Et si le Paradis était une île, une île heureuse, Happy Island. C'est en partie le message que nous fait passer la chorégraphe, danseuse, performeuse, La Ribot avec ce spectacle. Elle l'a créé en 2018 avec la troupe Dançando com a Diferença qui, sous la direction artistique de Henrique Amoedo, travaille avec des personnes handicapées pour les intégrer dans des spectacles de danse professionnels. Ce spectacle, Happy Island, produit à Funchal sur l'île de Madère a déjà fait une tournée mondiale et est de nouveau présenté dans quelques pays européens*. Le spectacle est tout à fait bienvenu dans cette édition 2024 du Festival Passages Transfestival - Archipelago qui explore l'insularité.
Happy Island - La Ribot - Dançando com a Diferença - Photo: Caroline Morel Fontaine |
Pour se mettre dans l'ambiance, sur scène et plein écran, un film de Raquel Freire nous offre la paysage du versant nord de l'île de Madère avec ses arbres torturé, centenaires sinon millénaires, baignés dans le brouillard. Le vent en secoue les feuilles et les branches tandis qu'à droite de l'écran, une danseuse, le crâne rasé (Barbara Matos), agite une couronne faite de plumes colorées. Une femme léopard sur un fauteuil roulant arrive sur scène et se positionne exactement au milieu. Ses yeux noirs sous la frange de ses long cheveux noirs nous toisent.
Happy Island - La Ribot - Dançando com a Diferença |
On découvre que ses gestes sont saccadés et peu maîtrisés. Mais elle arrive cependant se mettre la coiffe que l'autre danseuse lui a apportée puis à descendre à terre, même si c'est difficile. Là, elle va même arriver à marquer de multiples traits de feutre noir le corps d'une autre danseuse dans un duo joyeux et ludique dans lequel cette deuxième danseuse exécute sur la scène toute une série de positions acrobatiques qui lui laissent le temps de se faire marquer le corps. La première danseuse, elle, marque l'espace de la scène en désignant des points de chute ou de repère, tandis qu'une autre (Sofia Marote) vêtue d'une robe rouge à volants traverse cette scène de temps en temps en poussant un grand cri.
Happy Island - La Ribot - Dançando com a Diferença |
Un jeune homme (Telmo Ferreira) portant des ronds comme des lunes, ponctue le ciel et apporte la lumière sur scène, et, pour la dernière partie du spectacle, carrément le soleil dans la salle, pour souligner et magnifier l'exploration du public (avec quelques câlins) et de la salle par la première danseuse.
Happy Island - La Ribot - Dançando com a Diferença |
Entre temps, sur l'écran cette forêt brumeuse s'est un peu ouverte, et toute une joyeuse tribu s'agglomère et se disperse, jouant quelques moments de tendresse et de complicité. Ils se retrouvent et se séparent à nouveau. Tout ces épisodes, sur l'écran et sur la scène, décalés mais non moins appliqués, nous plongent dans une sorte de rêve éveillé où, dans les brouillards d'un entre-deux, nous lévitons et naviguons entre rêve et réalité. Nous sommes presque dans un monde idéalisé, sous le soleil d'un paradis merveilleux et idéal. Nous ne nous posons plus la question de la normalité ou de la différence, pris, embarqués que nous sommes dans ces rituels qui nous happent et nous hypnotisent presque.
Happy Island - La Ribot - Dançando com a Diferença |
Une démarche de fraternité humaine que La Ribot a réussi a faire assumer à chacun(e) des protagonistes dans ses capacités, en totale réussite. Une belle démonstration par la chorégraphe qu'être à l'écoute de chacun dans sa différence lui permet de s'exprimer totalement avec plaisir et satisfaction et nous implique également dans cette ouverture et cette inclusion de manière très concrète.
La Fleur du Dimanche
* Après le Festival Passages Transfestival - Archipelago à Metz, Happy Island est présenté au Théâtre de Vidy - Lausanne les 21 et 22 mais 2024 et une autre pièce Ôss une création de la troupe Dançando com Diferença avec la chorégraphe Marlene Monteiro Freitas sera présentée le 25 et 26 mai 2024.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire