C'est annoncé comme la dernière chorégraphie d'Yvonne Rainer, qui, du haut de ses 88 ans, n'a pas perdu une once de son esprit critique et nous gratifie d'une performance qui jette un regard sur une carrière bien remplie. Fondatrice dans les années 1960 du Judson Danse Theater (avec Trisha Brown), après avoir travaillé avec Merce Cunnigham et Marta Graham, dans le sillage d'Anna Halprin, elle publie en 1965 dans le manifeste No Manifesto sa vision de la danse. Une danse où elle met en avant les gestes du quotidien par opposition au côté spectaculaire de la danse moderne. Elle aura influencé de nombreux chorégraphes dans le monde avec sa danse minimaliste et après s'être également intéressée au cinéma en plus de la performance dans les années 70. Elle revient à la danse en 2000 quand la Baryshnikov Dance Foundation lui commande une pièce de 30 minutes intitulée After Many a Summer Dies the Swan à partir de la nouvelle d'Aldous Huxley.
Yvonne Rainer - Hellzapoppin‘: What about the bees? - Photo: Maria Baranova - © Performa and New York Live Art |
Le programme démarre avec le film éponyme, qui rassemble des images de cette pièce dialoguant avec des citations d'artistes et de penseurs tels qu'Oskar Kokoschka, Adolf Loos, Arnold Schönberg et Wittgenstein. Le film décrit la Vienne fin de siècle sur son déclin, la relation entre l'arrivée de la "Sécession" viennoise et où la science et l'Art remplacent la religion. Tandis que la politique s'embourgeoise, la vie de l'art remplace l'action. Et cette évolution de la société porte en elle les germes de la pensée et du pouvoir d'extrème droite, né ensuite dans les années 20 et qui sont encore présents, et actifs aujourd'hui dans la monde. Les extraits de la pièce essaient de se faire une place à l'image, mais nous avons aussi cette image symbolique où un balayeur se retrouve "bloqué" devant une danseuse immobile. La pensée, la philosophe d'Yvonne Rainer clairement exprimée ici sous-tend sa danse engagée et un brin iconoclaste.
C'est la cas avec Hellzapoppin': What about the Bees? où dès le départ le ton est donné. Sur les deux écrans de fond de scène sont projetés des extraits des deux films auxquels rend hommage Yvonne Rainer: le film de H. C. Potter de 1941 à partir de la comédie musicale à gauche, et à droite Zéro de conduite du cinéaste Jean Vigo, film libertaire qui lui a valu une interdiction de projection jusqu'en 1946. Pour Hellzapoppin' nous avons des scènes endiablées de cake-walk d'un couple noir fabuleux et décoiffant. Et à droite, c'est la scène de révolte des collégiens dans le dortoir avec force bataille d'oreillers et crucifixion symbolique du pion qui, attaché à son lit "dort debout".
Yvonne Rainer - Hellzapoppin‘: What about the bees? - Photo: Maria Baranova - © Performa and New York Live Art |
Puis arrivent deux groupes de danseurs et danseuses qui prennent place à droite et à gauche de la scène (pour la représentation de dimanche, un des danseurs fait défection pour des raisons de santé). Entre les mouvements de groupe où la coordination entre les danseurs est vitale et nécessaire, portés, touchers, glissades le long du corps de l'autre, se tenir par la main pour se soutenir, s'intercalent des figures plus coordonnées dans l'espace et d'autres où chacun va se retrouver plus en tant qu'individu, occupé par des tâches simples, comme une simulation symbolique de nettoyer le sol, fumer et jetter sa cigarette, voler, sauter en l'air, s'asseoir par terre et observer dans une poésie pragmatique. Tout cela se passe donc "en stéréo", les actions se passant à la fois à droite et à gauche - une courte "interférence" se plaçant avec l'ensemble du groupe qui joue ensemble. La bande son alterne des airs musicaux anciens, de vieux disques de chansons ou de jazz et des airs d'opéra entrecoupés par un commentaire en anglais, non sous-titré, sûrement tout aussi engagé que le texte du premier films dont par exemple il est fait référence à l'écrivain noir engagé James Baldwin. Quelquefois les chorégraphies reviennent et l'on passe aussi à des danses à deux puis aussi à une danse avec des oreillers pendant qu'au fond, sur l'écran sont projetées des images d'eaux tumultueuses, qui pourraient être une grande chute d'eau filmée en plongée en cadre serré, sans l'environnement. Les interprètes sont totalement à l'aise dans leurs mouvements, précis et graciles. Certain(e)s ont déjà côtoyé Yvonne Rainer depuis de longues années et ils apportent chacun(e)s leur personnalité à la performance.
La présentation de HELLZAPOPPIN’: What about the bees? dans la Staatliche Kunsthalle de Baden-Baden est une première mondiale qu'il faut saluer comme un événement unique, produite et présentée en Allemagne par la Kunsthalle et par le programme de soutien artistique Performa. La manifestation est également soutenue par le Musée et jardin de sculptures Hirschhorn où sera également présentée la pièce du 9 au 11 février 2023 - si vous êtes à Washington !
La Fleur du Dimanche
Tänzer*innen.
Bailey, Brittany Engel-Adams, Patricia Hoffbauer, Vincent McCloskey, Emmanuèle
Phuon, David Thomson und Timothy Ward.
Team Baden-Baden: Çağla Ilk, Elena Sinanina, Sandeep Sodhi, Elena Solovarova.
Mit Dank an Defne Ayas, Curator at Large, Performa.
HELLZAPOPPIN’: What about the bees? wurde von Performa, der Staatlichen Kunsthalle Baden-Baden und dem Hirshhorn Museum and Sculpture Garden in Auftrag gegeben, mit großzügiger Unterstützung von Sarah Arison und dem Performa Commissioning Fund. In Europa wird es von der Staatlichen Kunsthalle Baden-Baden und Performa gemeinsam präsentiert. Die Aufführungen in Baden-Baden sind gefördert vom Berliner Künstlerprogramm des DAAD aus Mitteln des Auswärtigen Amtes (AA).
Mit freundlicher Unterstützung der Festspielhaus und Festspiele Baden-Baden gGmbH.
Konzept und Regie: Yvonne Rainer, unterstützt durch Recherche und Inputs der Tänzer*innen. Regieassistenz: Pat Catterson. Tänzer*innen: Emily Coates, Brittany Bailey, Brittany Engel-Adams, Patricia Hoffbauer, Vincent McCloskey, Emmanuèle Phuon, David Thomson und Timothy Ward. Gastdarstellerin: Kathleen Chalfant.
Team Baden-Baden: Çağla Ilk, Elena Sinanina, Sandeep Sodhi, Elena Solovarova.
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