dimanche 24 mai 2020

Si t'as pas d'Oulipo, t'as qu'à te vouer au Pastafarisme, sinon c'est la zoonose

Dans cet entre-deux, si l'on peut dire ainsi, entre l'anniversaire de la naissance et celui de la mort de Boris Vian, ou entre l'Ascension et la Pentecôte, entre la montée et la descente, entre l'échelle et les langues de feu, entre l'avant-après et l'après-avant, je balance...
Je balance les Oulipiens qui ont achevé Boris, je balance Roger-Pol qui fait de la religion un droit - de non-croyance, je balance Descola et Letta, je balance la #Banane et les Fleurs.
Je balance l'aigrette du Tragopogon pratensis ou Salsifis des prés appelé aussi Barbe de bouc ou, en anglais, Jack-go-to-bed-at-noon, puisque ses fleurs (quand il est encore en fleurs) se ferment la nuit.
Bon, là, les akènes sont sur la cypsèle:


Tragopogon pratensis - Salsifis des prés Photo: lfdd


Ce n'est pas le pissenlit ou Taraxacum préféré de La Fleur du Dimanche, ça lui ressemble en bien plus grand:


Tragopogon pratensis - Salsifis des prés Photo: lfdd

  
Et là je vous balance tout de suite la #Banane "par Boris Vian, dans l'extrait de l'article "Oulipocktail" de Camille Laurens du 14 février 2020 dans Le Monde des Livres au sujet du livre de ce Boris, livre qu'il aurait peut-être signé Veron Sullivan et baptisé "On n'y échappe pas":




Ce livre, donc, qui pour le centenaire de Boris Vian a été achevé par six écrivains de l'Oulipo (OUvroir de LItérature POtenteille) qui ont continué l'histoire inachevée par la crise cardiaque, de ce manuscrit qui s'arrêtait au quatrième chapitre... et c'est Clémentine Mélois dont j'ai déjà parlé ici qui en a fait la couverture:





Je ne sais pas si Boris aurait été Pastafariste. En tout cas, c'est très facile de le devenir et Roger-Pol Droit indique dans son article (exactement sous celui de Camille Laurens) "Les leçons du dieu-spaghettis", que certains pays reconnaissent cette religion (les Pays-Bas, Taïwan,..) et que des mariages pastafaristes sont autorisés, de même les photos d'identité avec une passoire sur la tête. 


Fleur de troène confiné - Photo: lfdd

....
Leur divinité est le Monstre en spaghetti volant (Flying Spaghetti Monster), créée en 2005 par Bobby Henderson, alors étudiant de l'université d'État de l'Oregon. Il est invisible et ses premiers fidèles sont nommés les pirates. Ceux-ci sont considérés comme des êtres sacrés. Selon cette religion, ils contribuent à lutter contre le réchauffement climatique et protègent contre les catastrophes naturelles.

Voici une de leur prière:
La prière du savoir
Tirons du Monstre volant en spaghettis, sa sauce
Et de sa sauce, ses nouilles
Et de ses nouilles, ses boulettes de viande
Et de ses boulettes de viande, le savoir
Et du savoir, la connaissance des choses savoureuses
Et de la connaissance de ces choses, l'amour des spaghettis
Et des spaghettis, l'amour du Monstre volant en spaghettis
Ramen

Sur leurs dix commandements, dont il n'en ont gardé que 8, je vous en livre 4: 
«Je préfèrerais vraiment que vous évitiez de juger les gens en fonction de leur apparence, de leur façon de s'habiller ou de leur manière de parler et surtout soyez gentils avec les autres, d'accord!»
«Je préfèrerais vraiment que vous évitiez d'avoir des comportements dégradants pour vous-même ou pour votre libre arbitre ou pour votre partenaire majeur, consentant et mûr mentalement».
«Je préfèrerais vraiment que vous évitiez d'être sectaire, misogyne et d'avoir les idées haineuses d'un estomac vide».
«Je préfèrerais vraiment que vous évitiez de dépenser des fortunes pour construire des synagogues, des églises, des temples, des mosquées et des sanctuaires pour célébrer ma bonté infinie. Faites votre choix pour employer votre argent plus intelligemment pour :
- mettre fin à la pauvreté,
- guérir les maladies,
- vivre en paix, aimer avec passion et réduire le coût de la télévision câblée».

Vous remarquerez la référence discrète au "Je préférerais ne pas", variations autour du Bartleby d'Herman Melville "I would prefer not to"...

Bon, Roger-Pol Droit rappelle en parlant du livre de François De Smet "Deus Casino" qui traite de ce sujet (cette foi), que le droit est démuni face à cette religion que l'on ne peut réfuter en regard de l'ensemble des autres religions: "Soit la croyance se prend au sérieux, et elle transforme ses rêveries en réalités supposées. Soit elle revendique ses rêveries en réalités supposées, et elle fait apparaître celui des autres."



Fleur de troène confiné - Photo: lfdd

Peut-on en dire autant de ceux qui accusent l'homme (ou l'animal) d'avoir créé la Zoonose
Si l'on suit Philippe Descola «Nous sommes devenus des virus pour la planète», comme il le présente dans la tribune éponyme du Monde du 22 mai 2020 en l'expliquant par: 
1. La dégradation et le rétrécissement sans précédent des milieux peu anthropisés du fait de leur exploitation par l’élevage extensif, l’agriculture industrielle, la colonisation interne et l’extraction de minerais et d’énergies fossiles.
2. La persistance criante des inégalités révélée par la situation de crise, à l’intérieur de chaque pays et entre les pays, qui rend ses conséquences très différentes selon la situation sociale et économique dans laquelle on se trouve.
3. La rapidité de la propagation de la pandémie.

Rappelant en passant les énormes dégâts que l'homme occidental a fait aux habitants du "Nouveau Monde" quand il y a importé "nos" maladies qui ont décimé les populations locales.

Rappelant aussi que cette "conscience" de la "nature" a commencé à se mettre en place à la fin du XVIIème siècle en Europe avec "une vision des choses que j’appelle «naturaliste», fondée sur l’idée que les humains vivent dans un monde séparé de celui des non-humains.
Sous le nom de nature, ce monde séparé pouvait devenir objet d’enquête scientifique, ressource illimitée, réservoir de symboles. Cette révolution mentale est l’une des sources de l’exploitation effrénée de la nature par le capitalisme industriel en même temps que du développement sans précédent des connaissances scientifiques.
Mais elle nous a fait oublier que la chaîne de la vie est formée de maillons interdépendants, dont certains ne sont pas vivants, et que nous ne pouvons pas nous abstraire du monde à notre guise.
Le «nous» n’a donc guère de sens si l’on songe que le microbiote de chacun d’entre «nous» est composé de milliers de milliards d’« eux », ou que le CO² que j’émets aujourd’hui affectera encore le climat dans mille ans. Les virus, les microorganismes, les espèces animales et végétales que nous avons modifiées au fil des millénaires sont nos commensaux dans le banquet parfois tragique de la vie. Il est absurde de penser que l’on pourrait en prendre congé pour vivre dans une bulle.
Et je vous laisse creuser - et réfléchir aux solutions qu'il préconise d'urgence - mais j'ai l'impression que ce que l'on pensait urgent avant (le déconfinement) ne l'est plus après - dans le nouveau "monde d'après"... d'aujourd'hui.


Fleur de troène déconfiné - Photo: lfdd

Nous pouvons toujours lire le billet d'Enrico Letta qui suit celui de Philippe Descola: "L’interdépendance humaine guidera notre transition vers le monde de demain" Et où il nous met également en garde vis-à-vis du "Changement radical" qui nous attend:
"L’interdépendance humaine signifie en effet que nous vivons un changement radical par rapport au monde que nous connaissions jusqu’à hier, qui était dominé par des frontières, des oppositions, des murs. Un monde d’identités contraires, construit autour de distances réelles, amplifiées – souvent de façon démesurée – par des superstructures politiques et économiques qui s’étaient développées au fil du temps.
C’était le monde dans lequel les éléments de notre individualité se dessinaient en opposition à ceux de l’autre et où la différence des modèles économiques garantissait l’incommunicabilité et donc l’imperméabilité."
... "L’interdépendance humaine implique aussi que nos comportements irresponsables font immanquablement du mal aux autres et sont susceptibles, au terme d’une série plus ou moins longue d’interactions, de nous revenir comme un boomerang. L’interdépendance humaine signifie que nous entrons dans un monde qui se pose la question de la gestion politique et économique efficace d’un faisceau d’interconnexions, de liens et d’appels incessants entre les pays et les systèmes."

Pour finir en poésie, je vous offre une voix qui s'est tue, celle de Michel Picolli, qui dit les poèmes d'Aragon dans un film d'Agnès Varda "Elsa la Rose qui fait se rencontrer Aragon, Maïakovski et Ella Yourievna Kagan, la soeur de Lili Brick, l'amoureuse de ce dernier...



Elsa la rose (1966) AGNÈS VARDA

Pour compléter ces poésies, qui de meiux que Jean Ferrat pour chanter les Yeux d'Elsa, en voici deux versions, celle d'oridine (1960) et une version récente (2000)..




Et pour ne pas s'arrêter en si bon chemin, un hommage à La France:




Et la chanson "Nuit et Brouillard" pour ne pas oublier:




On me dit à présent que ces mots n'ont plus cours
Qu'il vaut mieux ne chanter que des chansons d'amour
Que le sang sèche vite en entrant dans l'histoire
Et qu'il ne sert à rien de prendre une guitare

Mais qui donc est de taille à pouvoir m'arrêter ?

L'ombre s'est faite humaine, aujourd'hui c'est l'été
Je twisterais les mots s'il fallait les twister
Pour qu'un jour les enfants sachent qui vous étiez

Vous étiez vingt et cent, vous étiez des milliers

Nus et maigres, tremblants, dans ces wagons plombés
Qui déchiriez la nuit de vos ongles battants
Vous étiez des milliers, vous étiez vingt et cent 


Et pour rebalancer dans "avant", je vous remet la "Chanson d'Hélène" du film "Les Choses de la Vie" de Claude Sautet, chantée par Michel Picolli et Romy Schneider:


  
Et pour finir, fermez les yeux et écoutez:





Bon Dimanche

La Fleur du Dimanche

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