vendredi 1 mars 2024

Avec Accroche Note: Rogue Ø chez Nootoos: Ce n'est pas de l'arrogance, c'est de l'errance sans gravité

 Le titre de la pièce Rogue Ø de Léna Angster et Raphaël Languillat interroge. Un lettré dirait que l'on veut se moquer de lui, ou qu'on le méprise. Un sportif trouverait chaussure à son pied ou se mettrait au fitness. Ou si on est branché jeu, on serait alors partant pour une belle partie immersive.  Au final on peut trouver une peu tout cela et encore autre chose dans la création présentée par Accroche Note à l'espace Nootoss dans l'église Saint Pierre le Vieux à Strasbourg.


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


Le début est surprenant une fois rentré dans la salle, dans une semi-obscurité, avec quelques panneaux faiblement éclairés, un mélange de bruits divers et de sons stridents nous enveloppe, nous agresse presque. Un décompte s'ensuit, ponctuant le temps toutes les dix secondes. Ce n'est pas un compte à rebours, on compte le temps passé ensemble, et le temps passe, aiguisant notre curiosité, toujours baignés dans cet chaos musical, un peu comme le chaos original de l'univers. 


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


A quatre minutes trente, cela se calme, un son de guitare, suivi de près de lamentations de la clarinette s'étire. Un personnage immobile, ou se mouvant lentement sur la scène suit un parcours mystérieux. C'est la soprano Françoise Kubler, ses sifflements, bruits de bouche et mélopées se mêlent à la musique, quelques paroles chantées, reprises en écho s'intègrent dans la composition électronique de Raphaël Languillat qu'il produit et mixe en direct sur ses consoles, intégrant la guitare électrique de Stephen Ahrens et les clarinettes d'Armand Angster, délimitant le fond de scène. 


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


Tous sont habillés de combinaisons qui pourraient les faire ressemble à des astronautes uchroniques. Lena Angster arrive aussi sur scène au ralenti et se positionne derrière Françoise Kubler, la coiffant puis lui tenant devant le visage une lentille de Fresnel. Casque symbolique de scaphandre de voyageur de l'espace ou prothèse de vision. Puis elle bascule cette lentille en la lui posant sur les mains comme une offrande. 


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


Lena se meut lentement vers une chaise ghost sur laquelle elle va performer une lente et intéressante danse en apesanteur très crédible et très réaliste. On se croirait projetés dans une station spatiale. Puis va précautionneusement de positionner toujours au ralenti derrière les plaques lumineuses du fond de scène. 


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


La musique se fait stridente, des sifflements aigus marquent un nouvel épisode, avec des essais de communication entre les deux femmes, l'une tenant un miroir tandis que l'autre s'y mire et danse autour d'elle. Puis elles vont se retrouver avec un masque miroir, liées et reliées. 


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker


S'ensuit une sorte de danse de séduction de Léna, attirance répulsion du côté du coin gauche de la scène, dialogue impossible, et ce sera du coin droit que jaillira la lumière, celle qui éblouit et même aveugle, tandis que le son s'éteint doucement sur cette mystérieuse troupe enfin rassemblée, dans quel but ?  


Rogue Ø - Accroche Note - Photo: Robert Becker
 

Le voyage mystérieux peuplé de sons étranges nous a en tout cas transportés dans un univers autre, parenthèse irréelle et suspension du temps. Une forme surprenante et stimulante.


La Fleur du Dimanche 

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