mercredi 22 octobre 2025

Entre-Temps de Philippe Decouflé à la Villette: Instants magiques entre cirque et cinéma: On rembobine les souvenirs, on danse la mémoire

Philippe Decouflé et un artiste qui s'est frotté à toutes sortes d'expressions artistiques, que ce soit le mime (qu'il avait travaillé avec Marcel Marceau et Isaac Alvarez), le cirque (avec Annie Fratellini), la danse (avec Alvin Nicolaïs mais aussi avec Merce Cunningham ou Régine Chopinot), le clip, la photo et la pub (avec Jean-Paul Goude). Mais il a également mis en scène, organisé des défilés (dont celui de l'ouverture des J.O. à Albertville en 1992 ou la Danse des sabots pour le bicentenaire de la Révolution en 1989) ou la revue du Crazy Horse Désirs. Il a fait du théâtre et des films et il revient avec sa compagnie DCA (Diversité, Camaraderie, Agilité) qu'il a fondée en 1983 et qui compte plus de 2.000 représentation, avec Entre-Temps, son nouveau spectacle après Shazam, créé en 2022 -nous l'avions vu en 2022 avec Nosfell et Pierre le Bourgeois dans Mémoire des Formes.


Entre-Temps- Philippe Decouflé - Photo: Jean Vermeulen


Le spectacle est composé de différentes pièces de puzzle qui ne s'assemblent pas forcément et le premier tableau est une sorte d'hommage au processus de la photographie à l'envers ou aux spectacles de magie théâtralisée. Cela se passe sous un chapiteau de Cirque à la Villette, mais la scène ressemble plus à une scène de théâtre. Différents rideaux rouges ou dorés cachant plus ou moins la scène et, derrière le dernier rideau, une sorte de défilé à la Muybridge, comme des esprits, se révèle en passant aussi devant, dans une sorte de film muet avec travelling permanent tandis que des personnages - un puis deux puis trois - se mettent en pause-pose sur des tabourets et que de grands panneaux noirs portés par deux personnes traversent la scène et font disparaître ces "poseurs", comme lors d'une "prise de vue" où la personne photographiée serait avalée par l'appareil. C'est d'une certaine manière le procédé de la photo qui transforme le personnage photographié en spectre ou en fantôme, ou, comme le numéro de foire quand le prestidigitateur escamote un comparse ou un volontaire. Cela se répète mais jamais pareil. Un pianiste, le merveilleux Gwendal Giguelay, comme l'accompagnateur de film muet, improvise tout au long du spectacle sur des airs connus et les différents interprètes se remémorent leurs souvenirs de danse sur une bande son qui fait resurgir le passé. 


Entre-Temps- Philippe Decouflé - Photo: Jean Vermeulen


Ce passé qu'ils dansent aussi, proposant en quelque sorte un panorama de l'histoire de la danse contemporaine avec l'esprit, entre autres, de Dominique Bagouet, mais aussi de superbes prestations sur des tubes de Laurie Anderson (O Superman), Madonna ou Gloria Gaynor (I will survive), David Bowie et The Temptation. Ces superbes passages dansés - et chantés - apportent une très belle dynamique, autant qu'une certaine nostalgie au spectacle. Saluons particulièrement les magnifiques numéros de Dominique Boivin, dans une réactivation de Marlène Dietrich avec sa chanson du film l'Ange Bleu Ich bin von Kopf zu Fuss auf Liebe ausfgetellt et dans un tout autre registre mais avec une précision des gestes et une sobriété touchante pour la séquence des chiffres d'Einstein on the Beach de Philip Glass. Une séquence de mime stupéfiante. Catherine Legrand, elle, fait carrément revivre une séquence de la pièce Jours étranges de Dominique Bagouet pleine d'émotion


Entre-Temps- Philippe Decouflé - Photo: Jean Vermeulen


Les mouvements d'ensemble vont autant chercher dans la danse classique ou du côté de Trisha Brown, et l'esprit de Pina Bausch plane également sur des processions en avant ou à revers. D'ailleurs, après un changement de plateau où chaque interprète dispose d'un univers particulier - que ce soit Hitchkock (et sa douche) ou Little Nemo, et qui s'achève dans une danse avec des tutus en akènes, un brusque retournement de perspective nous surprend. Nous nous voyons comme en miroir derrière le fond de scène et devenons nos propres spectateurs. La scène bascule et le spectacle se passe comme à l'envers, l'arrière devient l'avant, nous revoyons le début du spectacle d'un nouveau point de vue. Et nous assistons à un balayage en accéléré du spectacle. Philippe Decouflé en maître du temps réactive pour nous un pan de l'histoire de la danse contemporaine et rajeunit ses interprètes, et nous aussi. Une énergie et une vigueur revitalise nos souvenirs et nos neurones sont boostés, nos corps sont vitaminés grâce à ce magicien du temps et du rythme. Un magnifique et vivifiant spectacle.


La Fleur du Dimanche


Entre-Temps - Philippe Decouflé 


Tournée 

Du 9 au 26 octobre 2025 - Paris (75) - La Villette

Du 7 au 9 janvier 2026 - Grenoble (38) - MC2:

Du 15 au 17 janvier 2026 - Annecy (74) - Bonlieu, scène nationale

Du 29 au 31 janvier 2026 - Antibes (06) - anthéa, Antipolis Théâtre d'Antibes

Du 25 au 28 février 2026 Clermont-Ferrand (63) - La Comédie de Clermont-Ferrand, scène nationale

Du 4 au 6 mars 2026 - Amiens (80) - Maison de la Culture d'Amiens

Du 25 au 29 mars 2026 - Caen (14) - Théâtre de Caen

Du 16 au 17 avril 2026 - Luxembourg - Les Théâtres de la Ville de Luxembourg


Conception et mise en scène Philippe Decouflé 
Assistante Violette Wanty 
De et avec Dominique Boivin, Meritxell Checa Esteban, Catherine Legrand, Eric Martin, Alexandra Naudet, Michèle Prélonge, Lisa Robert, Christophe Waksmann, Yan Raballand Au piano Gwendal Giguelay 
Et la participation d’un groupe de volontaires amateur·ices. 
Lumières et régie générale Begoña Garcia Navas 
Décor Jean Rabasse, assisté d'Aurélia Michelin 
Costumes Anatole Badiali 
Musiques Gwendal Giguelay, XtroniK, Sébastien Lagrange 
Montage des voix Alice Roland Régie plateau Léon Bony 
Régie lumière Grégory Vanheulle 
Régie son et bruitages Guillaume Duguet 
Accessoires Lahlou Benamirouche 
Construction Guillaume Troublé, Léon Bony, Matthieu Bony 
Costumiers Jean Malo, Jean Baptiste Arnaud-Coeuff, Aurélie Conti 
Accessoires costumes Eugénie Delorme, Prisca Razafindrakoto 
Peinture Katia Siebert, David Nouyrit, Sylvie Mitault, Margot Gillot, Jean Lynch 
Chauffeur Gilles Maron 
Direction de production et coordination Frank Piquard 
Production Sarah Bosquillon, Jérémy Kaeser, Julie Viala 
Régie générale Chaufferie Antoine Cherix 
Relations presse Agence Plan Bey

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