vendredi 20 septembre 2024

Musica traverse les frontières: L'Etat des Musiques est partout, sous toutes les formes

 Pour démarrer le Festival Musica 2024 en ce vendredi 20 septembre 2024 - une avant-première, L'Etat de la Musique, a eu lieu à l'église Saint Paul le 15 septembre et l'opéra de George Benjamin à l'Opéra du Rhin Picture a day like this a été un heureux préambule (voir le billet ici) - cela se passe au Maillon et les murs se sont largement ouverts. Avant les deux pièces magistrales autour de De Staat de Louis Andriessen dans la grande salle, une douzaine - treize pour être précis - de points d'installations exposent ou performent des oeuvres qui en écho à De Staat rendent un hommage actuel au compositeur néerlandais décédé le 1er juillet 2021. 


Festival Musica 2024 - François Sarhan - Etat déchiré - Photo: Robert Becker

Nous y trouvons bien sûr François Sarhan qui expose son Epicerie Solitaire au Q.G. du Festival place de la Cathédrale. Il y fait jouer des "collages musicaux" de la pièce d'Andriessen que le spectateur actif déchire et colle sur un tableau. 


Festival Musica 2024 - François Sarhan - Etat déchiré - Photo: Robert Becker


Johannes Kreidler fait offrir un bracelet en fil de fer barbelé rappelant les protections (encore actuelles) de certaines frontières comme billet d'entrée de la salle. Drôle de passe-droit !

Festival Musica 2024 - Johannes Kreidler - Photo: Robert Becker

Ted Hearne, lui, implique le public dans son opéra déclamé à la gloire de l'industrie de l'armement. Dimitri Kourliandski nous fait "voir" une minute de silence symbolique en souvenir de...., et Valérian Guillaume nous fait participer à un simulacre d'élection soutenu par une logorrhée sans fin à l'image des bulletins de candidats imaginaires et poétiques. 


Festival Musica 2024 - Cathy van Eck - L'Etat de la Nature - Photo: Robert Becker

Festival Musica 2024 - Cathy van Eck - L'Etat de la Nature - Photo: Robert Becker


Et c'est Cathy van Eck qui brise la frontière entre nature et culture qui fait le lien de cet espace avec ces installations et la grande salle du Maillon en nous faisant "passer les portes" à la suite de ses musiciens qui, partant du milieu du public le mènent imperceptiblement (presqu'à leur insu) et inexorablement dans la salle "de concert".


Festival Musica 2024 - Cathy van Eck - L'Etat de la Nature - Photo: Robert Becker

Festival Musica 2024 - Cathy van Eck - L'Etat de la Nature - Photo: Robert Becker


Là, dans le bruissement des conversations amicales, une vidéo passe sur l'écran et la pièce de Cathy van Eck  s'éteint doucement et le chef d'orchestre Clark Rundell apparaît. La formation Asko/Schönberg auquel se rajoute l'Ensemble Klang composent ainsi un grand ensemble qui mixe à la fois des choeurs (4 voix de femmes), du rock (3 guitaristes), une fanfare (des vents: trombone, cor, basson, trompette,...) et un orchestre (clarinette, harpe, violon, alto,..) dont l'effectif en double et en miroir nous offre ainsi une musique originale. Cela commence doucement en notes discontinues qui se répandent au sein de l'orchestre, quelques duos de trombones et de bassons, les harpes lancent leurs notes en l'air, des sons de batterie sans aucune batterie émergent, des coups brusques surprennent, des phrases découpées se développent et se complètent. 


Festival Musica 2024 - Louis Andriessen - De Staat - Photo: Robert Becker


Des airs qui ressemblent plus à de la fanfare alternent avec des passages plus mélodiques. Et les voix féminines chantent des sons sans changement de hauteur et des textes de Platon, dont la réflexion sur la musique et la société ont été à la source, à la base de cette composition De Staat, La République et ce qu'il dit des différents types de musique (classification que Genevieve Murphy présente dans son installation Pour une révolution douce), notamment de fait de rejeter de la Cité le mode Myxolidien, trop porté vers la tragédie. La composition, plutôt semblable à un style répétitif reste pleine de surprise et alterne des moments de joyeux brouhaha de fanfare et des moment plus calmes et mélodiques avec cependant de brusque changements de rythme. Sur presque quarante-cinq minutes, nous somme emportés par une belle énergie dans cette course à perdre haleine.


Festival Musica 2024 - Oscar Bettison - On the slow weather.. - Photo: Robert Becker


Un entracte bienvenu nous laisse souffler un peu et la deuxième partie, plus nocturne d'Oscar Bettison, un élève de Louis Andriessen qui a écrit cette oeuvre On the slow weather of dreams en hommage et en écho à The Staat nous en offre la première française. L'effectif est le même sauf que les instruments - et les chanteuses - sont amplifiés. Ce qui donne le plus bel effet par exemple pour les deux pianos dans lesquels on plonge littéralement. Et c'est un vrai plaisir, tout comme le dispositif de stéréophonie, ici amplifié nous augmente l'espace. 


Festival Musica 2024 - Oscar Bettison - On the slow weather.. - Photo: Robert Becker


Le texte, très poétique et très intéressant, presque surréaliste, en anglais et en italien (dommage que les sous-titres ne soient qu'en anglais - nous aurions sûrement découvert une belle ménagerie et goûté une large et inventive botanique qui rythme le récit chanté magnifiquement par les quatre superbes solistes les sopranes Els Mondelears (magnifique dans les aigus) et Bauwien van der Meer et les mezzos Michaela Riener et Anna Trombetta. 


Festival Musica 2024 - Oscar Bettison - On the slow weather.. - Photo: Robert Becker


Elles nous chantent et nous enchantent de ce récit joyeux et luxuriant, pour ne citer qu'un jeu sur les mots: "Wrapped in the dark / rapt in darkness - Enveloppé dans l'obscurité / captivé par les ténèbres".  Ce sont donc de belles variations chant et musique, quelquefois même des gazouillis d'oiseaux qui apparaissent, ou des notes étirées qui nous promènent dans cet univers onirique qui s'achève comme il a commencé, par des souffles, l'origine du chant.


Festival Musica 2024 - rewire au Maillon - Photo: Robert Becker


La soirée s'achève dans la "petite salle" du Maillon ouverte sur le hall et sans frontière qui devient Dancefloor et nous jette dans une ambiance de musiques électroniques et de vjiyng avec la fine fleur de des DJ internationaux dans le festival rewire de La Haye déporté au Wacken.


La Fleur du Dimanche

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