La soirée de concert de l'OPS - Orchestre Philharmonique de Strasbourg met au programme trois oeuvres qui marquent un renouvellement de la musique de leur époque, de magnifiques morceaux, on peut dire chefs-d'oeuvres, de leurs auteur, connus mondialement - et même ayant fait le voyage sur la Lune pour ce qui est de la Symphonie du Nouveau Monde d'Antonin Dvorak (avec Neil Armstrong en 1969).
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Arabella Steinbacher - Brahms - Photo: lfdd |
Pour bien profiter du concert, l'OPS a eu la bonne idée d'organiser des "conférences d'avant-concert" et celle du jour est présentée par Daniel Payot, professeur émérite en philosophie de l'Art à l'Université de Strasbourg, qui présente le Concerto pour violon et orchestre de Brahms. En 45 minutes bien remplies, il nous offre la biographie de Brahms et son oeuvre, son positionnement par rapport à la personnalité de Beethoven (qui lui aussi a écrit neuf symphonies et un concerto pour violon, lourd héritage à assumer), puis s'intéresse plus précisément à l'oeuvre en présentant le contexte, le dédicataire: le violoniste et compositeur Joseph Joachim, ainsi que des analyses de trois critiques éclairées sur la pièce. Il analyse les trois mouvements - avec écoute d'extraits éclairants - en rendant attentif à certains aspects de composition ou des références, par exemple les "cadences" dans le 1er mouvement, laissées au libre choix des solistes (la plus connue, celle du dédicataire que la soliste Arabella Steinbacher va également jouer, et la vingtaine d'autres), le dialogue hautbois-violon du deuxième mouvement, avec une intervention du hautbois un peu longue avant le violon, qui a servi de prétexte à un violoniste célèbre de refuser d'inscrire la pièce à son répertoire, et, pour le troisième mouvement, la tonalité hongroise de la composition. Le public, très nombreux, a apprécié les explications.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Weber - Photo: lfdd |
Pour les mettre en pratique dans la salle de concert où l'on commençait avec une courte pièce de Carl Maria Von Weber, l'Ouverture d'Obéron (1824) cet opéra romantique basé à la fois sur Shakespeare (Le songe d'une nuit d'été) et le poème épique Obéron de Christophe Martin Wieland. Une pièce changeante, où les cors alternent avec la légèreté des violons et le rythme aérien de danse varie avec le ton grave des vents.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Arabella Steinbacher - Brahms - Photo: lfdd |
Pour la pièce de Brahms le Concerto pour violon et orchestre en ré majeur op.77 (1878), ce sont aussi les cors qui démarrent la partie, puis l'orchestre, laissant un temps à la soliste pour intervenir, rejointe par la flute. De temps en temps, le hautbois reprend aussi avec délicatesse certains passages doux et posés. Suit un magnifique dialogue entre le violon solo, magnifique et totalement engagée Arabella Steinbacher, où l'une et les autres font symbiose et se soutiennent mutuellement. On sent qu'elle donne à l'orchestre le relais et qu'elle est totalement imprégnée dans la musique. C'est flagrant pour ladite "cadence" très intériorisée mais aussi très énergique et virtuose et où elle passe le relais à la fin dans une délicate et presqu'imperceptible suspension intime haut perché.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Arabella Steinbacher - Brahms - Photo: lfdd |
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Arabella Steinbacher - Brahms - Photo: lfdd |
L'Adagio démarre par les vents et surtout par une longue introduction du thème par le hautbois, mais l'ensemble du mouvement sera une longue et tendre sérénade où se répondent intelligemment le violon et le hautbois de Sébastien Giot en soliste.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Arabella Steinbacher - Brahms - Photo: lfdd |
Le troisième mouvement, l'Allegro giocoso, non troppo vivace est l'occasion de reprendre le dialogue entre les vents, les cordes, et la soliste dans une formidable atmosphère hongroise, avec des danses endiablées et des coups d'archets énergiques qui nous font trépigner dans nos fauteuils. Les changements de rythmes ne nous laissent pas de répit et la fête tzigane est réellement présente sous nos yeux, éxubérante et joyeuse. Un bel élan pour l'automne. Cela n'a pas déplu au public dont les applaudissements ont bien mérité le bis qu'Arabella Steinbacher leur a offert, en l'occurrence une très sensible et émouvante pièce de Bach, une Chaconne. Un magnifique cadeau.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Arabella Steinbacher - Bis - Bach - Photo: lfdd
Pour la suite du programme, après l'entracte, la très connue Symphonie du Nouveau Monde de Dvorak (1893). C'est une pièce qu'il a composée à New York quand une riche mécène, Jeannette Thurber, l'avait embauchée pour diriger le conservatoire National de New York et elle compte pour être la première symphonie des Etats-Unis.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Dvorak - Photo: lfdd |
Elle a été reprise à de nombreuses occasions et de nombreux musiciens et chanteurs, dont Gainsbourg et Yves Simon et ses thèmes ont servi à nombre de mélodies, entre autres Le Seigneur des Anneaux. Et bien que d'inspiration "américaine" - entre autres le poème de William Longfellow "Le Chant de Hiawatha" qui conte des légendes indiennes, et son côté "musique de Western" qu'elle véhicule aujourd'hui, elle garde une inspiration très "bohémienne", référence au pays d'enfance de Dvorak, au Nord de Prague où est né le compositeur du temps de l'empire d'Autriche. La pièce est très rythmée et très dansante et démarre avec l'Allegro sur des airs qui ressemblent à des polkas, avec moult percussions (les timbales rythment souvent la pièce) et des alternances entre les vents - flutes et solos de clarinette de Sébastien Koebel - et des passages pleins d'énergie.
Orchestre Philharmonique de Strasbourg - Marko Letonja - Dvorak - Photo: lfdd |
Le Largo démarre avec une mélodie douce et nostalgique suivi d'une mélodie lancée par la flute et la clarinette reprise par l'orchestre, comme un murmure avant que le thème de l'adagio ne soit repris tout en lenteur. Suit le Scherzo, beaucoup plus énergique et dansant, parsemé de chants d'oiseaux. Il faut voir la douceur du chef, Marko Letonja, à emmener l'orchestre dans cette danse ensorcelante puis leur insuffler l'énergie molto vivace. L'Allegro con fuoco reprend avec puissance le premier mouvement pour arriver à une chevauchée fantastique. S'immisce un air bucolique à la clarinette qui nous entraine dans une promenade champêtre. Pour finir dans un climax d'énergie où le thème est poussé à son paroxysme.
La Fleur du Dimanche
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