Pour le lancement de la 39ème édition du Festival JAZZDOR, qui est aussi sa dernière saison à la direction du festival, Philippe Ochem réalise un coup de maître: Rassembler au Palais de la Musique et des Congrès de Strasbourg l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg sous la direction de Wayne Marshall, le pianiste et chef anglais spécialisé dans la musique des Etats-Unis du XXème siècle et le Paul Lay trio. Le pianiste Paul Lay, considéré comme un des plus grands pianistes de sa génération, a orchestré avec Philippe Maniez les pièces de Gershwin, jouées en première partie, en particulier la célébrissime Rhapsody in Blue dans la version de 1942 (la troisième version pour grand orchestre). Le programme est alléchant: outre Gershwin, nous trouvons aussi Kurt Weill et Leonard Bernstein et tout cela attire du monde. La salle Erasme est pleine, un succès, et le public attend avec impatience le début du concert.
JAZZDOR - OPS - Paul Lay - Photo: Teona Goreci |
Ce n'est pas le célèbre glissando à la clarinette qui introduit Rhapsody in Blue (qui n'était d'ailleurs pas dans la partition originelle de Gershwin) qui ouvre la soirée, mais deux standards de Gershwin, Nice work if you can get it et It ain't necessarily so, également orchestrés par Paul Lay qui donnent au trio l'honneur de lancer la bal - et le rythme. C'est donc sur une belle dynamique et une énergie entraînante que le trio composé autour de Paul Lay par Donald Kontomanou à la batterie, précis et discret et Clemens van de Feen à la contrebasse subtil et énergique se lance.
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Paul Lay au piano, dans son habit scintillant, a un jeu vraiment virtuose et énergique, et ils partent sur un rythme entrainant repris avec fougue par l'orchestre. Le deuxième standard, extrait de Porgy and Bess, est plus lent et plus bluesy. Avec Rhapsody in Blue, l'orchestre et les solistes, en particulier la clarinette et les deux saxophones peuvent exprimer tous leurs talents de jeu jazzistique et d'improvisation.
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Wayne Marshall apporte toute sa grâce à diriger avec empathie et précision,, mais aussi une grande sensibilité ce chef-d'oeuvre qui fait le pont entre la musique savante et la musique populaire.
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Il laisse la bride sur le cou du pianiste et du trio qui insuffle un esprit de liberté à cette partition dynamique et dansante. Il y a de la puissance, de l'emphase, des changements de rythme et un subtil et intelligent dialogue entre le trio et l'orchestre. Le chef Wayne Marshall y amène toute sa sensibilité et son sens de l'équilibre, laissant et l'orchestre et les solistes ou le trio prendre les rênes de cette pièce vivante, pleine d'entrain et d'allant, de rythme et d'énergie.
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Un vrai plaisir. Le public ne s'y trompe pas qui gratifie les musiciens d'applaudissements nourris. Ceux-ci en retour offrent un magnifique Summertime tout en douceur où le chef se permet une incursion au piano et tous deux nous offrent une très belle improvisation à deux puis à quatre mais avant de redonner la main à l'orchestre. Un second bis de Paul Lay nous prouve si c'était encore nécessaire qu'il maîtrise cette Rhapsodie dont il nous interprète une variation piano jazz solo décalée.
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Pour la deuxième partie, nous avons droit à une pièce de Kurt Weill qui a été créée à New York en 1949 à partir de sa comédie Musicale Woman in the Dark présentée à Brodway en 1941. Elle est constituée de six mouvements variés, très divers, passant de moments calmes et sereins ponctués de quelques coups d'éclats à des passages dignes de fanfares ou de musique festive ou martiale et même un discret boléro ou une danse sautillante et encore des airs qui pourraient être une musique de film. L'orchestre, qui joue maintenant sans le trio jazz amène toute sa vie et son énergie sous la direction du chef qui module en finesse le jeu des musiciens.
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Et pour finir, la suite de Ballet Fancy Free de Leonard Bernstein pour un ballet de Jerome Robbins (celui de West Side Story) créé en 1944. L'argument est la rencontre dans un bar (à marins) de trois marins et de deux filles et une battle de danse (déjà à l'époque) pour conquérir le coeur des filles (celui qui perd devra se retirer). Nous avons donc ici une pièce enjouée, dansante (avec les trois variations - le Galop, la Valse et Danzon) avec une série de changements de rythme, d'ambiance, du suspense, des envolées, des collisions et des collages mais surtout une très belle dynamique et un piano bastringue presque rétro très présent. Une très belle pièce qui conclut cette soirée qui voit avec succès se répondre la tradition et la modernité, le jazz et le classique par delà les ans et les océans.
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En tout cas une très belle ouverture de festival et un beau succès.
La Fleur du Dimanche