jeudi 30 novembre 2023

Extra Life au Maillon: La vraie vie est dans l'ailleurs

 Avec Gisèle Vienne, nous vivons dans des mondes parallèle, entre le rêve et le fantastique. Sur l'immense scène du Maillon, au début d'Extra Life  alors que la lumière se fait très lentement, nous distinguons, à gauche, une voiture tous feux éteints. C'est à partir de là que les choses vont émerger et se transformer. Car il s'agit d'une sorte de long voyage cathartique, salutaire ? La lumière des phares traverse la scène et l'on distingue des signes de vie dans cet habitacle, sorte de boite de Pandore: des mains sortent des deux côté, l'une d'elle, côté conducteur, tient une cigarette. 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Un peu plus tard, le plafonnier s'éclaire, on voit deux jeunes, qui discutent et écoutent la radio. Une émission sur les phénomènes non expliqués et les visites d'extraterrestres oriente leur discussion. On devine que Clara et Felix sont frère et soeur. Ils parlent d'une soirée mémorable passée ensemble puis de leurs souvenirs communs, puis sur ce sujet des Alliens et des phénomènes de sommeil paradoxaux, dont, en particulier la "paralysie du sommeil" qui nous fait vivre des moments dont nous n'appréhendons pas vraiment la réalité. Ce sera le cas pour cette pièce où les choses et les événements vont se dérouler sous nos yeux sans que forcément nous puissions y mettre un sens ou une définition claire.


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Par exemple, dans cette atmosphère, sombre, avec des brumes qui avancent sur le sol, et l'environnement qui reste dans une obscurité profonde, un autre personnage -  double de Clara ? - arrive très lentement sur eux, provoque une déflagration et disparait. Sortis de l'habitacle, les corps bougent dans une lente chorégraphie, se plient et s'agenouillent à terre, signes de souffrance ou de désespoir. Les dialogues, co-écrits avec les protagonistes (Adèle Haennel, très convaincante dans ce rôle de soeur suicidaire qui essaie de s'en sortie et Theo Livesey en frère qui partage un évènement douloureux de leur jeunesse) révèlent les non-dits et les blessures cachées sous des paroles banales et célèbrent ce moment qu'ils viennent de vivre et qu'ils espèrent salvateur, mais, "Le principe d'un piège est qu'il ne se voit pas". Une marionnette, figurant l'enfance et les traumatismes vécus sert aussi de psychopompe et de figure de rite de réactivation (avec la scène du dessin animé dont la fin est occultée). 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


De même que le retour du troisième personnage, après une longue scène de danse encadrée, prisonnière de cadres de lumière laser qui délimitent au couteau l'espace. Ce personnage, tel un ange annonciateur ou le visiteur du film de Pasolini, Théorème, va être d'une certaine manière, révélateur pour la soeur et le frère d'une relation intime, jouée et rejouée (la fille de la fête), réelle ou fantasmée, qui en tout cas va bouleverser définitivement leur vie. 


Extra Life - Gisèle Vienne - Photo: Estelle Hanania


Et ils vont communier dans la musique qu'ils aiment et qui les enveloppe. Cette musique, en nappes et battements, de Caterina Barbieri qui contribue également à installer cette ambiance de rêve éveillé dans lequel nous a promenés pendant presque deux heures Gisèle Vienne avec son langage artistique très particulier.


La Fleur du Dimanche 

mercredi 29 novembre 2023

Into the open de Lisbeth Gruwez et Maarten Van Cauvenberghe à Pôle Sud: De l'énergie à l'état pur

 Nous connaissions déjà l'attachement de Lisbeth Gruwez à la musique. Elle qui dansait sur un disque de Bob Dylan en 2015  et qui, après Jan Fabre, avec qui elle avait créé la fabuleuse performance "Quando l'uomo principale è una donna" en 2004 (vu au Théâtre de la Ville bien avant le blog), a fondé sa troupe Voetvolk avec le musicien Maarten Van Cauwenberghe en 2006. C'est d'ailleurs avec lui qu'elle a créée sa pièce "It's going to get worse and worse and worse, my friend" en 2012 et puis We're pretty fuckin' far from okay en 2016.  


Lisbeth Gruwez -Maarten Van Cauwenberghe - Into the open - Photo: Danny Willems


La nouvelle pièce qu'elle nous propose à Pôle Sud, Into the open est toujours une collaboration avec Maarten Van Cauwenberghe, et même plus, puisque c'est sur les morceaux de musique qu'il a composé avec le groupe Dendermonde et qu'elle a créé la chorégraphie avec ses danseuses et ses danseurs. Le Covid est passé par là et l'on sent une rage et une énergie qui cherche à s'échapper, au dehors, au grand jour, dans une totale liberté, là où tout le monde était restreint, enfermé, avec des contacts interdits. Ici c'est tout l'opposé, on sent une énergie et une volonté de se toucher, de se retrouver les corps liés, entremêlés, les danseuses et les danseurs se cherchent - et se trouvent - d'un bord à l'autre du plateau, et forment des "ensembles", comme des tableaux vivants et changeants, mouvants. 


Lisbeth Gruwez -Maarten Van Cauwenberghe - Into the open - Photo: Danny Willems


En entrant dans la salle nous sommes déjà dans l'ambiance, comme avant un concert, la musique nous accueille à pleins tubes, les bouchons d'oreille étant dans la poche. Sur scène une estrade au fond avec tout l'attirail du batteur et de chaque côté deux podiums avec un micro au bout. Entre en scène nonchalamment, cigarette au bec, Misha Demoustier en blouson de cuir puis Artémis Stavridi en short de jean et long manteau rouge. Le batteur Frederik Heuvinck s'installe sur son podium et les autres danseuses, Celine Verkhoven dans un ensemble collant gris-noir pailleté d'étoiles et les long cheveux roux et Francesca Chiodi Lattini longs cheveux noirs apparaissent sur scène en rangeant leurs affaires. Le batteur envoie le rythme et les musiciens, le bassiste Maarten Van Cauwenberghe et le guitariste Elko Blijweert en short bermuda envoient la sauce. Le danseur et les danseuses scrutent le public et le fixent des yeux. Le courant passe et la musique pulse. 


Lisbeth Gruwez -Maarten Van Cauwenberghe - Into the open - Photo: Danny Willems


Le danseur et les danseuses, tout en mouvements saccadés, d'une incroyable souplesse et en énergie centrifuge, les bras, les jambes, les cheveux même, jaillissant puis se rassemblant à nouveau au corps, ou dans des ondulations de serpent caoutchouteux, puis dans des sauts et des rebondissements incroyables, tournoient sur scène, passent d'un bout à l'autre, d'un podium au tapis, chevauchant la grosse caisse ou le partenaire, s'enroulant autour de lui puis le lâchant pour un autre dans une ronde endiablée. Un énergie du diable qui diffuse dans la salle.


Lisbeth Gruwez -Maarten Van Cauwenberghe - Into the open - Photo: Danny Willems


De temps en temps, au gré de la musique qui change, une accalmie se fait, des ondulations plus lentes, des mouvements ralentis, comme des tableau presque figés apportent un instant de répit, mais de courte durée. Le pièces de vêtement volent et libèrent les corps, l'énergie de la rencontre, le contact physique cherché et trouvé célèbre les retrouvailles de l'incarnation. Et dans un superbe élan général, même les spectateurs dansant à corps perdus se retrouvent sur la scène pour célébrer les corps libérés. Une cérémonie presqu'orgiaque à la gloire de la musique brute et de la liberté des mouvements.


La Fleur du Dimanche

mardi 28 novembre 2023

Le Voyage dans l'Est au TNS: La parole pour contrer le silence

 Le Voyage dans l'Est est multiple et les étapes nombreuses et toutes apparemment aussi douloureuses les unes que les autres, sauf peut-être la (ou les) première(s) dans une innocence originelle. La pièce de Christine Angot qui porte ce titre, comme le livre, est mise en scène par Stanislas Nordey. Ce texte lui a "sauté à la figure" et il estime que c'est "une de ses plus belles oeuvres, une forme  d'accomplissement". Jugement que nous ne pouvons que partager après l'avoir vue, même si ce n'est pas du théâtre de format classique. Les multiples choix de mise en scène nous font, nous aussi faire ce "voyage". Voyage dans une région mais aussi et surtout voyage dans le souvenir. Et construction, reconstruction d'une histoire, reconstruction aussi d'une personne, en l'occurrence Christine Angot elle-même. Par ce geste littéraire autofictionnel, elle remet en place au fur et à mesure tous les éléments de ce vaste puzzle de la mémoire et nous le partage dans une enquête presque policière mais également intime et surtout engagée. Ce livre est un combat, personnel bien sûr mais qui arrive à un niveau universel, social et politique, un vrai combat contre la domination masculine profondément inscrite dans les habitudes, pas seulement des hommes mais aussi des femmes aujourd'hui encore.


Le Voyage dans l'Est - Christine Angot - Stanislas Nordey - Photo: Jean-Louis Fernandez


Mais c'est surtout une histoire personnelle qui nous est transmise, avec toute la sensibilité et les interrogations, les dits et les non-dits, les erreurs et les hésitations, les allers et les retours, les joies espérées et les douleurs insurmontables, inexprimables et non entendues ou niées qui jalonnent une vie, de jeune fille jusqu'après la soixantaine.


Le Voyage dans l'Est - Christine Angot - Stanislas Nordey - Photo: Jean-Louis Fernandez


Cécile Brune qui  joue magnifiquement et avec sobriété la narratrice et parcourt en démiurge la scène, arrive à nous incarner le personnage de Christine aujourd'hui - et même, dans une scène étonnante, Christine très jeune. L'intelligence de la mise en scène sans fioritures de Stanislas Nordey qui balance entre le récit et le jeu, entre diégèsis (narration) et mimésis (représentation) de manière totalement souple et rapide, fait basculer les mots, de la narration aux personnages, et ainsi, donne une bonne impulsion à ce texte romanesque. De Christine jeune, interprétée par Carla Audebaud, tout a fait crédible à ses deux âges (de 13 à 15 ans, avec un intelligent artifice de jeu, puis de 16 à 25 ans) ou, plus âgée, par Charline Grand (de 25 à 45 ans) qui semble plus dynamique, volontaire mais piégée quand même, ou du personnage du père, toujours impeccable Pierre-François Garel en séducteur surplombant, ou de Claude Duparfait, excellent en amant puis mari, aux autres personnages un peu plus fugaces incarnés par Julie Moreau (la mère, la journaliste, la comédienne,...) et Moanda Daddy Kamono (surtout Charly son dernier compagnon et autres rôles), le texte balance, fuse, rebondit et nous emporte dans cette exploration du souvenir.


Le Voyage dans l'Est - Christine Angot - Stanislas Nordey - Photo: Jean-Louis Fernandez


Le texte alterne entre la reconstruction des épisodes de cette longue descente aux enfers de la soumission, ponctuée d'étapes et marquée par des lieux - Strasbourg, la forêt, Reims, Paris, Le Touquet, La montagne, Tende,... Chaque station s'enfonce dans un degré de violence supérieur. Les description ne nous sont pas épargnées mais sans complaisance ou voyeurisme - et un recul nécessaire. Ce recul vient d'une part de la description de tout ce travail de souvenir, de mémoire, d'interrogations des témoins, surtout le mari - les autres niant et taisant la réalité des faits - et d'autre part de l'analyse, de l'essai de reconstitution de tous les sentiments et états d'esprit, ressentis lors de ces épreuves subies. 


Le Voyage dans l'Est - Christine Angot - Stanislas Nordey - Photo: Jean-Louis Fernandez


Ces événements révèlent la dissociation, la mise à distance subie, non voulue de la victime, et le curieux silence des témoins, leur négation et non intervention alors qu'ils pourraient faire cesser cela. Ces deux éléments conjugués enferment la victime dans un étau sans issue possible, même lors d'un ultime sursaut à 28 ans, à l'occasion d'une dernière possibilité d'appel à la justice. Mais là aussi, l'inertie, la lâcheté et l'enfouissement de la mémoire prennent le dessus. Ce qui nous vaut, à nous spectateurs passifs, une apostrophe salutaire, un dernier sursaut avant la constatation lucide du poids des traditions et des idées qui continuent de gouverner la société. Et de constater qu'on continue à laisser les femmes dans une "certaine mise en esclavage" et que nous gardons, "nous tous" un ton poli sous la chape de plomb du silence sur ce type de scandale qui détruit des vies entières.


Le Voyage dans l'Est - Christine Angot - Stanislas Nordey - Photo: Jean-Louis Fernandez


La scénographie (extension d'une précédente pièce, Au Bord où Cécile Brune incarnait aussi un personnage qui essaie de rentrer au fond de ses pensées sur une question de dignité) nous plonge dans un univers mental tout en personnifiant la pensée en marche . Le jeu de scène nous le rend à la fois lisible et nous y implique efficacement, tout en nous transportant dans ces espaces de transit où la pensée file comme un train dans le paysage (comme la voiture piège) dans les images de Jérémie Bernaert, ou en nous berçant au son du piano d'Ollivier Mellano joué par Barbara Dang. Mais nous devrions encore frissonner aux dernières paroles de la pièce "Tout s'est bien passé" qui viennent en écho à la première réponse de la mère, ce "Je sais" qui a cassé toute tentative de sortir de cette tragédie en germe. Tragédie qui pourrait aussi s'appeler "Le glaive et la balance". Une histoire lourde, pesante mais nécessaire et salutaire pour la protagoniste au premier chef, mais également pour nous pour prendre notre part de responsabilité.


La Fleur du Dimanche


Voyage dans l'Est


Création au TNS le 28 novembre 

Jusqu'au 8 décembre au TNS à Strasbourg - 

/!\ Attention à l'horaire: 19h00 sauf le 2 décembre 18h00 

Tournée Nanterre, Théâtre Nanterre-Amandiers - Centre dramatique national, du 1er au 15 mars

Texte
Christine Angot
Mise en scène
Stanislas Nordey
Collaboratrice artistique
Claire ingrid Cottanceau
Avec
Carla Audebaud − Christine 13-25 ans
Cécile Brune − Christine aujourd'hui
Claude Duparfait − Claude
Pierre-François Garel − Le père
Charline Grand − Christine 25-45 ans
Moanda Daddy Kamono − Charly et
autres personnages
Julie Moreau, − La mère et autres personnages,
en alternance les 6 et 7 déc avec
Claire ingrid Cottanceau
Scénographie
Emmanuel Clolus
Costumes
Anaïs Romand
Lumière
Stéphanie Daniel
Vidéo
Jérémie Bernaert
Cadre
Félicien Cottanceau
Musique
Olivier Mellano
Enregistrement piano
Barbara Dang
Le Voyage dans l’Est est publié par les éditions Flammarion, 2021.
Le texte a reçu le prix Médicis 2021 et le Prix Les Inrockuptibles 2021.
Les décors et les costumes sont réalisés par les ateliers du TNS.
Production Compagnie Nordey
Coproduction Théâtre National de Strasbourg
Avec le soutien du Jeune Théâtre National (JTN)
La Compagnie Nordey est conventionnée par le ministère de la Culture.
Remerciements au Théâtre Nanterre - Amandiers

samedi 25 novembre 2023

ST-ART à Strasbourg, c'est parti et bien parti, et dans la bonne direction

 Ne vous fiez pas à l'énorme sens interdit (mais il n'est pas seul) de Jean Pierre Raynaud qui vous accueille dans le Hall d'entrée de ST-ART dans le magnifique bâtiment  conçu par Kengo Kuma. ST-ART est parti dans la bonne direction cette année.

L'année dernière (voir mon billet St-Art Strasbourg 2022, une nouvelle vague?) nous nous interrogions sur la nouvelle impulsion donné à la Foire qui existe à Strasbourg depuis plus de 25 ans. Nous avions senti un changement de direction et cette année l'impulsion s'est vraiment concrétisée. Le retour de galeries strasbourgeoise, Alsaciennes et d'ailleurs - entre autre Guy Pieters qui était là au début. De nouvelles galeries, jeunes et moins jeunes, de nombreux pays représentées, en plus de la coréenne HAN, et une sélection intelligente du duo Rémi Bucciali et Georges Michel Kahn et l'engagement artistique et professionnel de Carole Schaller qui a eu tout le soutien de sa direction, en particulier de Christophe Caillaud-Joos, directeur de Strasbourg-events. Résultat: plus d'une soixantaine de galeries pour tous les goûts et également une forte implication avec le tissus local. Par exemple le focus sur les 150 ans de l'Association des Amis des Arts et des Musées de Strasbourg qui fêtent dignement ce anniversaire avec une exposition consacrée à la Belle Strasbourgeoise avec l'original entouré de nombreuses relectures d'artistes d'aujourd'hui.


Guernica - Ukraine - Picasso Raynaud à ST-ART - Strasbourg - Photo: lfdd


La SAAMS s'occupe également d'un programme de conférences autour de l'art et sa modernité (IA et NFT) mais également son implication dans la société, que ce soit avec le projet de L'Industrie Magnifique ou la formidable réponse de Jean Pierre Raynaud à l'Ukraine avec son oeuvre qui appelle à s'opposer à son l'invasion dans un dialogue avec l'Histoire et le geste artistique de Picasso pour soutenir les républicains espagnols après le bombardement de Guernica en 1937 (voir mon billet sur cette oeuvre ici:  11 novembre - 26 avril - 24 février - Guernica - Ukraine - Jean Pierre Raynaud - Y a-t-il un sens ?) dans le hall d'entrée du bâtiment. Ne ratez pas ce samedi à 15h30 (avant la conférence de 16h00 le dialogue de Geneviève Charras avec ces oeuvres dans une performance chantée et dansée Aphorismes Dansés avec Baudouin Jannink à l'origine du projet Guernica Ukraine qui lira quelques aphorismes de Jean Pierre Raynaud. 


Geneviève Charras - Aphorismes dansés: sans interdit en regard de Guernica Ukraine - Photo: lfdd


Le hall accueille également la lune de Luke Jerram que nous avions pu voir à la cathédrale et qui revoit le jour dans cette cathédrale de Kengo Kuma grâce à l'Industrie Magnifique. ST-ART sera d'ailleurs le lancement de la nouvelle édition 2025 par Jean Hansmaennel.


ST-ART - L'Industrie Magnifique - Lune - Luke Jerram - Photo: lfdd


Autre structure associative présente, Apollonia qui remontre ses photos en soutien à l'Iran et ses femmes ainsi que le projet Vital dont l'installation Moss qui vous fait prendre conscience de la pollution dans le monde entier.

Il y a aussi les associations de l'Art au delà du Regard qui rend les oeuvres d'Art accessibles aux malvoyants et l'ARAHM qui intervient dans le social. 

Et DEVALER est descendu de ses montagnes de la vallée de Sainte-Marie aux Mines pour rencontrer les citadins. On y trouve Michel Bedez et Christophe Urbain les instigateurs du projet ainsi que Christian Pion, Pascal Poirot et Val Pareiso, les locaux de l'étape ainsi que Stéphanie-Lucie Mathern, Christophe Meyer, Hervé Bohnert et d'autres.


ST-ART 2023 - Dévaler - Photo: lfdd


Descendue aussi de son tableau, La Belle Strasbourgeoise, fierté de la SAAMS visite le salon.


ST-ART 2023 - La Belle Strasbourgeoise - SAAMS - Photo: lfdd

Et chez Pol Lemetais, nous croisons Mina Mond devant Les Petits Papiers et la sculpture de Paul Amar:


ST-ART 2023 - Pol Lemetais - Mina Mond - Paul Amar - Photo: lfdd


Chez Audet, vous avez Miotte et les membres de COBRA, historique et coloré


ST-ART 2023 - Audet - Miotte - COBRA - Photo: lfdd



Chez Chantal Bamberger, les sculptures en tissu de Myrtille Béal et les tressages féministes (avec de l'humour - regardez de près) de Claudie Hunzinger.


ST-ART 2023 - Bamberger - Myrtille Béal - Photo: lfdd

ST-ART 2023 - Bamberger - Claudie Hunzinger - Photo: lfdd


Chez Rémi Bucciali de Colmar, il y a du R.E. Waydelich et du Bucciali, la fille, Alma dont le père tire au tarot le Mat! 

ST-ART 2023 - Remi Bucciali - R.E. Waydelich - Photo: lfdd

ST-ART 2023 - Remi Bucciali - Alma Bucciali  - Photo: lfdd



Et chez Descorde, il y a un mouton parmi les Dutilleul, mais aussi de beaux verres d'Olivier Godat et la fidèle Petra Werlé avec ses couples qu'elle a mis "sous verre":
 

ST-ART 2023 - Philippe Decorde - Philippe Dutilleul  - Photo: lfdd

ST-ART 2023 - Philippe Decorde - Olivier Godat  - Photo: lfdd

ST-ART 2023 - Philippe Decorde - Petra Werlé  - Photo: lfdd

Et chez Sandra Blum, un couple en admiration devant les petit et précis dessins sur porcelaine de Rose-Marie Lortet:


ST-ART 2023 - Sandra Blum - Rose-Marie Lortet  - Photo: lfdd


Rose-Marie Lortet qui est aussi à la Galerie Murmure de Colmar avec ses très petites sculptures en papier:


ST-ART 2023 - Murmure - Rose-Marie Lortet  - Photo: lfdd
 


Autre galerie du Haut-Rhin, la Galerie JustBee de Masevaux avec, entre autres Germain Roesz, Didier Guth et Petr Beranek et Claudine Leroy-Weil:


ST-ART 2023 - JustBEE - Didier Guth - Petr Beranek  - Photo: lfdd

ST-ART 2023 - JustBEE - Germain Roesz - Petr Beranek  - Photo: lfdd


Et à Strasbourg, la Galerie AEDAEN avec les photos de Francesca Gariti, Life after life, ces pierre tombales sur lesquelles vit la mousse.

ST-ART 2023 - AEDAEN - Francesca Gariti  - Photo: lfdd


A suivre...


La Fleur du Dimanche


mercredi 22 novembre 2023

Good Boy: Supergrave, le dérisoire et le fragile aujourd'hui

 Autour de la thématique de l'exposition actuellement visible au Musée d'Art Moderne et Contemporain à Strasbourg Aux temps du Sida, Pôle Sud propose une reprise par Christophe Ives de la pièce d'Alain Buffard Good Boy. Cette pièce, dont on peut d'ailleurs voir un extrait dans l'exposition, il l'a conçue en 1997, suite à un séjour aux Etats-Unis auprès d'Anna Halprin pour se soigner du sida. Il l'a interprétée de nombreuses années, puis remontée en 2001 en en tirant une version Good for... pour quatre danseur, puis après, pour vingt danseurs Mauvais Genre. La version jouée à Pôle Sud, interprétée par Christophe Ives, a été transmise par Matthieu Doze. Elle arrive dix ans après la mort du chorégraphe et presqu'une éternité après la période des ravages du sida dans les rangs du milieu artistique, entre autres de la danse. Une génération est passée et l'on peut constater avec le Covid la vitesse avec laquelle une pandémie est vite oubliée.


Good Boy - Alain Buffard - Photo: Marc Domage

Mais même avec tous ces filtres et l'empilement de mémoire, il reste pourtant une lueur d'émotion et de sensations, à l'image de la dernière scène de la pièce où l'on imagine encore la lumière sous les empilements de slips sur la lampe de poche enfermée dans la boite de Retrovir. Ce médicament, le premier découvert et utilisé comme traitement pour les malades contaminés par ce virus. Slips, lampes de poche et Retrovir sont les seuls accessoires de ce spectacle, à part des néons qui, pour les premiers, tout au début du spectacle occultent le visage du danseur et l'autre, dans la passage "Retrovir", sous forme de balançoire, annonce d'une certaine manière un passage au féminin.


Good Boy - Alain Buffard - Photo: Marc Domage


Et le corps, lui aussi, dans ses gestes reste à l'essentiel, à l'os, presque. Nous partons de la délimitation du corps, son exploration, littéralement le besoin vital de le sentir encore, de sentir ses membres, la peau, les articulations et de revenir aux mouvements presque banaux. Au départ, une prise d'identité dans le genre de bertillonnage ou anthropométrie judiciaire suivi d'une sorte de surprotection frénétique, avec ces fameux "slips kangourou" (mais pas que). Puis des passages par différentes phases d'évolution qui amènent à la fois à un développement graduel du mouvement - d'une position rampante qui cherche à quitter le sol en élançant les bras en l'air, jusqu'à une séquence très contrainte de ballet classique, en passant par tout un jeu sur les articulations. 


Good Boy - Alain Buffard - Photo: Marc Domage

Tout cela en même temps que le corps est sujet à exploration dans une économie de moyens. Ce qui n'empêche ni l'humour - quand la tête devient curieusement un sexe balloté - ou l'engagement - quand la main exploratrice de l'entrejambe et des fesses, passe, en un clin d'oeil de symbole sexuel à geste de révolte. L'espace lui aussi se construit, s'élargit, donne des repères et semble s'ouvrir même si par dépit ou désespoir le corps s'y cogne, essayant de se libérer de cette étreinte, étant obligé de se surprotéger - on remet des couches -  pour arriver au final à ce qui pourrait être le dernier petit tumulus après que l'on ait été dépouillé de tout.  

Et le reste est silence...


La Fleur du Dimanche

vendredi 17 novembre 2023

Premières, la suite... au Maillon, La Taïga court, le temps presse

 Le Maillon à Strasbourg fait renaitre le Festival Premières qui a fait connaître de jeunes artistes européens entre 2005 et 2015. Le Festival était un projet commun avec le TNS et voyait aussi la collaboration avec le Badisches Staatstheater Karlsruhe qui avait accueilli le Festival. Barbara Engelhardt, directrice du Maillon et qui avait déjà travaillé à la programmation du festival relance ce projet avec des spectacles venus de Grèce, de Belgique, de Lituanie et une pièce qui avait été présentée au TNS en novembre 2022 dans quatre versions de mise en scène par des élèves du groupe 46 et 47, La Taïga court.  


La Taïga court - Antoine Hespel - Photo: Jean-Louis Fernandez


Pour ce texte de Sonia Chiambretto, c'est la version mise en scène par Antoine Hespel qui nous est proposée, mise en scène très inventive et "immersive", le spectateur vivant l'expérience théâtrale au plus près pour certains, étant invités, avec un cocktail au choix, à se placer sur l'amorce de la scène comme chez soi avec canapé et table de chevet. On assiste ainsi, détendu au départ, moins à l'arrivée, à cette expérience totale impliquant tous les sens. Nous sommes sollicités et devons être très attentifs, ce qui nous est proposé l'est quelquefois avec beaucoup de délicatesse et de retenue, que ce soit au niveau du son, par les bruitages ou la musique, les paroles échangées presque sur le ton de la confidence nécessite un éveil constant. Au niveau de l'image, de même, des visions fugaces, des lumières discrètes, un clair-obscur nous font découvrir, ou deviner des personnages, presque des fantômes immatériels qui nous content des histoires d'ailleurs et  du présent. Il y a aussi dans cette "cérémonie" - puisque la pièce est constituée de quatre cérémonies - une "meneuse de jeu" qui se transforme selon les saisons, avec micro et qui anime le show qui peut être défilé de mode "récup" ou reportage au bout du monde qui ne manque pas d'humour. 


La Taïga court - Antoine Hespel - Photo: Jean-Louis Fernandez


Le sujet est bien sûr le réchauffement climatique, la collapsologie, avec les effets près de chez nous et plus loin aussi, par exemple en Chine, et ses conséquences évidentes que sont les réfugiés qui marchent toujours par trois. Cela parle bien sûr de la nostalgie, cette idée lointaine qui baignait déjà les mythes grecs (Ulysse, Egée,) mais dont le nom n'a été inventé qu'au XVIIIème siècle. Cette nostalgie qui nous permet de faire nôtre les témoignages de ces personnages lointains. Cela parle d'un futur chaotique, déjà arrivé, et dont Jean Jouzel disait il y a dix ans: "On va dans le mur mais on a allumé les phares". Sauf que maintenant - et dans la pièce, très concrètement, ce mur, comme la dernière vague d'un tsunami qui charrie tout ce qu'on y à déversé, une vague qui n'est pas une vague de surfeur avance ici, très concrètement dans le noir. Elle avance inexorablement, alors qu'on a essayé de remonter le temps, de rejouer la "cérémonie", mais en vain. La Taïga court si vite que demain est déjà aujourd'hui. Avec cette belle équipe de comédiens, une scénographie inventive, des décors originaux qui nous font entrer dans un univers qui risque de nous avaler, le message est efficace.


La Taïga court courrez-y encore ce samedi !


La Fleur du Dimanche 


La Taïga court

Mise en scène : Antoine Hespel
Écriture : Sonia Chiambretto
Avec Jonathan Bénéteau Delaprairie, Yann Del Puppo, Quentin Ehret, Felipe Fonseca Nobre, Charlotte Issaly, Vincent Pacaud
Scénographie : Valentine Lê
Costumes : Clara Hubert
Régie générale : Margault Willkomm
Création sonore et lumière : Thomas Cany
Collaboration sonore : Mariana Blanc Moya
Collaboration lumière : Ijjou Ahoudig
Collaboration artistique : Eleonore Bonah
Production : Théâtre National de Strasbourg
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National

dimanche 12 novembre 2023

Albert Strickler : Où vont les nuages ?

 Sa maison était au dessus du brouillard, près des nuages et il est parti ... définitivement.

Albert, l'ami d'enfance, celui qui aimait la forêt du Rhin, qui y revenait comme à ses anciennes amours.

Celui à qui le grand-père calfat avait fait découvrir la jungle des bras morts du Rhin

Celui qui est parti tutoyer l'horizon vaste et lumineux sur son échelle du ciel

Celui qui, jour après jour, nuit après nuit tissait en liens indélébiles les mots des uns et des autres avec les siens

Celui qui s'émerveillait des riens somptueux et chantait la nature et l'Homme, les femmes aussi..

Celui qui déployait une énergie au dessus de ses forces pour chanter et célébrer la poésie de la vie et des ami(e)s

Albert restera auprès de nombreux amis, lecteurs et lectrices comme une éphéméride des souvenirs, un almanach de la météo de nos sentiments

Son sourire brillera encore longtemps dans nos yeux, sa bonté nous réchauffera les jours de pluie

Sa joie de vivre ensoleillera les jours futurs

Et sa faconde nous racontera encore mille histoires en poèmes ou en prose.


Il avait participé au bouquet des Fleurs Fabuleuses, le livre d'artiste de Robert Becker et Dominique Haettel et avait choisi, en troubadour facétieux, la photo de l'Iris qui tire la langue, devenu masque vénitien et je vous l'offre - à lui aussi par dessus les nuages, ainsi que le texte qu'il avait avec sa faconde et sa fantaisie habituelle rédigé dès qu'il avait eu la proposition à laquelle il avait bien sûr répondu sans hésiter. 




Le carnaval de Venise avait lieu cette année-là en automne. On avait asséché la plupart des canaux, sauf un qui servit d’immense soliflore pour une fleur fabuleuse, afin d’élargir les zones piétonnes.
Une magnifique gondole sur roulettes – en fait, une espèce de cercueil en forme de brouette – avait valu à son concepteur le premier prix du concours Lépine.
Les Vénitiens et les touristes qui les avaient rejoints en masse, et en masques, était plus fous que jamais, en dépit du manque d’eau dû au curage évoqué.
Et la faune, ni plus ni moins que la flore d’ailleurs, n’était de loin pas en reste. Car les loups, comme sortis des bois de l’hiver, se mêlèrent vite aux masques aussi.
Un vieux Doge, costumé en vieille chouette, à la main un sceptre en forme de trompe d’éléphant orné d’un sourire de lune malicieuse, et bombant d’orgueil la poitrine quoique mort, s’était en même temps travesti en sirène de proue ornant son propre corbillard.
Le plus intrigant  étant qu’il paraissait se multiplier au fur à mesure qu’il fendait les flots à sec.
Moi qui avais appris à danser la valse sur le sirupeux mouvement de l’été de Vivaldi, je profitai de la zizanie ambiante pour retourner sur la tombe de Stravinsky et y déposer mon bouquet qui sacre traditionnellement le printemps.
Quand j’en revins du cimetière San Michele, je croisai Claudia, la seule qui ne fût ni maquillée ni même habillée.
«  - Qu’est-ce que tu fous là, à poil ?
 -Si je me suis costumée en nue, c’est qu’on n’a pas de temps à perdre. Tu es bien sûr le seul à ne pas savoir que nous sommes confinés.
Viens, je nous ai déniché un superbe palais près de La Fenice.  On se met sous la couette, c’est quand mieux que de se voler dans les plumes, non ! »
Le temps d’enregistrer sa proposition – il y a moins alléchant ! – et un nombre incroyable de ses clones sortirent de son dos comme des anges pour aller puiser dans le corbillard du doge des fleurs de toutes  sortes et les jeter, avec force clins d’œil, hors de leur char, comme jadis, chez nous, les jeunes filles lors de la Fête-Dieu.
"


Vous pouvez le revoir dans l'émission Rund Um  il parle de cette expérience ici:




Lui qui aimait le jaune m'avait sollicité pour la photographie de couverture de son "Journal du Confinement" Un silence icandescent pour une photo de genets, moi qui venait du "Pays ancien", entre Moder et Rhin. Je venais juste de capturer un couple de papillons, prise dont j'étais très fier et qu'il a finalement préféré aux joncs traditionnels qui n'étaient plus son environnement au Tourneciel où il avait été confiné. 





Dans son tout premier journal en "Il a plu sur les cerises - Journal Printemps 1995" le 24 mars 1995, Albert disait: "Et si la tenue d'un Journal n'était qu'une forme d'accompagnement à la mort !
Il l'a accompagnée pas assez longtemps... La veille de son anniversaire il faisait le bilan de mi-temps et "intégrait les "inconnus" que sont une balle perdue, un platane dans un virage ou tout simplement un refus du coeur".

D'ailleurs pour son dernier journal "Boiter jusqu'au ciel - Journal 2022", il avait noté au 1er janvier:
"J'ai mis Journal 2022 et suis reparti!"

Parti où ? Là où vont les nuages ?

Où vont les nuages
Une fois qu'ils ont saigné
Tout leur sang
Une fois qu'ils ont sué
Toute leur eau
...

Où vont les nuages
Si ce n'est d'échouer 
Comme d'immenses baleines
sur une lointaine plage du ciel
...

Nous le laissons sur ce chemin et gardons dans notre coeur les très bons moments passés ensemble, en vrai et avec ses livres.


La Fleur du Dimanche

Nous partagerons avec sa famille et ses amis notre peine le lundi 13 novembre en l'église Saint Georges à Sélestat




Le dimanche 19 novembre à 15h00 aura lieu également un hommage au CINE Bussière. Aline Martin et Pierre Rich liront les poèmes d’Albert Strickler écrit spécialement pour le livre de Michel Friz "L’alphabet des hirondelles” suite à la conférence sur les hirondelles de Pierre Hieber,  guide naturaliste chevronné et Michel Friz. plus d'info ici:
 

samedi 11 novembre 2023

11 novembre - 26 avril - 24 février - Guernica - Ukraine - Jean Pierre Raynaud - Y a-t-il un sens ?

 Ce 11 novembre, jour de commémoration de l'armistice de la première guerre mondiale, est l'occasion de faire un pause et de s'interroger sur la fureur humaine, cette soif de combat, cette volonté d'expansion territoriale, cette âme belliqueuse qui trouve toutes les raisons non seulement de s'exprimer mais arrive en plus à envahir des pays, tuer des hommes, des femmes et des enfants, détruire des bâtiments, des constructions, même des théâtres et des hôpitaux.  

Jusqu'où ira la folie humaine ?

D'aucuns essaient, en s'engageant dans des organisations médicales ou humanitaires, en militant pour la Paix ou en soutenant financièrement ou personnellement des actions humanitaires ou politiques, de faire progresser l'idée ou d'oeuvrer concrètement au rétablissement d'une société plus juste et plus libre, plus fraternelle.


Jean Pierre Raynaud - (c) P. Chancel


Le 21 avril 2022, lors de la Biennale de Venise, le Président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé les artistes du monde entier à soutenir l'Ukraine qui venait de se faire envahir par la Russie. Cet appel a été entendu par Baudouin Jannink, éditeur de livres d'Art à Paris. Il s'était déjà engagé lors de l'incendie de Notre-Dame en sollicitant des artistes en leur demandant à chacun d'offrir une oeuvre. Ces oeuvres, il les a rassemblées dans un livre vendu au profit de la reconstruction de la Cathédrale.


Guernica - Pablo Picasso - 1937 - Succession Picasso 2023


Et en réponse à l'appel de Zelenski, il a eu l'idée de faire réaliser une toile à l'image de celle que Picasso avait offerte aux Républicains espagnols en 1936. Le tableau Guernica, exposé le 12 juillet 1937 dans le Pavillon Espagnol de l'Exposition Universelle de 1937, dénonçait le bombardement de la ville de Guernica par l'aviation allemande et italienne le 26 avril 1936. Picasso a refusé d'envoyer la toile dans l'Espagne fasciste de Franco et elle a été montrée dans de nombreux pays entre 1935 et 1939, avant de rester à New York une quarantaine d'années. Elle est enfin arrivée en Espagne après la mort de Franco et la démocratisation du pays et a été exposée pour la première fois à Madrid le 25 octobre 1981 pour le centième anniversaire de Picasso (1881 - 1973).


Sans titre / Ukraine - Jean Pierre Raynaud - 2023


 C'est l’artiste plasticien Jean Pierre Raynaud qui a répondu concrètement à cet appel en réalisant une œuvre inédite qui a été offerte à l’Ukraine via son S.E. l’ambassadeur Vadym Omelchenko, le 24 février 2023 lors du dévoilement de cette oeuvre dans la Cour d'honneur de la Sorbonne, en présence de la présidente de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Christine Neau-Leduc. Jean Pierre Raynaud, né en 1939, est un artiste mondialement connu qui a commencé ses recherches proche du mouvement des Nouveaux Réalistes et des artistes Pop qui a élaboré un langage fait de signes et de signaux, le plus représentatif étant le panneau de sens interdit. Sinon, ses pots de fleurs peints en rouge et son grand pot doré qui est allé jusqu'à Pékin pour revenir au Centre Georges Pompidou. Le carrelage blanc duquel il a recouvert les murs de ses différentes maisons sont également très connus et ainsi que sa problématique des drapeaux. L'oeuvre qu'il a réalisée pour l'Ukraine va totalement dans ce sens avec cette immense toile de sept mètres soixante dix de long sur trois mètres cinquante de haut qui se présente avec une énorme sens interdit qui prend toute la hauteur, et un autre qui est coupé en moitié par le bord de la toile - continue-t-il dans notre esprit ? Le deux barre noirs verticales, elle aussi interrogent, sommes nous protégés par elles ou enfermés comme dans une prison? Comme il le dit lui-même dans un de ses "Aphorismes" :

"Le sens interdit c'est un mur, un mur c'est fait pour vous protéger ou vous enfermer"


Cette installation, à savoir la reproduction de Guernica de Picasso (avec le soutien de la Fondation Picasso) et de l'oeuvre "Sans titre - Ukraine" de Jean Pierre Raynaud a vocation à voyager, tout comme la toile de Picasso en son temps pour soutenir l'Ukraine dans leur combat pour la Paix - et pour sensibiliser à la Paix en général, le temps que le pays puisse accueillir ce geste artistique de soutien.

La première étape de ce circuit aura lieu à Strasbourg où les oeuvres seront exposées dans le Hall d'entrée du Nouveau Parc des Expositions à Strasbourg du 24 au 26 novembre 2023 lors de la Foire d'Art Contemporain et du Design ST-ART.

Dans ce cadre, une conférence est organisée le samedi 25 novembre à 16h00, sur l’espace-conférence de la SAAMS, lors de laquelle Jean-Pierre Raynaud et son éditeur Baudouin Jannink raconteront l’aventure de leur projet engagé. Le clip Marioupol signé par Catherine Bolzinger, musicienne, et Sophie Rosenzweig, grand reporter, et interprété par Voix de Stras' sera diffusé en avant-première au début de cette conférence. Le Président du Rotary Club de Kiev témoignera également en direct de Kiev. 


Auparavant,  à 15h30, une performance chantée-dansée de Geneviève Charras et Baudouin Jannink Aphorismes Dansés aura lieu en face des œuvres Guernica - Ukraine dans le hall d’entrée de ST-ART.


Geneviève Charras à la frontière .... - Photo: lfdd


Je laisse la parole à Geneviève Charras:

"Faire résonner les deux toiles au sol, délimitant un territoire, franchir la frontière, le mur de l'interdit. Sans interdit, dans le sens dessus-dessous du sang-gêne de naguère, de la guerre à terre, dans les airs, dans l'ère du temps sans en avoir l'air. Gestes hachurés, fragmentés, autant que fluidité des contours du corps, tout est pré-texte à construire, bâtir de nouvelles voies graphiques dans l'espace, sur le terrain de la discorde comme de la réconciliation. Mais la guerre n'est pas finie et n'a de cesse d’agiter les corps, de secouer les imaginations. Se mouvoir librement serait un luxe, une faveur accordée à l'artiste immergé dans la quête du beau dans l'horreur. Danser, mouvementer le chaos mais aussi le silence en suspension. J.P. Raynaud, horticulteur de formation inspire cette performance en regard au clip de Guesch Patti: "l'homme au tablier vert"

La suite sur son blog :  Aphorismes dansés : Tomber dans le panneau ou le pot aux roses.


Et je me tais, en suivant les réflexions de Jean Pierre Raynaud:

"Le silence des œuvres me convient, d'être muettes les sauve"


A suivre....


Pour venir à ST-ART et voir l'installation et/ou la performance et la conférence - merci de vous abonner à ma lettre d'information et faites-moi un mail pour recevoir une invitation. Merci de préciser si c'est pour le vernissage (le 23 novembre) ou pour le Salon, la performance et la conférence (précisez 23 ou 25).


La Fleur du Dimanche


P.S. Pour votre information, l'appel de Zelenski, passé par Paris avec Baudouin Jannink est arrivé à mes oreilles et je remercie celles et ceux qui ont cru à ce projet, ont permis de le concrétiser, et y participent d'une manière ou d'une autre, déjà à Strasbourg, donc tout particulièrement la SAAMS et son président et ST-ART et Strasbourg Events et ses équipes qui ont accueilli ce projet avec enthousiasme. Les autres associations, institutions et individus qui ont facilité les choses, que cela ait abouti ou pas, sont également remercié(e)s. D'autres suivront, le route est ouverte... Le circuit n'est pas court et mais cela avance.

Je remercie tout spécialement Baudouin Jannink et Jean Pierre Raynaud sans qui tout cela n'existerait pas - et les collaborateurs des éditions Jannink, Simon et Thibaut. Et les équipes de ST-ART qui ont dès le départ dit "Oui" à l'opération. Puis Voix de Stras' et Catherine Bolzinger ainsi que Sophie Rosengart pour le Clip Marioupol et Jean-Pierre Wacker pour le Rotary Club et le lien avec Kiev