lundi 12 juin 2017

La traversée des éphémères, des roses et des papillons

Connaissez-vous Pierre Bergounioux? Et Loris Gréaud? Et savez-vous ce qui les relie?
Et les éphémères, les papillons, les fleurs, les roses?
Comme d'habitude, dirais-je les liens se tissent comme l'araignée sa toile.
Mais place à la Fleur:


Fleurs oranges - Photo: lfdd


Tout a commencé un article sur Pierre Bergounioux intitulé "Aux aguets" dans le Monde des Livre. A l'occasion d'un coffret avec un film de Geoffrey Lachassagne, "La Capture, en compagnie de Pierre Bergougnioux", de son livre "Le Grand Sylvain" et d'un entretien de Pierre Bergougnioux avec Marie Richieux sur France Culture, il parle de la chasse aux insectes et du travail sur les mots:
"S'il fallait rassembler sous un même vocable ces deux activités aussi hétéroclites et disparates, je me servirai d'un mot: le mystère. Il y a des liens occultes entre ces activités, de prime abord peu compatibles, qui consistent, par l'une, à rester à une table avec un crayon dont on fait crisser la point sur le papier, et par l'autre, à effectuer des courses échevelées dans la mouille et la pluie pour mettre la main sur une créature dont l'espérance de vie est extraordinairement brève."*  
Vous avez compris que Pierre Bergounioux est très intéressé par les insectes... Il ajoute ailleurs:
"Je suis extrèmement vulnérable. Une lucarne me pince, le sang commence à pisser. Mon squelette est dedans, celui d'un insecte est dehors, il est cuirassé, et combine de fois n'ais-je rêvé d'être vêtu d'une telle cuirasse, lorsque je vivais des choses dangereuses!" 


Fleurs oranges - Photo: lfdd


Pour finir sur les insectes et passer à autre chose, un extrait du livre Le grand Sylvain:
"Les insectes, il ne suffit pas, plus tard, de se fatiguer à leur remettre la main dessus. Quand on les tient, qu'on leur a soutiré la quantité de mouvement qui leur était départie, il faut encore en faire évaporer les liqueurs, les exposer dans un certain temps à l'air avant de les enfermer dans la boite vitrée. C'est à ce prix qu'on les aura vraiment, qu'on les oubliera. Mon correspondant s'était contenté de jeter ses trouvailles dans un carton où les mortes avaient commencé à fermenter. Quelques survivantes s'agitaient faiblement et le colis émettait un crissement suspect. Je ne l'avais pas ouvert que j'avais deviné. Au noir fumet se mêlait l'odeur fine, très ténue, indéniable d'une rose qui se serait réduite à son parfum et j'ai trouvé, dans le charnier, une Anomie musquée."


Fleurs oranges - Photo: lfdd


Et voilà Loris Gréaud, et Baudouin Jannink, et les éditions l'Art en écrit, et le Marché de la Poésie à Saint Germain qui a lieu ce week-End à Paris. Baudouin Jannink, éditeur de livres d'art - également de photographies, est présent, avec beaucoup de ce que le livre d'art et de poésie représente sur cette place que je vous conseille de visiter. Il a édité dans cette série l'Art en écrit pour son quatre-vingt-douzième titre le livre "Interzone" avec Loris Gréaud et dont l'oeuvre d'art est... Un papillon. En voici le N°64:


Loris Gréaud - Interzone - N° 64 - Editions Jannink

Loris Gréaud - Interzone - N° 64 - Editions Jannink

Le marché de la poésie nous renvoie - toujours dans le Monde des Livres à Franck Venaille, Prix Goncourt de la poésie 2017 avec qui s'entretient Eric Loret au sujet de son livre "Requiem de guerre", dans lequel il dit:
"J'ai décidé de mourir avant de naître. Sinon c'est impossible de continuer."
Dans l'entretien, Franck Venaille dit:
"Un livre, c'est toute une forêt qui se déplace et qui vient jusques à nos fenêtres pour dire: Qu'est-ce que tu as fait ces temps-ci, digne d'apparaître dans ton travail?" Parfois je m'interroge sur ma part de responsabilité, infime, dans la marche du monde et je me dis que peut-être je n'avais pas le droit d'écrire ce que j'ai écrit."....


Fleurs oranges - Photo: lfdd


Et après cela, comment ne pas penser à Albert Strickler, poète qui, comme Pierre Bergougnioux écrit son journal et dont le titre de celui de 2010 m'a servi d'amorce pour mon titre du jour. Je cite deux poèmes - qui résonnent avec ce que l'on vient de lire, il les a cité datés du 10 juin 2010, les voilà:

Laisse ton poème
Se poser sur la rose
Comme le papillon
Le plus léger

Laisse-le être
Lèvres du baiser
Sur la fontanelle
De l'enfant qu'on endort

Laisse-le fondre
Sur ses pétales
Comme la rosée
Et il restituera
Et son velours
Et son parfum



Fleurs oranges - Photo: lfdd


Et le deuxième:

Adieu

Le gravier qui crisse
Sous mes pas 
Est bien celui
Du congé qu'on prend

Un peu de lui ruisselle en moi
Mêlé à mon sang

Quelqu'un marche
Dans l'allée du cimetière
Avec la délicatesse
D'un fantôme qui retourne
A sa tombe.


Et pour clore, la parole à Rainer Maria Rilke** avec un poème de sa suite "Les Roses" écrites en 1924 et publiée après sa mort.

Tout ce qui nous émeut, tu le partages.
Mais ce qui t'arrive, nous l'ignorons.
Il faudrait être cent papillons
Pour lire toutes tes pages.


Il y en a d'entre vous qui sont comme des dictionnaires;
ceux qui les cueillent
ont envie de faire relier toutes ces feuilles.
Moi, j'aime les roses épistolaires.


Fleurs oranges - Photo: lfdd

Pour les amateurs de chansons, je vous en propose un trio, en remontant le temps:

Pour commencer, Emilie Simon - Papillon:


"Je t'attends 
Tu te poses dans ma serre 
Sur une rose 
C'est pourtant peu de chose 
Qu'une rose dans une serre .." 


Et puis le père me Mathieu, Louis Chedid qui chante Papillon en 1979: 


La vie c'est comme les papillons, 
D'abord chenille dans son cocon, 
Et puis un beau jour sortir du coton, 
Se retrouver en plein soleil, 
Bâiller en déployant ses ailes, 
Et s'envoler 
Comme les papillons. 
Trois petits tours et puis partir, 
Car papillon jamais revenir. 

Papillon du jour, toujours l'amour, 

Papillon du soir, toujours mouchoir.


Et enfin, en 1955, Annie Cordy et Michel Carmet qui chante en 1955 dans le film "Bonjour Sourire" - Jolie Fleur de Papillon:





"Au milieu de la surprise partie
Sans prévenir Grand-Père est parti
Mais il est revenu tout aussitôt
Avec un vieux phono
Et un superbe rouleau à musique
Qu'il a posé sur la mécanique

En nous disant ""Ecoutez mes agneaux, 
Ecoutez comme c'est beau"

Jolie fleur de pa pa pa
Jolie Fleur de papillon
Dit une voix dans l' pa pa pa
Dans le pavillon
Jolie fleur de pa pa pa
La voix semblait très émue
Elle le dira pa pa pa
Et n'en dit pas plus"

Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche


*Pour les éphémères, je vous renvoie à ma CP de VaLVAé (Carte Postale de Vacances à Laquelle Vous Avez échappé) du 27 août 2016 où vous trouverez un "cimetière d'éphémères":
Le champ des éphémères et la voix de l’éternité

** A propos de Rainer Maria Rilke, il apparaît jeune homme bien timide, mais quand même volontaire et amoureux de le film Lou Andreas Salomé de Cordula Kablitz-Post qui passe actuellement au cinéma.

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