mercredi 4 mai 2022

Somnole de Boris Charmatz au CCAM: Le son du corps qui danse, un sifflement en somme

Si siffler n'est pas jouer et que l'on exprime quelquefois sa joie au travail en sifflant (voir Blanche-Neige chez Disney), siffler et danser ne vont pas forcément de pair. Déjà que parler en dansant est une performance, maîtriser à la fois son souffle et ses mouvements n'est pas partie gagné. Et c'est un vrai challenge auquel Boris Charmatz s'est confronté. 


Somnole - Boris Charmatz - Photo: Marc Domage


C'est au temps du confinement, quand il s'est retrouvé face à lui-même en 2020 que, pour passer outre la distanciation et l'absence de représentations, que Boris Charmatz a conçu ce solo. Il a fait à la fois un voyage à l'intérieur de lui-même et un retour sur son enfance lors de laquelle il adorait siffler. Un voyage dans un état second, un genre de rêve éveillé où son corps se laisser mener par les sons qui sortent de sa bouche sans articuler un seul mot. Un vraie performance et en même temps un spectacle très sensible et surprenant.


Somnole - Boris Charmatz - Photo: Marc Domage


Le danseur arrive sur la scène nue, plongée dans une obscurité verdâtre, comme un esprit, les bras levés, torse nu et ceint d'une jupe en tissu rayé. Pendant qu'il se mesure à la scène et que la lumière peu à peu le révèle, un sifflement flotte au-dessus de lui qui l'accompagne doucement. Ses gestes sont lents, précieux et désaxés et, au fur et à mesure, l'on prend conscience que son corps obéit à cette mélodie sifflée qui semble le guider et diriger ses mouvements. Suivant cette injonction qui le transporte, il tourne, tombe, se déhanche, se désaxe, saute, dans une chorégraphie sans cesse renouvelée. Son corps souple et malléable s'offre à nous sous un projecteur qui le traque et le poursuit à chaque point de la scène, sculptant ses muscles, mettant en valeur ses poses et ses attitudes, passant d'un mimodrame assez lisible à des mouvements de danse plus classique et puis à des attitudes surprenantes ou franchement originales. 


Somnole - Boris Charmatz - Photo: Marc Domage


De belles envolées lyriques voisinent avec des moments plus introspectifs, des moments d'humour, quelquefois comiques, alternent avec des situatioss plus intenses où l'on sent le corps mis en danger. Et toujours sous cette nappe sonore sifflée, qui convoque de nombreux morceaux reconnaissables par le public - qui est invité à une partition orchestrale sifflée ou, lors d'un instant de nostalgie romantique, à se projeter dans les amours remémorées de Prévert et Kosma. Ainsi, comme dans un rêve éveillé, les airs, qu'ils soient d'opéra, de Haendel, de Bach ou de Mozart, des musiques de film d'Ennio Morricone ou d'Henri Mancini ou encore des chansons de Claude François ou de Gershwin, prennent corps. 


Somnole - Boris Charmatz - Photo: Marc Domage


Un corps qui les incarne ici à leur manière et nous les fait découvrir sous un autre aspect, une autre angle, mouvant et plein d'énergie, au plus près de la peau et des os, des muscles. Dans une énergie et une sensibilité décalée et surprenante. Comme dans une parenthèse hors du temps.

La Fleur du Dimanche



Note: Le spectacle présenté au CCAM de Vandoeuvre remplaçait Infini prévu initialement.

En relation, sera présenté au Centre Pompidou - Metz  le samedi 7 mai et le dimanche 8 mai



Interprétation :
Boris Charmatz

Assistante chorégraphique : Magali Caillet Gajan
Lumières : Yves Godin
Collaboration costume : Marion Regnier
Travail vocal : Dalila Khatir
Avec les conseils de : Bertrand Causse et Médéric Collignon
Inspirations musicales : J.S. Bach, A. Vivaldi, B.
Eilish, La Panthère Rose, J. Kosma, E. Morricone,
chants d’oiseaux, G.F. Haendel, Stormy Weather…
Liste complète disponible à la fin de cet article
Régie générale : Fabrice Le Fur
Régie lumière : Germain Fourvel
Directrice déléguée [terrain] : Hélène Joly
Direction des productions : Lucas Chardon, Martina Hochmuth
Chargé.e.s de production : Jessica Crasnier, Briac Geffrault

Production et diffusion : [terrain]

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire