Il ne faut pas essayer de vouloir définir Marc Oosterhoff, et son travail. Il le dit lui-même: "Si on me demande si je suis danseur ou si je suis circassien ou si je suis comédien ou si je suis performeur... Le plus vague je peux rester, le mieux je me porte." Et il a totalement raison, car il est à la fois tout cela et en plus il est totalement vague et indéfinissable. Dans la pièce Préparation pour un miracle au Maillon, il porte son personnage, presque transparent, enfin il le veut ainsi, vague au point de disparaître, avec une désinvolture surprenante, mais en même temps il est partout, au point que l'on se demande s'il est bien seul en scène pendant une bonne heure de bonheur.
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Préparation pour un miracle - Marc Oosterhoff - Photo: Grégoire Chollet |
D'ailleurs, au début du spectacle, c'est bien son double qui est là, dans une benne. Et quand il apparaît lui, ce ne n'est pas pour occuper le plateau, c'est plutôt pour essayer de le vider de sa présence et de disparaître. Non pas disparaître comme par miracle, mais ne pas être vu du public, partir, s'enfuir ostensiblement. Et quand il est là, se fondre avec le décor, le fond de la scène.
Et c'est là à la fois tout l'intérêt et la tension de la pièce qui se construit et se tend tout au long. Mais en réalité, c'est l'espace scénique, et les accessoires - rares mais efficaces - qui instillent cette atmosphère de tension dramatique et de suspense. Marc Oosterhoff a cette capacité à vider l'espace et à concentrer l'attention, comme avec une lorgnette, sur d'infimes détails et de nous faire perdre les repères. Il faut noter le remarquable travail sur les lumières qui sont un élément dramatique à elles toutes seules.
Par ailleurs, et c'est toute la magie de cette performance, Marc Oosterhoff a un don d'ubiquité phénoménal - ou peut-être est-ce le plateau du Maillon qui est magique avec des tunnels d'espace-temps que nous ignorions. Parce que le plateau - et certains accessoires sont vraiment "hantés". Les portes, les couloirs, les rideaux et les cintres nous font faire l'expérience de la quatrième dimension - qui va quelquefois chercher du côté de Kafka ou de la tour de Babel ou du chateau de cartes.
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Préparation pour un miracle - Marc Oosterhoff - Photo: Grégoire Chollet |
Marc Oosterhoff, oscillant entre Chaplin et Buster Keaton nous surprend par cette attitude détachée et timide et ses exploits physiques et ses surprises visuelles en totale rupture nous font balancer en équilibre instable et nous font douter de nos sens et de nos perceptions. Il s'appuie sur la base du théâtre - une "servante" rétive qui devient un véritable personnage pour échafauder une construction théâtrale spectaculaire dont je vous laisse la surprise jusqu'à un envol lyrique:
"Je veux vivre
Dans le rêve qui m'enivre."
Et nous aussi, nous avons vécu le rêve.
La Fleur du Dimanche
La Fleur du Dimanche