Le décor est sobre, un grand plateau avec un tapis blanc, un piano et son tabouret, en fond de scène une ouverture et des rampes de lumière accrochées mais éteintes (elles vont briller, ne vous inquiétez pas). Pas de fioritures, sauf la magnificence des vêtements - très belles créations de Sari Brunel - la superbe perruque de fleurs blanches de Guillaume Marie et le grand bouquet que va apporter Radhouane El Meddeb pour le poser au coin de la scène. L'esprit cabaret est plutôt intériorisé et dans les textes et les chansons. Cela fleure la nostalgie, les chansons des années 50, l'exil, le voyage et les traversées, volontaires ou subies, quelquefois tragiques.
Le Cabaret de la Rose Blanche - Radhouane El Meddeb - Photo: Agathe Poupeney |
Cela commence aussi très simplement avec l'arrivée des personnages, mains ouvertes, paumes offertes mais vides, qui s'installent dans cet espace qui est plutôt un espace mental - mais peut-être est-ce dû à la configuration de la salle qui inspire plus la sacralité de la scène théâtrale que l'impertinence de la boîte de nuit. Pas de gesticulation, d'agitation inutile, d'exagération, plutôt des mouvement sobres, fluides, aquatiques et enveloppants. Quelques scènes de séduction quand même, une escapade vers une "danse du ventre" de dos par Philippe Lebhar, et des ondulations serpentines. Les danseurs, tous des hommes, mais qui bien que soulignant leur pilosité jouent sur le travestissement.
Le Cabaret de la Rose Blanche - Radhouane El Meddeb - Photo: Agathe Poupeney |
Radhouane en meneur de revue en particulier, avec sa jupe noire, cultive cette ironie et cette distance. Egalement au niveau des interpellations à la salle, on reste dans l'esprit cabaret et le public est invité à frapper des mains en rythme sur les chansons, ce qu'il fait volontiers, participant à l'ambiance festive. Une autre catégorie de textes, plutôt poétiques et mélancoliques accompagne en écho les chansons qui composent le répertoire qui se déroule tout au long de la soirée. Ce sont des chansons exhumées du répertoire du pourtour méditerranéen, de Warda l'Algérienne à la Tunisienne Sahina et à la libanaise Fairuz dans une diversité de dialectes, unies par la même thématique de l'exil, de l'émigration du voyage, du départ, de la famille qui se scinde, du Heimweh - le mal du pays comme on dit chez nous.
Le Cabaret de la Rose Blanche - Radhouane El Meddeb - Photo: Agathe Poupeney |
C'est la magnifique - il faut la voir arriver au début avec son couvre-tête doré et brillant qui la rend immense puis de découvrir au fur et à mesure sa robe étincelante de mille feux - Lobna Noomene qui, de sa voix profonde et envoûtante, nous interprète avec une puissance magique cette diversité de paysages et de voyages sonores. Elle est accompagnée à la contrebasse par Sofiane Saadoui et au piano dans une belle complicité par Selim Arjoun, jeune mais très talentueux musicien qui dépoussière l'orchestration et l'adaptation de ce répertoire exhumé. On peut aussi apprécier sa voix toute en finesse et en retenue dans l'air espagnol (ou plutôt mexicain) Cucurrucù Paloma de Gaetano Veloso.
Le Cabaret de la Rose Blanche - Radhouane El Meddeb - Photo: Agathe Poupeney |
Et nous ne sommes pas surpris de voir Lobna interpréter la chanson de Polnareff Lettre à France dans laquelle il est aussi question de séparation:
Je suis comme loin de moi
Et je pense à toi tout bas
Tu es à six heures de moi
Je suis à des années de toi
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