Le décor est exposé devant nous, en petites constructions de papier, tout en longueur devant la scène, avec des extensions vers le public et, on le découvrira par la suite, jusque sur la scène. Les images (filmées par François Sarhan lui-même avec une petite caméra, en direct ou avec des scènes filmées incrustées dans ce décor par Yann Philippe ou quelquefois plein cadre), nous montrent un univers de dessin animé, très animé, au début filmées en fish-eye et tourbillonnantes, à en attraper le vertige.
Puis ce sera un voyage dans plusieurs univers, plusieurs personnages - certains joués par les musiciens qui sont sur scène - dans un "pet shop" magasin pour animaux, un bureau et sa bureaucrate derrière son guichet, au milieu de sa paperasse, le cabinet d'une "chanteuse télépathique", ou d'un "maître en développement personnel", ou encore dans un couloir où se rencontre un couple d'amoureux - ces derniers devenant symboliquement via leurs seuls vêtements les protagonistes d'un "Interlude Eroticon" dans lequel les deux amants s'emtremêlent inextricablement dans une fusion finale (pantalons et pulls) après des manoeuvres d'approche sur canapé - un petit bijou!
Autre bijou cinématographique, un hilarant match de foot entre l'Allemagne et les Américains où, dans le commentaire nous assistons au duel entre les philosophes postmodernistes et ceux du clan de la métaphysique et où, sur le terrain la balle passe de Heidegger à Nietsche, à Derrida, à Wittgenstein et d'autres. Le film, et la musique, s'embalent vers la fin, montent en puissance et les images deviennent virevoltantes et folles, dans le dédale du décor puis dans les constructions mécaniques sur scène, accompagnées d'un superbe traveling musical. Et la pièce, et le film se clôt dans un dernier voyage imaginaire dans un voiture pour revenir au début du film.
Toutes ces images sont bruitées en direct "son" par Akiko Ahrend, bien soutenue par la percussionniste Yukka Ohta et à l'alto et le voix par Annegret Mayer-Lindenberg (le chant télépathique), à la guitare par Timm Roller, aux claviers et la voix par Malgorzata Walentynowicz et aux saxophones et à la voix de Frank Riedel. Leur univers est merveilleux et magnifique, complétant la magie de ces personnages découpés qui nous renvoient au cinéma d'animation tchèque dans son inspiration, on sent bien la proximité, tout à fait assumée par François Sarhan de Jan Švankmajer ou de William Kentridge.
Et l'on sort de cette petite séance de cinéma animé en pleine forme, revigoré, partant du bon pied (my left foot) après en avoir pris plein les oreilles (the rigt ear) et en nous disant que peindre des sons avec l'oreille droite (comme Van Gogh) c'est aussi bien que dessiner avec son pied gauche (My left foot) comme Christy Brown.
La Fleur du Dimanche
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