Dana Michel était venue à Montpellier Danse en 2019 avec CUTLASS SPRING et ses propositions artistiques semblent plaire au Directeur du Festival Jean-Claude Montanari. Mais pas uniquement à lui, puisqu'elle a a reçu le prix ImPulsTanz (Vienne) en 2014 et le Lion d'argent pour l'innovation en danse de la Biennale de Venise en 2018. Et l'ANTI - Festival international Prize for Live Art6 en 2019.
Sa première création Yellow Towel a été classée dans le Top 10 de plusieurs magazines et elle a été classée par le New York Times parmi les chorégraphes féminines de l'année 2014. Ce qui ne doit pas lui faire regrette d'avoir arrêté son métier de responsable marketing, alors qu'elle a également participé à des compétitions de course à pied et joué au football.
Mais rien de tout cela dans la "performance" Mike qu'elle présente à Montpellier Danse (et qui est en tournée mondiale*). La pièce où elle est toute seule pendant trois heures interroge à la fois le corps, la représentation, le spectacle et le statut des spectateurs. Et la relation de confiance entre l'artiste-performeuse et son public dans la durée. Cette relation presqu'intime qui s'installe au fur et à mesure du déroulé de la performance (elle éteint la lumière à un moment). C'est aussi un jeu de piste avec toute une série d'objets qui sont disposés dans la salle et qui seront - ou non - utilisés: objets cérémoniels à charge symbolique ou dérisoire, comme ces pinces, pelles, couvertures, papier kraft, carton, lampe ou autres petits objets qui jonchent le sol de la chapelle dans laquelle nous entrons. Sans y trouver personne. Car c'est aussi à un jeu du chat et de la souris auquel nous assistons, au moins pour la première partie de cette performance. Car Dana Michel se joue de nous et joue avec nous en balançant du haut du balcon quelques objets puis, quand elle nous a rejoint, nous "promène" de temps en temps, quitte à disparaître un petit moment puis à réapparaître pour continuer sa cérémonie. Et dès le début, elle annonce également la couleur: ce sera marron, comme le costume - vêtement de travail qu'elle porte, et dont elle enlève la haut pour se mettre de la crème solaire et s'allonger dans la cour de l'Agora. Mais que signifie ce marron, que signifie aussi ce vêtement masculin, tout comme le titre su spectacle Mike, alors qu'elle s'allonge seins nus. Tout comme l'on se demande à quoi sert ce gros casque audio blanc qu'elle porte - à moitié - sur ses oreilles. Tous ces signes, ces messages nous remettent en question le statut même du spectacle. Et ce d'autant plus que pour commencer, elle est surtout dans une attitude de non faire, de repos, d'observation (du public ?) ou d'introspection, de réflexion. Ou alors, effectivement aussi dans des actions non spectaculaires (se reposer, bronzer, se promener, se brosser les dents, boire,...). Au bout d'un certain temps, les actions se concrétisent un peu; faire un paquet, mais avec beaucoup de mystère: pourquoi cet énorme coutelas qu'elle a dans la poche de son pantalon, qui est le destinataire de ce paquet, que fait cette lampe dans ce carton, à quoi servent ces portants de vêtements qu'elle ordonne comme un petit train, à qui sont destinées ces bananes, autant de questions ouvertes, où va le travail? Quelle est cette phrase qui marque la fin du spectacle ?
Laissons lui la parole et l'image:
Ma recherche se déploie à la fois en studio et en dehors. Dans un va-et-vient continu, je plonge dans un sujet à travers l’écriture, la lecture, la vidéo et la discussion pour ensuite laisser mon attention dériver et mon corps prendre le relais. Je me nourris de sons, de silence et de dissonance, parfois jusqu’à plus soif, assaillant de stimuli mon corps et ma psyché pour observer ce qui en rejaillit. De minuscules détails se présentent alors à mon regard polymorphe et font naître des gestes, des résonances, des couleurs, des textures et une vision de l’éclairage. Par ces détails se précise la trajectoire de ma création.
C’est naturellement que je navigue en eaux difficiles, propices aux états de vulnérabilité et de découverte. De là, j’affine mes perceptions et j’avance sans me laisser submerger d’hésitations. Je trimbale avec moi cette image d’un être qui prend la forme d’une preuve mathématique ou d’un portail aux milliards de possibilités, et mon écoute s’approfondit dans cet archétype.
J’offre un réservoir d’expériences à interprétations multiples. J’ouvre un espace vaste où les structures du voir et du vivre de chacun s’entrelacent et se dilatent.
La Fleur du Dimanche
* MIKE est en tournée mondiale, et sera joué en particulier
le 11 et 12 juillet à Amsterdam
du 21 au 24 septembre à Lausanne
le 28 et 29 septembre à Rotterdam
le 3 et 4 octobre à Marseille
du 20 au 22 octobre à Kyoto
le 4 et 5 novembre à Helsinki
Et la suite est ici:
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