Suite du Festival Extradanse à Pôle Sud avec une soirée en deux parties.
Pour commencer, workpiece de et avec Anna-Matija Adomaityte, danseuse et chorégraphe née en Littuanie qui s'est formée en Suisse et qui propose une réflexion sur le mouvement; le corps et son exploitation au travail dans une démarche très conceptuelle et symbolique. Elle nous accueille sur un tapis de marche, déjà en route vers son futur à notre entrée. dans sa tête, des mots qui résonnent:
"Ce mal de dos est mon dinosaure de compagnie. Mes collègues sont pleins d’optimisme. La meilleure employée du mois sourit sur la photo au mur, entre elle et moi il y a un nuage de parfum bon-marché. Le travail consume mon corps ; love is stronger than hatred. Les lendemains passent en drive-in, je m’en souviens."
Festival Extradanse - Pôle Sud - Anna-Marija Adomaityte - Photo: Carlos Tago |
Tandis qu'elle marche, de plus en plus vite et que le bruit de ses pas enflent, cette question de la marche forcée, sa tête se tourne à droite et à gauche au rythme de ses pas, imperturbable, les mains se relèvent et font des gestes mécaniques, par saccades et l'on imagine la souffrance endurée de cette torture subie. Nous, spectateurs nous demandons quand cela va cesser, tout en admirant le stoïcisme de l'interprète. Une rupture de l'escalade du son suivi de variations de petits sauts secs et une accélération du rythme nous ramène dans le droit chemin. La "danseuse" elle varie, va à l'amble et module ses pas et ses gestes. On attend la chute, l'exténuation dont elle nous fait grâce. En spectateur secrètement sadique, nous en aurions demandé plus.... Mais la question s'insinue dans notre esprit: "Allons-nous nous inscrire dans un club de fitness?"
Festival Extradanse - Pôle Sud - Sarah Cerneaux - Photo: CHA Production |
Deuxième volet avec Either Way de Sarah Cerneaux qui nous attends sur la grande scène vide (un grand sac posé au fond à droite nous intrigue cependant), apparue comme par mystère, bougeant imperceptiblement, s'avançant doucement vers le public, le regard profond. Son corps musclé et bien proportionné d'athlète trahit la pratique de l'exercice physique, du hip-hop aussi par lequel elle est entrée en danse (née à la Réunion et qui a déjà travaillé avec des chorégraphes au niveau international). Elle maîtrise les mouvements infimes, les arrêts brusques, les gestes liés et coulants qu'elle démarre des épaules, vagues infimes qui partent vers le bout des bras, nus sortant d'un chemisier blanc griffé de noir, les pieds, nus également sous son jean bougent avec grâce. Elle avance, recule, hésite, revient, tourne, reprend son exploration de l'espace, ralentit, fait une pause et recommence. Elle se retrouve à terre, de dos, les mains qui se cherchent, se joignent.
Festival Extradanse - Pôle Sud - Sarah Cerneaux - Photo: CHA Production |
Et soudain, changement de programme, elle se retrouve à aménager sur le plateau un certain nombre de projecteurs divers qu'elle dispose avec soin et avec lesquels elle va nous jouer une autre partition de l'espace et de son corps. Toujours avec une intensité d'incarnation de tous les gestes, même les plus imperceptibles, stupéfiante. Qu'elle traverse l'espace en marchant ou en dansant, elle est toute entière dans cette action, totalement présente.
Festival Extradanse - Pôle Sud - Sarah Cerneaux - Photo: CHA Production |
Comme quand, après avoir libéré une ampoule suspendue et quelle vide le sac (celui du début) rempli de vêtements divers pour se les fixer, lentement, avec des pinces bleues autour de son corps en une robe de princesse des faubourgs, qu'elle glisse à terre du trône (une simple chaise) sur laquelle elle s'est assise et qu'elle se fait son "défilé" parmi tout cet éclairage, tandis qu'une voix douce nous conte cette histoire de princesse ou de nomade avec beaucoup d'amour et de tendresse. Et l'on applaudit cette première création chorégraphique de cette danseuse qui a déjà travaillé avec de grands chorégraphes à l'international. En lui souhaitant bon vent.
La Fleur du Dimanche
A Pôle Sud le 12 et 13 mai 2022
Création sonore et lumière : Gautier Teuscher
Production : Cie A M A
Coproduction : Emergentia – temps fort pour la création chorégraphique émergente réalisé par L’Abri, le TU et l’ADC Genève. Avec le soutien : Ville de Genève / Loterie Romande / Fondation Fluxum
Résidence : Dansomètre – espace de création chorégraphique
Projet accompagné par le Réseau Grand Luxe.
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