mardi 24 septembre 2024

Resonanz à Musica - Ruminations, Réminiscences, Résidus, la musique mise au point

Avec le concert de l'ensemble Resonanz sous la direction de Peter Rundell (le chef allemand à ne pas confondre avec Clark Rundell le chef américain vu ce vendredi) qui prend comme titre le nom de l'ensemble fondé en 1994 par des membres de la Junge Deutsche Philharmonie et dont le fonctionnement sans chef attitré est totalement démocratique, nous avons droit à trois pièces de compositeurs déjà passés à Musica. 


Festival Musica 2024 - François Sarhan - Covaru - Photo: Robert Becker

François Sarhan doit avoir le titre de plus ancien étant apparu déjà au moins en 2012 avec de la musique de films de Svankmajer. On aura vu (ou l'on va aller voir) son exposition au Q.G. de Musica et sa pièce Les murs meurent aussi (troisième temps des concerts de samedi dernier). Et nous reconnaissons ici encore avec Covaru (2024) - l'abréviation de COmpose, VArie et RUmine - son sens de l'humour iconoclaste. 

Festival Musica 2024 - François Sarhan - Covaru - Photo: Robert Becker

Les musiciens sont disposés sur scène par groupe croissants, duo, trio, quatuor et quintet en partant de la gauche avec la soliste devant et la musique oscille entre mélodies, bruitages et surprises. Pour les parties mélodiques, les instrumentistes se répondent d'une formation à l'autre, reprennent les airs et dialoguent entre eux, tandis que subitement soit des vagues sonores se recouvrent, soit des bruits ressemblant à des gouttes de pluie qui tombent, soit des frappes sur les instruments. 

Festival Musica 2024 - François Sarhan - Covaru - Photo: Robert Becker

Les airs se répandent et se diffusent par glissades. De brusques changements et l'on se laisse surprendre. A un moment, les musiciens frappent dans leurs mains en décalage, le rythme des frappes ralentit pour s'éteindre et c'est au tour des spectateurs de devenir actifs et d'applaudir. On s'imagine que la pièce doit être très drôle à jouer pour les musiciens qui sont aussi ravis que le public.



Festival Musica 2024 - Johana Bailie - Residue - Photo: Robert Becker

Joanna Bailie, elle, est venue à Musica en 2019 en image (en film) grâce à François Sarhan himself et elle a eu droit à un portrait musical (et filmique) en trois pièces en 2021. Sa réflexion sur les différents medias, matériaux, sons enregistrés, films, photos et récits (Muybridge) qu'elle avait alors déjà interrogés se retrouve ici avec Residue (2024) sous une forme de projection sonore dans l'espace du concert totalement repris par l'orchestre. Celui-ci joue un air qui semble surgi du lointain, oublié, ressuscité. Des souvenirs qui flottent dans l'air. Une musique douce, irréelle, étrange, presqu'immatérielle. 

Festival Musica 2024 - Johana Bailie - Residue - Photo: Robert Becker

La lumière baisse et les musiciens laissent la place à une bande son qui reprend des ambiances et des atmosphères du passé. La musique flotte autour de nous transformée mais sa source reste secrète. Nous plongeons dans le noir et puis la lumière revient doucement. Les deux sources de musique se superposent, se rejoignent, nous laissant nous interroger sur ce qui est produit sur scène et ce qui s'y rajoute. D'ailleurs pour finir, l'orchestre se retrouve seul à jouer à nouveau la partition. Etait-ce un rêve?



Festival Musica 2024 - Enno Poppe - Wald - Photo: Robert Becker

Enno Poppe, lui a déjà été présenté en 2017 et 2019 et l'année dernière il avait pris lui-même la direction de l'Ensemble Intercontemporain pour sa pièce Blume. Avec Wald (2010) on reste dans la nature avec des trèfles à quatre feuilles (quatre) que répliquent les musiciens de Resonanz sur la scène. Avec ce dispositif très identifié du quatuor qui est quatre fois sur scène, Enno Poppe interroge cette formation musicale en la multipliant. Cela commence par des sons en glissé dérapage. Cela devient une conversation (on a l'impression que quelqu'un parle - on ne serait même pas surpris si cela arrivait). Un vrai dialogue s'installe d'ailleurs, les instruments reprenant les phrases des autres, soit ils y répondent souvent à plusieurs, quelquefois seuls, en longs glissés et crescendos superposés. Une pièce magnifique, point d'orgue d'une superbe soirée avec un ensemble impeccable et un chef à l'écoute et d'une belle et précise direction.


La Fleur du Dimanche

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