mercredi 25 janvier 2023

Ballad de Lenio Kaklea à Pôle Sud: Ni promenade de plaisir ni romance mais un superbe parcours avec musique

 Lenio Kaklea est danseuse, elle est aussi chorégraphe et également écrivaine. Et de plus c'est une magnifique conteuse et une très bonne comédienne. A Pôle Sud, dans le cadre du Festival l'Année commence avec Elles (voir les précédents billets et ceux à venir), dans son spectacle Ballad, elle nous conte et nous représente son parcours personnel et professionnel, de ses débuts comme petit rat au Conservatoire National de Danse Contemporaine d’Athènes où elle apprend la danse contemporaine, jusqu'à son projet "sociologique" d'enquête sur le terrain dans les villes, les banlieues et les villages sur la danse pour une "Encyclopédie pratique, portraits choisis" comptant plus de 600 "portraits".


Lenio Kaklea - Ballad- Photo: Gianluca Di Loia


Elle nous accueille sur scène, en survêtement de sport, pantalon noir et T-shirt blanc, avec une série de défilés, où elle tourne en rond, oscillant entre les gestes d'agression ou de défiance envers les spectateurs, fixant chacun de ses yeux noirs perçants et esquissant quelques mouvements de danse puis partant le pas lourd et traînant vers le fond de la salle, pour reboucler ce cycle sur une musique presque techno, et parfois immobile, le regard perdu dans le vague. Parfois esquissant quelques pas de boxeurs, ou une pose accroupie de statue grecque.


Lenio Kaklea - Ballad- Photo: Gianluca Di Loia


Elle va ainsi ponctuer son spectacle de moments de narration où elle conte dans sa diction claire et dans un vocabulaie descriptif des séquences de son apprentissage de la danse, danse libre, modern danse,..., de son parcours d'interprète et de chorégraphe, de performeuse et aussi des aspects économiques et philosophique de la danse et de son inscription  dans la société, son économie et son contexte.


Lenio Kaklea - Ballad- Photo: Gianluca Di Loia


Et donc, successivement, en  courts tableaux, des extraits de cette danse des utopies (qui n'ont pas forcément fait évoluer politiquement ni la danse, ni le statut de la femme) - Acts of Light (1981) de Martha Graham, Le petit berger (1925) de François Malkovsky et d'autres "extraits" de quelques "Portraits choisis" pour lesquels elle va au fur et à mesure se dévêtir, passant du survêtement à un collant intégral bleu métallique puis à une nudité naturelle qui lui sied à merveille et où elle est totalement à son aise, en accord avec sa (la) nature. Elle se revêt d'un justaucorps couleur chair pour présenter un extrait de A hand's turn où elle scrute son intimité à vue avec un miroir qui lui sert aussi à lier son regard avec chaque spectateur en interrogeant le désir dans la danse. 


Lenio Kaklea - Ballad- Photo: Gianluca Di Loia


Puis elle en vient à interroger la danse de loisir sportive avec le fitness par opposition à la danse nature de Martha Graham et la perte de maîtrise du corps, les gestes saccadés et déconnectés, fébriles, à la limite de l'hystérie, pour finir avec un krump branché dans le monde moderne et conclure avec humour que l'impact de ce travail artistique s'approche de zéro par rapport au public concerné. Une belle lucidité soutenue avec bonheur par un engagement du corps total et bien maîtrisé. Un très belle prestation et un réel plaisir  pour les sens et l'esprit.


La Fleur du Dimanche

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