samedi 23 novembre 2019

ESPÆCE pour un nouvel espace ouvert à tout et à tous au Maillon à Strasbourg

Il y avait à manger pour la pendaison de la crémaillère du nouveau bâtiment du Théâtre du Maillon de Strasbourg au Wacken. Il y avait du (beau) monde aussi.
Les "officiels" de la Ville, de l'Etat, de la Région (qui théoriquement n'avaient qu'à "traverser la rue"), les équipes de de la Ville et du Maillon et la directrice Barbara Engelhardt et le président Michel Reinhardt, qui se félicitaient de ce gigantesque - et encore inachevé - chantier, et surtout d'avoir rendu possible cet impossible, ouvrir une salle, un espace, au sens littéral du terme, au défi de l'ensemble des contextes et péripéties. La première en non des moindres, révélée par Umberto Napolitano du duo d'architecte à l'origine du studio LAN  (Local Architecture Network) avec Benoit Jallon qui ont remporté le concours - étant la franche opposition de toute l'équipe du Maillon de quitter le lieu - transitoire du Hall du Wacken. Parions que plus d'un se fera cette remarque.


Le théâtre du Maillon - Strasbourg - Pendaison de crémaillère - Photo: lfdd


Mais il faut dire que le nouvel outil demande à être exploré et, comme l'a également demandé Umberto Napolitano, poussé à ses limites d'utilisation pour inventer le théâtre de demain...
Le lieu réserve des surprises et la foule qui s'y pressait n'en a pas pu faire le tour, d'abord dans ce hall immensément haut et, à priori modulable - des cloisons cachent des recoins, à l'image de cette longue pièce avec des dizaines de téléviseurs pour l'exposition de Mats Staub "Memories of growing up":


21 – Memories of Growing Up (Trailer) from mats staub on Vimeo.

Ou encore cette "rue" dont parlait l'architecte et dont on hésite à demander l'adresse au "comptoir d'embarquement" qui se révèle être un "bar" en longueur qui se transforme en "guichet" et que l'on découvre, caché derrière la foule et les murs mobiles pour aller explorer l'espace et voir la bien nommée pièce d'Aurélien Bory "ESPÆCE"



Basée sur le texte de Georges Perec, les comédiens, danseurs, chanteurs et manipulateurs vont en faire une "lecture silencieuse" et appliquée. En explorer les limites aussi dès lors qu'ils essaient à un moment de le remplir à tout prix par des gesticulations ou en plaquant des fantômes de traces, de corps ou de lettres sur un écran.



Le Maillon Strasbourg - ESPÆCE  - Aurélien Bory - Photo: lfdd

Mais la magie fonctionne avec très peu de choses, celle d'écrire par un très beau procédé de transformation des livres, de l'oppression de l'écrasement, du vertige transmis à la salle, ou d'un univers à la M. C. Escher reconstitué de couloirs et de portes.
Le vertige en appelle au tournis et au risque de se cogner.
Les artistes nous rendent l'espace merveilleux et l'on se dit comme Perec que nous devrions remplir cette page blanche qui pourrait être le mot de la fin avec des "Travaux pratiques" comme celui-ci, que l'on pourrait aussi faire dans le Hall du Maillon, en attendant le spectacle...


Le Maillon Strasbourg - ESPÆCE  - Aurélien Bory - Photo: lfdd


"Observer la rue, de temps en temps, peut-être avec un souci un peu systématique.
S'appliquer. Prendre son temps.
Noter le lieu : la terrasse d'un café près du carrefour Bac-Saint-Germain
           l'heure  : sept heures du soir
           la date  15 mai 1973
           le temps : beau fixe
Noter ce que l'on voit. Ce qui se passe de notable. Sait-on voir ce qui est notable ? Y a-t-il quelque chose qui nous frappe ?
Rien ne nous frappe. Nous ne savons pas voir.

Il faut y aller plus doucement, presque bêtement. Se forcer à écrire ce qui n'a pas d'intérêt, ce qui est le plus évident, le plus commun, le plus terne"


La Fleur du Dimanche 

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