Mathieu Bauer
Coproduction Festival Musica
Avec la participation artistique du Jeune théâtre national
Le décor et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS
Toutes les équipes du théâtre et de l’École ont accompagné l’ensemble du Groupe.
Création le 14 juin 2022 au Théâtre Public de Montreuil.
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