mardi 23 novembre 2021

Robyn Orlin à Pôle Sud: La roue tourne dans/sur la tête et la danse est colorée

 Ce qui frappe dès le début du dernier spectacle de Robyn Orlin, We wear our wheels with pride... ("Nous portons nos roues avec fierté et nous colorons vos rues… nous avons dit “bonjour” à Satan en 1820" comme le dit le titre intégral) donné à Pôle Sud, c'est que les danseurs (et par là également Robyn Orlin) ne nous laissent pas tranquillement dans nos fauteuils.  

We wear our wheels with pride - Robyn Orlin - Pôle Sud

Un petit clin d'oeil à la technique pour ne pas faire le noir dans la salle, une complicité qui s'établit entre les sept plus un(e) danseur.euse.s qui va jouer de plus en plus tout au long du spectacle avec des apostrophes ou de longues tirades et des récits (en anglais) qui seront à destination de la salle. Chacune et chacun (se) raconte son histoire et essaie de faire bouger le public (un balancement va-et-vient d'avant en arrière pour expérimenter le mouvement du rickshaw, ce moyen de transport, également instrument de domination et de ségrégation du colonialisme) ou le faire chanter ou frapper dans les mains pour l'entraîner sur le trajet de cette prise de conscience d'une ségrégation presqu'oubliée. 


We wear our wheels with pride - Robyn Orlin - Pôle Sud

Mais le discours, et le résultat n'est pas triste: les moyens et les techniques nous en mettent plein les yeux: Les chants nous envoutent - magnifique prestation de la chanteuse Anelisa Stuurman dont les capacités de la voix (double au moins) sont soutenues par une technique sonore impeccable et les multiples instruments (guitare, basse, percussion et électronique) de Yogin Sullaphen - les costumes chatoyants et colorés de Birgit Neppl, même les shorts, bermudas, survêtements et maillots sont colorés, sans compter sur les magnifiques tissus, portés ou posés à terre comme fonds de couleur. Et ces fonds sont superbement travaillés à la vidéo par Eric Perroys, passant rapidement du noir et blanc du début à un foisonnement coloré en fonds de scène sur l'écran qui reprend les images soit vues du dessus, soit de face ou encore du banc-titre foisonnant de tissus et de bordures lors de la présentation des "Masques", ces parures personnalisées que chacun des danseurs s'est attribué, à l'image de ces "chauffeurs" qui se servaient de leurs pieds et étaient déguisés, bariolés et masques pour transporter les blancs à l'époque (Le spectacle leur est dédié et Robyn Orlin note qu'il dépassaient rarement les 35 ans.).


We wear our wheels with pride - Robyn Orlin - Pôle Sud


Le spectacle nous en met plein la vue, dans un rythme endiablé, et un foisonnement de couleurs, renforcé par l'image projetée, elle-même jouant de l'écho, du ralenti et de la démultiplication. La chorégraphie est dynamique, les danseurs et danseuses (Sunnyboy Motau, Oscar Buthelezi, Eugene Mashiane, Lesego Dihemo, Sbusiso Gumede et Teboho Letele) alternent entre mouvements d'ensemble bien denses et solos qui ressemblent à des battles avec pose finale immortalisée à l'écran. S'y rajoute toute l'agitation sur la barre couverte de boites de boissons multicolores, comme un guidon géant sur lequel on fait des acrobaties ou on joue à la balançoire.


We wear our wheels with pride - Robyn Orlin - Pôle Sud

C'est un spectacle complet: ça bouge, ça  danse, ça chante, ça parle, ça raconte des histoires, ça s'agite, ça éblouit, ça plait, preuve que l'engagement politique n'est pas forcément triste, il peut être joyeux et vivant.


La Fleur du Dimanche 


We wear our wheels with pride - Robyn Orlin - Pôle Sud

Du 23 au 25 novembre

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