Baleine, un texte de Simon Vincent qu'il met en scène lui-même, avec Anne-Laure Sanchez, qui interprétait hier la dernière d'une série de douze représentations de L'Illetric, plonge ce lundi dans le ventre de la Baleine pour quatre représentations.
Le texte, une création - comme il se doit presque pour le Festival de Caves - raconte à plusieurs niveaux de narration qui se superposent, les rêves de grand large d'un homme qui les abandonne en échouant dans un port pour se noyer, s'engluer dans son lit, dans une chambre dans laquelle sédimentent les strates de sa vie passée. Que serait-il devenu, si un soir, mu par une force inconnue, il n'avait pas "quitté son trou". Parce qu'elle, "Elle était là dans le noir".
Baleine - Simon Vincent - Anne-Laure Sanchez - Festival de Caves - Photo: lfdd |
Et c'est ainsi que cela commence, dans le noir, ce lent et long cheminement vers elle, présence invisible mais massive dans la nuit, échouée sur la plage, en bas des falaises. Celle vers qui, dans un dur apprivoisement il va aller, qu'il va rejoindre, répondant à un autre appel, malgré la "prise au vent", le "déséquilibre de l'équilibriste". L'occasion de se retrouver double (cf le billet d'hier), à la fois se racontant hors de soi, en biographe autocritique, et dans un discours amoureux de séduction avec l'animal: "Je suis un homme" (... et je veux que tu m'aimes, même si tu es déjà morte).
Mais l'amour est aveugle, et il ne voit pas la mort, il continue sa lente approche, son apprivoisement, sa cour (entrecoupée d'envolées oniriques - il s'envole au-dessus de la baleine bien vivante, nageant dans l'océan, et tel un oiseau, se pose sur elle comme sur un rocher ou alors dans un rêve aquatique sous-marin, il caresse sa peau. Le cétacé échoué est sa seule bouée de sauvetage pour s'enfuir de cette ville, de cette vie: "Emmène-moi" lui dit-il, avant de rejouer le mythe de Jonas en se lovant dans son ventre pour en finir.
Baleine - Simon Vincent - Anne-Laure Sanchez - Festival de Caves - Photo: lfdd |
Et la clé est dans une chanson:
"My body is a cage that keeps me
From dancing with the one I love
But my mind holds the key"
"Mon corps est une cage qui me retient
De danser avec celle que j'aime
Mais mon esprit est la clé"
Et l'on sort de cette cave voutée, comme si l'on avait fait, nous aussi le voyage dans le ventre de la baleine, à écouter les soliloques de cet homme qui nous chuchote à l'oreille.
Et cet "homme", c'est Anne-Lise Sanchez qui incarne magistralement tous ces changements de niveaux d'interprétation et de discours (dans un registre très différent de la veille), et arrive à le rendre complètement présent et vivant avec ses phantasmes et ses multiples états, tout en assurant les changements d'ambiance par les réglages de la lumière et même la "régie sonore".
La Fleur du Dimanche
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