jeudi 4 décembre 2025

Le concert Minimal des Percussions de Strasbourg à Hautepierre: un plaisir maximal et une émotion partagée

 Au Théâtre de Hautepierre, juste à côté des studios du groupe des Percussions de Strasbourg, le public est chez soi chez eux.... De retour d'une tournée mondiale qui les a amenés en Chine (pour trois dates), en Corée (2 concerts à Séoul) au Canada (Montréal avec deux concerts dont un avec, entre autres, l'ensemble Sixtrum qui était venu à Musica cette année) et aux Etats-Unis (trois concerts à Rochester, Columbus et Indianapolis), le groupe revient dans SA salle (enfin presque) pour un concert exceptionnel à plus d'un titre. D'une part, c'est pour la première présentation à Strasbourg de leur disque Minimal qu'il viennent d'enregistrer sous la direction artistique de Vincent Peirani, le musicien de jazz (mais pas que). Ce programme a d'abord été créé lors de cet enregistrement et le groupe l'a présenté dans sa tournée mondiale et aussi le 26 novembre à Altkirch. D'autre part, et c'est un peu la surprise que l'on attendait, c'est le dernier concert auquel participe à Strasbourg Mihn-Tâm Nguyen en tant que directeur artistique des Percussions de Strasbourg, et c'était un moment d'émotion, de bilan et de passations sur lequel nous reviendrons, mais place au concert.


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Camille Pépin - Photo: Robert Becker


Le programme a été conçu à l'origine autour d'un échange de Mihn-Tâm Nguyen avec Camille Pépin, jeune compositrice (née en 1990 à Amiens), nommée "compositrice de l'année" aux Victoire de la Musique classique en 2020 qui lui expose son admiration pour Steve Reich, un des pionniers de la musique minimaliste au Etats-Unis. Et donc cette commande Avant, pendant, et pourtant qui ouvre le concert (mais pas le CD). 


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Camille Pépin - Photo: Robert Becker


L'instrumentarium, lui aussi réduit au minimum, est constitué de deux marimbas et de deux vibraphones, conjuguant les sonorités du bois avec celle du métal, à l'instar de la pièce Mallet Quartet de Steve Reich qui est la référence dans le programme (et le CD dont elle fait l'ouverture). Le premier mouvement est assez calme, reposant, les frappes légères posent un paysage serein en vagues légères qui s'éteignent. 


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Camille Pépin - Photo: Robert Becker


Pour le deuxième mouvement, les archets qui font vibrer les lames de manière très délicates créent un flottement mystérieux, entre las graves et les aigus. Et la troisième partie, plus longue et plus instable nous emmène dans une montée en rythme et en tension avec des motifs qui à la fois se répètent et alternent pour croître et s'éteindre dans le silence.


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Yang Song - Photo: Robert Becker


La deuxième pièce, également une commande des Percussions, mais qui n'est pas sur le CD, est en quelque sorte un "bonus" du concert. La compositrice chinoise Yang Sung (née en 1987 en Mongolie Intérieure) a étudié, entre autres à l'Ircam et à Cologne en Allemagne. Sa pièce Ombre interroge le minimalisme à la lumière des airs traditionnelles de sa région et elle alterne des mouvements d'ensemble vigoureux avec quelques épisodes plus légers. Un dialogue également entre les interprètes. Un moment plus doux, aérien nous fait entendre de légères égratignures, comme des gouttes d'eau aériennes. Puis ce sont poursuites en accélérations qui gagnent en force et en puissance.


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Steve Reich - Photo: Robert Becker

Minimal -  Percussions de Strasbourg - Steve Reich - Photo: Robert Becker

Minimal -  Percussions de Strasbourg - Steve Reich - Photo: Robert Becker


Place au "maître", avec Mallet Quartet (2009), une pièce tardive, mais classique de Steve Reich qui débute par un duo de marimbas qui font le socle rythmique et mélodique et qui sont rejoints par les vibraphones, mais en variations et de rythme, et de mélodies, qui apparaissent quelquefois soudainement puis disparaissent à nouveau. La pièce est composée de trois mouvements, deux rapides qui encadrent un mouvement lent qui s'aère, ralentit au point de presque disparaître. Et puis c'est reparti pour une nouvelle course entrainante qui s'accélère. 

Minimal -  Percussions de Strasbourg - Nick Bärtsch - Photo: Robert Becker

Minimal -  Percussions de Strasbourg - Nick Bärtsch - Photo: Robert Becker


On continue avec Seven Eleven de Nick Bärtsch, le musicien suisse qui touche au jazz (nous avions vu sa pièce Shaker Kami avec les Percussions de Strasbourg avec Jazzdor en février 2020, un des derniers concerts d'avant le confinement). L'esprit zen du compositeur apparaît bien ici avec ses rythmiques en répétition et quelques résonnances La pièce est foncièrement répétitive, des variations sous-tendent les mélodies qui se répètent et l'effet, à la fois calmant et mystérieux, nous portent de leurs mélodies qui se diffusent et nous imprègnent. La pièce finit par trois frappes après une première salve.



Et l'on finit avec une composition de l'Américaine Shelley Washington (née en 1991), Sunday qui commence par une douce mélodie, presque féérique, un beau paysage qui se dessine, tendre et serein. Une promenade dominicale dans le parc ou à la campagne. Mais les choses s'accélèrent, les vibrations se font plus tendues, les frappes plus serrées, nerveuses, et puis se distendent et l'atmosphère se rassénère, les mélodies et vibrations se font plus zen.


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Saluts - Photo: Robert Becker


En introduction de la pièce, Mihn-Tâm Nguyen en a profité pour annoncer sa dernière prestations en tant de Directeur artistique des Percussions de Strasbourg à ce concert. L'occasion de jeter un regard rétrospectif et de constater le chemin parcouru, depuis son arrivée aux Percussions en 2014 et surtout sa nomination comme directeur artistique en 2017: l'augmentation du nombre de concerts et des tournées et surtout l'ancrage dans le quartier de Hautepierre - socle du travail des musiciens - les interventions en milieu scolaire, Percustra et ses animations, la notoriété mais aussi la sympathie acquise ici, le renouvellement du public, et le bilan de tous les concerts Live @Home dont celui, mémorable, de sortie de confinement pour la fête de la Musique en 2020. Il a bien sûr profité pour saluer et remercier son équipe actuelle et passée pour leur collaboration pleine et entière.


Minimal -  Percussions de Strasbourg - Surpise - Photo: Robert Becker


La fin du concert est aussi l"occasion pour le président des Percussions de Strasbourg, Jean-Yves Bainier de remercier Mihn-Tâm Nguyen pour son engagement et sa ténacité et de clôre sur une surprise musicale avec tout le monde sur le plateau. Et même la nouvelle directrice artistique Vassilena Serafimova qui a, elle aussi, rendu hommage à l'esprit des "Percussions", ayant baigné dedans dans sa Bulgarie natale via son père, et qui ne s'est pas fait prier pour prendre sa place avec les baguettes devant le vibraphones de Tâm. Un moment très émouvant pour tout le monde. Et une relève qui part du bon pied. Une soirée de lancement de disque et de passation en tout cas très réussie.


A bientôt...


La Fleur du Dimanche





 

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