vendredi 25 décembre 2020

Entre le boeuf et l'âne, l'agneau et l'agnotologie, le Père Noël vous y croyez?

 Ane, agneau, agnotologie.... Quelle suite... Quelle question?

Mais tout d'abord Joyeux Noël à toutes et à tous, quelque soit votre foi, votre pays...

Et pour commencer, le sapin brûle:

Le sapin brûle - Photo: lfdd

Il brûle mais il illumine la nuit et comme le dit Victor Hugo:

"L'ignorance est la nuit qui commence l'abîme."

Victor Hugo - Les Quatre vents de l'esprit - 1881

L'ignorance, serait-ce une piste un peu trop suivie ces derniers temps?

"L'impression de savoir est bien plus dangereuse pour la connaissance que l'ignorance."
Gérald Bronner - Déchéance de rationalité, 2019

Quels que soient les progrès des connaissances humaines, il y aura toujours place pour l'ignorance et par suite pour le hasard et la probabilité."
Emile Borel - Le Hasard, 1914

Ne vous noyez pas dans le sapin liquide:

Sapin liquide - photo: lfdd



"Le principal fléau de l'humanité n'est pas l'ignorance, mais le refus de savoir."
Simone de Beauvoir

Un brin de connaissance fait reculer l'agnotologie - et... savez-vous ce qu'est l'agnotologie?
L’agnotologie est l'étude de la production culturelle de l'ignorance
Le terme est inspiré du mot grec ἀγνῶσις / agnôsis, « ne pas savoir ». Il a été inventé par l'historien des sciences Robert Proctor en 1992. Il a donné une visibilité nouvelle à un courant d'histoire des sciences, qui fait de l'ignorance elle-même un sujet d'étude.


Un brin de sapin - Photo: lfdd


Je vous mets ici ce qu'en dit Wikipedia:

Agnotologie comme étude de la production délibérée de l'ignorance

Plutôt que de demander, de manière classique, ce qu'est la science (question classique de l'épistémologie) ou quelles sont les conditions sociales et historiques de notre connaissance (question classique pour la sociologie et l'histoire des sciences), cet historien du tabac, de son Cancer Wars: How Politics Shapes What we Know and Don't Know About Cancer de 1995 au récent Golden Holocaust en passant par l’ouvrage collectif Agnotology, demande comment et pourquoi «nous ne savons pas ce que nous ne savons pas», alors même qu'une connaissance fiable et attestée est disponible. Selon cet auteur, l'agnotologie n'est pas seulement l'étude de l'ignorance, mais désigne aussi les pratiques qui permettent de la produire : 

« Cette notion englobe aussi la production culturelle d'ignorance — tout comme la biologie recouvre à la fois l'étude de la vie et la vie elle-même. Nous devons prendre conscience que l'ignorance n'est pas seulement un vide où verser du savoir, ni une frontière que la science n'a pas encore franchie. Il existe une sociologie de l'ignorance, une politique de l'ignorance; elle a une histoire et une géographie — et elle a surtout des origines et des alliés puissants. La fabrication de l'ignorance a joué un rôle important dans le succès de nombreuses industries ; car l'ignorance, c'est le pouvoir. » 

Il s'agit de voir l'ignorance non pas seulement comme une fatalité, ou comme une conséquence nécessaire des priorités de nos programmes de recherche, ou encore comme un échec partiel du système éducatif, comme le veut le modèle du « déficit » (deficit model), mais bien comme produite, que cette production soit intentionnelle ou non. Selon le premier volet, l'ignorance peut être créée de toutes pièces, par des stratégies de désinformation, de censure, ou bien entretenue par des stratégies de décrédibilisation de la science ou d'institutions scientifiques, par des acteurs individuels ou collectifs, qu'il s'agisse d'États, de fondations ou de groupes de pression. Formuler la question ainsi ouvre des perspectives inédites dans des domaines aussi divers que l’industrie du tabac, l'amiante, le réchauffement climatique, l’utilisation de certains plastiques, la migration des savoirs des colonies vers les métropoles, les perturbateurs endocriniens ou les cellules souches. 

Agnotologie comme étude de l'ignorance

L'agnotologie se réfère aussi à l'étude de l'ignorance dans un sens plus général. Dans son ouvrage, Robert Proctor distinguait deux autres catégories d'ignorance en plus de l'ignorance produite, à savoir l'ignorance comme une question posée et encore irrésolue, et l'ignorance qui résulte de l'absence d'étude d'un sujet. Dans le premier cas, l'ignorance peut être un moteur pour la recherche scientifique. Dans le second cas, elle n'est pas forcément due à une volonté délibérée d'ignorer mais peut découler de l'évolution des centres d'intérêt des chercheurs.


Et les méfaits de l'agnotologie (et de l'industrie du tabac)! 

L'agnotologie analyse les mécanismes cognitifs qui conduisent à la formation du doute dans la population, notamment les méthodes utilisées par les lobbies lorsque leurs intérêts sont menacés par des révélations scientifiques. C'est ainsi que l'industrie américaine du tabac a longtemps financé et mis en avant des "études" trompeuses sur de supposés bienfaits de la cigarette.
"On le sait moins, mais les entreprises du tabac ont aussi subventionné, avec des sommes considérables, de la très bonne recherche biomédicale, dans des domaines comme la virologie, la génétique, l'immunologie, par exemple. Plusieurs Prix Nobel ont eu leurs travaux financés ainsi. Mais cette recherche n'était suscitée qu'à des fins de documenter ce qui pouvait causer des maladies possiblement attribuables au tabac : lors des procès contre l'industrie, les avocats des industriels mettaient toujours en avant les risques viraux, les prédispositions familiales, etc., pour dédouaner la cigarette."
Robert Proctor cité par Le Monde - L'ignorance : des recettes pour la produire, l'entretenir, la diffuser - 3 juin 2011)

Et pour conclure - ou ouvrir le débat, un extrait d'une tribune d'Eva Illouz  - Croire à la science ou pas: la question qui pourrait décider de l’avenir du monde - parue dans le monde du 10 décembre 2020

Cette façon critique d’interroger le monde aboutit à ce que l’historien de la littérature John Farrell appelle une «imagination paranoïaque », qui est, selon lui, une des grandes figures de la modernité. Pour Farrell, l’individu moderne perd progressivement de son pouvoir sur son environnement et perçoit le monde comme indifférent ou même hostile à ses besoins, d’où l’émergence du doute systématique. Le résultat, nous dit-il, est qu’il n’est plus possible de trouver une autorité épistémique ou morale. C’est d’autant plus le cas qu’un pan entier de la pensée philosophique du XXe siècle a eu pour but de remettre en question la notion de vérité et le bienfondé – moral et épistémique – de la recherche de la vérité. Des générations  entières formées au foucaldisme ont appris que le savoir était une technique de pouvoir et sont devenues des virtuoses de la suspicion – malgré le désaveu de Michel Foucault pour toute méthodologie de la suspicion. Il avait éludé la question de l’intérêt, mais sa philosophie eut pour effet de faire de la science, au sein même de la communauté scientifique, une question de croyance, position intellectuelle qui ne pouvait que légitimer en retour le camp des non-croyants. Cette remise en question du savoir officiel s’est manifestée avec acuité pendant la crise sanitaire qui a exposé le spectacle des désaccords scientifiques, de la fragilité du consensus scientifique et du caractère construit de ses vérités.

SUBJECTIVATION DE LA VÉRITÉ

La critique du pouvoir, de l’autorité experte et de la science s’est adossée à un autre phénomène, lui aussi central à la culture du doute: le subjectivisme ou l’idée que chacun a le droit de définir sa vérité. Porter atteinte à la vision du réel tel que chacun le définit est devenu une atteinte à la personne elle-même. Cette subjectivation de la vérité a été le résultat conjugué du psychologisme, qui octroie à l’individu la légitimité de ses émotions et de ses interprétations du monde, et des valeurs du pluralisme et de la tolérance, apanage des démocraties qui se doivent de respecter les individus et leurs visions du monde, aussi idiosyncratiques soient-elles. Toutes ces perspectives – du doute, de la critique systématique, de la défiance des autorités, du respect de l’intériorité des individus — ont été centrales à la mise en place et au déploiement de la culture démocratique.


Pour terminer et pour vous demander si vous croyez à Pâques aux tisons et au Père Noël au balcon, un court métrage portugais de David Pinheiro Vicente: L'agneau de Dieu - passé sur Arte et visible encore quelques mois:

Si vous n'arrivez pas à le voir, c'est ici:

https://www.arte.tv/fr/videos/087387-000-A/l-agneau-de-dieu/


Et "Joyeux Noël" à toutes et à tous !

Bon, comme je parlais du doute, je vous offre en prime la chanson d'Anne Sylvestre qui nous a quitté "J'aime les gens qui doutent" interprétée par Loulou:



Et une autre chanson par une autre louloute: Lulu qui a commencé à chanter à 3 ans et qui, à 15 ans chante "Shout"



Vous allez être surpris, sept ans après elle chante... "The Man who sold the world" une chanson de David Bowie - qui l'accompagne sur ce disque:



Chanson qu'elle chante encore en 2012



Et elle a fait une tournée en 2019, 55 ans après la prestation du début:


Joyeux Noël et Bonne fin d'année

La Fleur du Dimanche 

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