Avec Don Quichotte de Richard Strauss et la Symphonie Fantastique d'Hector Berlioz, l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg nous offre une monde musical coloré et varié, passionné et tourmenté.
Le choix du directeur artistique et musical de l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg, Aziz Shokhakimov de proposer dans une même programme la variation fantastique pour grand orchestre sur un thème chevaleresque, Don Quichotte (1998) de Richard Strauss et de la Symphonie Fantastique - Episode de la vie d'un artiste (1930) d'Hector Berlioz, peut surprendre. Mais c'est vrai que ce sont des oeuvres de relative jeunesse (pour Berlioz c'est sa première oeuvre symphonique) et, stylistiquement les deux compositeurs innovent dans l'écriture. D'ailleurs ce sont deux récits de quête, plus ou moins amoureuse, d'un amour problématique, qui tous les deux finissent par la mort du héros. Mort et passion, funèbre programme. Et même si la "Fantastique" est une symphonie, ce pourrait être un poème, tout comme le Don Quichotte qui lui se décompose en une série de variations qui décrivent dans des récits variés les différents épisodes de la vie du Chevalier Errant imaginé par Cervantes.
Don Quichotte - Richard Strauss - OPS - Aziz Skokhakimov - Pablo Ferrandez - Photo: Nicolas Rosès |
Ces "variations fantastiques" racontent en douze mouvements, plus une introduction et un finale, différents épisodes de la vie de ce héros, qui est représenté par le violoncelle - magnifiquement joué par le soliste espagnol Pablo Ferrandez avec une grande délicatesse sur un Stradivarius "Archinto" de 1689. Son complice Sancho Pança est évoqué à la fois par le clarinette basse, le tuba, et l'alto solo (Yongbeom Kim) avec des motifs colorés et malicieux qui arrivent dès la deuxième partie de l'introduction. On y passe en revue l'histoire des moulins à vents - avec des pizzicati et des effets de vents par des archets rapides - les moutons et leurs bêlements sont bien rendu dans la deuxième variation, tout comme la procession des pèlerins ou les combats avec le chevalier dans la dixième. La délicatesse du voyage dans les airs berce la chevauchée dans les airs (7ème variation) et dans la 8ème avec l'aventure des esprits enchantés, ce sont des effets mystérieux des bois et des percussions qui nous surprennent. Et la mort de Don Quichotte est traitée par des motifs longs et soutenus joués par les cordes et les cuivres. Le public bisse longuement et Pablo Ferrandez lui offre une courte mais inspirée élégie en rappel.
OPS - Aziz Shokhakimov - Pablo Ferrandez - Richard Strauss - Don Quichotte - Photo: lfdd |
Don Quichotte - Richard Strauss - OPS - Aziz Skokhakimov - Pablo Ferrandez - Photo: Nicolas Rosès |
Après un entracte, le plat de résistance qu'est la Symphonie fantastique se déploie en cinq tableaux qui installent chacun une atmosphère différente des cinq étapes de l'amour désespéré d'un jeune musicien (c'est très autobiographique, Berlioz étant tombé amoureux d'un actrice anglaise qui lui a donné du fil à retordre). Tout commence par une Rêverie et Passion avec les cordes qui voyagent doucement vers les songes avant de s'enflammer dans un bel univers vibratile.
Hector Berlioz - Symphonie Fantastique - OPS - Aziz Skokhakimov - Photo: Nicolas Rosès |
Aziz Shokhakimov mène le train avec doigté mais sait aussi y mettre l'énergie au bon moment. La deuxième partie, Un bal, commence très délicatement pour s'engager dans une élégante valse à trois temps puis se développer dans une ambiance festive et joyeuse, qui cependant s'emballe et monte en tension en tourbillonnant.
Hector Berlioz - Symphonie Fantastique - OPS - Aziz Skokhakimov - Photo: Nicolas Rosès |
La troisième partie, la Scène des champs commence par un duo de cors anglais, représentant un duo de paysans dialoguant un ranz des vaches dans une belle douceur, douceur qui va s'envoler comme l'un des bergers et laisser place à de plus sombres presages avec des cordes bien graves et l'air du cor solitaire et des roulements de tambour. S'ensuit la Marche au supplice, marche funèbre dramatique, alternant des pas lourds et des cuivres puissants qui nous entrainent sans répit vers la chute finale.
Hector Berlioz - Symphonie Fantastique - OPS - Aziz Skokhakimov - Photo: Nicolas Rosès |
Et nous plongeons dans le Songe d'une nuit nuit du sabbat avec le grincement et ricanements des bois, les cloches qui résonnent de funeste manière et la parodies macabre du Dies Irae qui nous plongent en cercles concentriques et de plus en plus sombres et graves jusqu'à l'accélération finale qui débouche sur une énorme explosion.
OPS - Aziz Shokhakimov - Hector Berlioz - Symphonie Fantastique - Photo: lfdd |
Le public conquis exulte et se voit gratifier d'un généreux bis.
Le Fleur du Dimanche
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire