dimanche 1 mai 2016

Premier mai: vive le muguet et l'agonisme - ou comment une philosophe belge et un philosophe US se rejoignent

Premier mai, un dimanche, jour doublement non travaillé, sauf pour la fleur du dimanche qui a trouvé matière à fleur, à réflexion et à chanson...

Bien sûr le traditionnel muguet ne déroge pas au premier dimanche du mois:


Muguet du 1er Mai - Photo: lfdd

Et je vais même aller à vous en offrir trois, des bouquets, avec Robert Desnos

Le muguet

Un bouquet de muguet,
Deux bouquets de muguet,
Au guet ! Au guet !
Mes amis, il m'en souviendrait,
Chaque printemps au premier Mai.
Trois bouquets de muguet,
Gai ! Gai !
Au premier Mai,
Franc bouquet de muguet.


Pour le TVA, je voulais, vu les circonstances, vous donner envie de lire, si jamais vous avez décidé de marcher. 
Et même si vous vous vous défilez, prenez le temps de creuser les deux articles qui pourraient sembler antagonistes de par l'origine de leurs auteurs.


Muguet du 1er Mai - Photo: lfdd

Obtenir un consensus en politique est, par principe, impossible. Car la politique, c’est justement, par définition, le domaine de l’antagonisme, du conflit

Dans une interview parue dans Libération du 15 avril 2016, la philosophe belge, Chantal Mouffe nous rend attentif à l'évolution du rapport à la politique (que beaucoup de personnes commencent à considérer comme très dégradée) et en propose une lecture que je vous soumet:
"La politique consiste à établir une frontière entre un «nous» et un «eux», et tout ordre politique est fondé sur une certaine forme d’exclusion. La réflexion sur la démocratie doit reconnaître l’antagonisme. Une politique démocratique doit établir les institutions qui permettent au conflit de ne pas s’exprimer sous la forme d’une confrontation ami-ennemi, mais sous la forme que j’appelle «agonistique»: une confrontation entre adversaires qui savent qu’il ne peut y avoir une solution rationnelle à leur conflit, mais qui reconnaissent le droit de leurs opposants à défendre leur point de vue. Si on nie l’antagonisme et qu’on n’essaie pas de lui donner une forme agonistique, il risque de se manifester sous la forme d’une confrontation entre des valeurs non plus politiques, mais morales et non négociables, ou sous des formes essentialisées de nature ethniques ou religieuses." 

Elle continue:
"L’idée postpolitique qu’il n’existe plus d’adversaire en politique conduit aujourd’hui à construire l’adversaire en termes religieux ou ethniques. Ce n’est plus right and left mais right and wrong. Si l’on construit la frontière de manière morale, le «mauvais» ne peut pas être un adversaire, il ne peut être qu’un ennemi."
...
"Il est nécessaire de radicaliser la démocratie. Mais je ne considère pas que cela requiert de rompre avec les institutions de la démocratie pluraliste. Il faut une critique immanente qui force nos sociétés à mettre en pratique les principes qu’elle prône : liberté et égalité pour tous. 
... Car nous vivons désormais dans un système postdémocratique: les procédures et institutions démocratiques continuent à exister, mais elles ont perdu leur sens car elles ne permettent pas aux citoyens d’exercer un véritable choix."


Le Philosophe "star" des américains... Michael Sandel

Du côté américain, le philosophe Michael Sandel semble partager par certains côtés cette vision. Il dit, entre autres, dans un article intitulé "Michael Sandel ou la critique de la raison libérale" de Sonya Faure et Anastasia Vécrin dans Libération du 26 avril 2016 

 «Je ne crois pas au "sujet désengagé" propre au discours libéral contemporain : l’individu serait purement rationnel et ne serait pas défini par ses liens d’appartenance. Je suis au contraire pour une compréhension située des jugements. Les communautés font partie de nos identités, ce qui ne veut pas dire qu’elles les fixent pour autant ou qu’il faille se replier sur des valeurs et des modes de vie. Alors que je veux justement encourager les débats moraux entre cultures.»
Je vous laisse lire la suite de ces articles en ligne et regarder les conférences de Michael Sander (plus de 190 700 vues sur Youtube) qui disait entre autre:

"Il peut être dangereux de faire entrer les valeurs dans le discours public - la majorité peut imposer à une minorité des valeurs que celle-ci ne partage pas, ou se tromper sur l’idée de la justice et de la "bonne vie" à mener. Mais la politique est immanquablement une activité risquée."

Muguet du 1er Mai et la rose jaune - Photo: lfdd


Mais il n'y a pas que la politique en ce premier mai, vous avez déjà eu un poème, je vous offre un bouquet de trois chansons pour finir.

La première, un "oldie", le "Joli moi de mai" avec Bourvil:





La deuxième, "oldie, également, une chanson sur le travail des Beatles:





La dernière, des Rakes, dont le titre Work Work Work pourrait se traduire par "métro, Boulot, Dodo", non ?




Et curieusement, ils rejoignent notre débat avec leur refrain:

"It's All These Words, Ideas And Different Arguments 
Someone's Always Talking When I Try To Make Some Sense 
From All This Stress That Is Constantly Going On 
I Just Drift Along With No Focus Or Meaning 
Lean Back, Stare Up At The Ceiling 
I Just Drift Along With No Focus Or Meaning"


Allez, levez-vous avec le muguet:


Muguet du 1er Mai - Photo: lfdd

Et bon débat, bon défilé, bon agonisme et...

Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

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