dimanche 3 janvier 2016

Esprit es-tu là - Es-tu las?

L'esprit nous hante.... Depuis quelques temps déjà...
Souvenez-vous, en 2015 - c'était l'année dernière !
Il y a eu des films, des pièces de théâtre, des réflexions qui nous ont mené vers ce territoire, et puis deux éléments qui se sont rejoints par attraction, sans raison, en faisant tranquillement leur chemin...


Esprit de feuilles - Photo: lfdd


Il y a eu un texte de Jean-Luc Nancy intitulé "L'esprit aujourd'hui" qu'un ami, Alain L., m'a révélé le 30 décembre... et qui m'a inspiré le titre de ce billet que je m'étais promis de rédiger aujourd'hui en ayant trouvé le TVA du jour, et la photo aurait été celle-là, le fantôme de l'orchidée du 27 septembre 2015:


Esprit d'orchidée - Photo: lfdd


Il y avait donc cet "Esprit" (qui nous abandonne un peu?) et les autres esprits qui infusent dans l'actualité dont je parlais: Le film de Clément Coggitore "Ni le Ciel, Ni la terre" ou "l'Autre Rive" dont je parlais le 12 octobre, ou "En Attendant Godot" le 19 novembre et tous les textes des dimanches qui ont suivi l'orchidée, dont "Tourner la page" et "Haie, rai, paraît, disparaît..."...
Et puis, petit à petit, un autre "esprit" s'est installé et a pris sa place dans le quotidien: celui de "Gigi"...


Gigi est apparue discrètement, délicatement, présence complémentaire de Marcel... Il y a quelques années déjà, leur couple, souvent de noir vêtu marquait de sa présence discrète les événements culturels, expositions, concerts, représentations théâtrales,... 
Nous avons mis un certain temps à nous parler, mais des centres d'intérêts communs nous ont fait nous rencontrer de plus en plus souvent, très souvent le couple, quelquefois Marcel sans Gigi - à Paris par exemple, en pleine rue, par hasard...
Et puis nous avons noué une amitié simple et même une complicité. Je me souviens que les dernières fois, vers la fin de l'année dernière, nous plaisantions avec Gigi en nous donnant rendez-vous presque le lendemain - pour sûr - à un autre événement où nous savions que nous allions probablement nous rencontrer.
Et puis je l'ai rencontrée par hasard, sans le savoir, au détour d'un fait divers dans le journal. Je me disais que c'était trop bête de se faire renverser par une camionnette qui recule sur un parking, et d'en mourir, et d'un autre côté, je plaignais, en plus de la famille de la victime, le conducteur à qui cela était arrivé. Et le lendemain, en apprenant que la victime était Gigi, j'ai eu comme un vide...
Mais depuis, ce vide, je le remplis, je vois la silhouette de Gigi, dans la rue, je l'attend aux endroits où elle devrait être, je lui donne rendez-vous là où je vais... jusqu'à ce samedi ou je l'ai retrouvée, à la galerie In Extremis, lors d'une matinée "entre amis" où le photographe Jean Daubas était mis à l'honneur par Madeleine Millot-Durrenberger.
Une des salles était consacrée à l'autoportrait, et curieusement, il y en avait où le corps du photographe, son image se dissolvait ou n'était qu'une ombre.... Ce que Jean Daubas, et d'autres spectateurs considéraient comme la réincorporation du spectateur dans l'image du photographe: Ils prenaient vie en se fondant dans l'image effacée du photographe... Et pour finir, Madeleine Millot-Durrenberger a rendu hommage à Gigi, qui était membre (entre autre) de l'association In Extremis et qui lors des permanence a eu droit à des portraits polaroid qui ont été montrés. 
L'esprit a pris forme d'image...
Et elle reste dans nos mémoires..

Pour en revenir au "revenant" Jean-Luc Nancy, j'aimerais noter que pour moi il est d'une part lié à un autre double, Philippe Lacoue-Labarthe, qui lui, n'est plus, et, d'autre part, on peut considérer qu'il est un peu "ressuscité", vu qu'en ayant subi une transplantation cardiaque (dont il parle dans son livre "L'Intrus") il a un "coeur" étranger et le coeur n'est-il pas un peu le siège de l'esprit...

Esprit de printemps primevère - Photo: lfdd

Sur ce, passons au TVA initialement prévu. Je vous en livre quelques extraits et réflexions du texte de Jean-Luc Nancy "L'esprit aujourd'hui" et vous invite à en lire l’intégralité sur le blog Stass de la philosophie:

"Où trouver l’esprit aujourd’hui?  est une question deux fois étrange. D’une part comment penser qu’on puisse trouver «l’esprit», le découvrir quelque part?... D’autre part le mot «esprit» est un des plus usés, un des plus risqués et des plus dangereux même. Il a servi au pire comme au meilleur. On ne peut toutefois oublier la parole de Marx qui qualifiait la religion d’ «esprit d’un monde sans esprit».

Avec ou sans Marx on peut dire que l’esprit désigne la production d’un sens (comme lorsqu’on parle de «l’esprit de Dante» ou de «l’esprit de l’art roman»). Un sens n’est pas une signification supposée accomplie (comme «Dieu» ou bien «le bonheur»), c’est un mouvement par lequel une existence se rapporte au monde, aux autres et à elle-même. Ce rapport se renouvelle sans cesse et ne se fixe nulle part (fixé, devenu dogme ou loi, il n’est plus esprit mais «lettre» inerte).
Il ne s’agit donc pas de trouver l’esprit car il n’est situé nulle part et ne consiste en rien de situable (comme un texte ou un nom ou une forme, une image, etc.). L’esprit est déjà là dans le seul fait de s’interroger sur lui et il est encore là même lorsque cette question devient inquiétude et sentiment d’un manque. Il est donc «là», dans ce lieu qui n’est nulle part mais partout à travers nos actes, nos paroles, nos rapports. 

Trop souvent aujourd’hui on croit pouvoir le désigner comme l’esprit de l’humanisme, du droit, de ce qu’on appelle des «valeurs». Il est pourtant très manifeste que ces mots sonnent d’autant plus creux qu’ils sont plus invoqués. L’esprit, c’est quand les mots ne sont pas creux. Quand ils le sont, il faut en changer.
L’ «homme» est un mot qui doit être changé ou bien rechargé de sens. Ce n’est pas un travail linguistique, c’est une tâche pratique, concrète, qui peut se résumer comme la tâche de transformer toute une culture, une société ou une civilisation. 

Nous avons le sentiment et même la conscience que notre civilisation a d’elle-même effacé l’esprit qui avait été le sien. On ne revient pas en arrière – ou bien on paralyse l’existence.
L’esprit aujourd’hui est déjà là, au moins de cette manière: existons, désirons et inventons la force, les sens et les formes d’exister."

En plus de l’esprit d'orchidée, je vous ai offert les feuilles  qui ne craignent pas l'hiver et les primevères qui elles aussi croient que le printemps est arrivé...

j'allais oublier la chanson des esprits las, en l’occurrence le Bal des Lazes:

  



Et pour finir, ce que je vous souhaite pour cette année, c'est d'exister, d'inventer et d'avoir du plaisir...



Bonne Année

La Fleur du Dimanche 

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